par Marie-Pierre Peillon, Directrice de la Recherche de Groupama AM
Etats-Unis : Le « falaise budgétaire » reste le thème dominant pour l’économie
L’économie américaine a fait mieux que prévu au troisième trimestre, affichant une croissance de 2% en rythme annualisé après 1,3% au deuxième trimestre. Bien qu’une contribution inhabituelle des dépenses publiques (+0,7 points) explique une partie du meilleur résultat, il n’en reste pas moins que la consommation des ménages s’est mieux tenue (2% après 1,5%), tout comme l’investissement résidentiel (14,4% après 8,4%).
La grande question est de savoir si les préoccupations fiscales et la faiblesse des revenus auront ou non un effet négatif sur les dépenses des ménages d’ici la fin de l’année. En revanche, et sans grande surprise à la lumière de l’évolution défavorable des commandes de biens d’équipements, l’investissement productif s’est replié (-1,3% après 3,6%). Les incertitudes liées au « mur fiscal » ont vraisemblablement pesé sur les projets d’investissement. Enfin les exportations nettes, qui ont expliqué la moitié de la hausse du PIB depuis plus de deux ans, se sont contractées au troisième trimestre, reflétant la détérioration du commerce international.
Le Président Obama aura finalement été réélu plus facilement que les sondages ne l’annonçaient tandis que les résultats des élections au Congrès sont comme attendu : le Sénat reste démocrate et la Chambre des Représentants républicaine. Les négociations sur les moyens d’éviter la « falaise budgétaire » seront par conséquent difficiles même s’il est vraisemblable qu’un accord sera trouvé d’ici la fin de l’année permettant ainsi à l’économie d’échapper à la récession en 2013.
Zone euro : Un troisième trimestre moins mauvais que prévu
Le PIB de la zone euro s’est contracté de 0,1% au troisième trimestre après avoir enregistré une baisse de 0,2% au printemps, laissant techniquement la région en récession. Ceci dit, comparé aux enquêtes de conjoncture qui indiquaient une contraction plus marquée, le meilleur résultat est dû à des données de production industrielle étonnamment positives (dans le secteur automobile en particulier).
Ce rebond inexpliqué de la production est en passe d’être corrigé au quatrième trimestre. Les détails par pays montrent que la croissance allemande et française ont été positives, mais largement compensées par la faiblesse du reste de la région, en particulier les Pays Bas et le Portugal. Les contractions de PIB en Italie et en Espagne se sont poursuivies mais à un rythme moindre que lors des précédents trimestres.
Néanmoins, les perspectives pour l’économie réelle restent moroses à court et moyen terme. Un recul plus prononcé de l’activité au dernier trimestre est vraisemblable.
Le rythme de contraction de la demande intérieure demeurera intense : la consommation des ménages devrait rester atone, étant donné la dégradation du marché du travail et la hausse de la fiscalité ; du coté des entreprises, la baisse de l’investissement productif va perdurer compte tenu de la faiblesse des carnets de commande et de la baisse des taux d’utilisation des capacités de production. Enfin, le soutien des exportations nettes devrait disparaître, en ligne avec le ralentissement du commerce mondial.
Pays émergents : Du mieux sur la demande interne, mais des vents contraires en provenance des économies avancées
Plusieurs pays émergents bénéficient d’une amélioration de leur conjoncture, au premier rang desquels le Brésil et la Chine. Dans ces pays, les assouplissements monétaires entrepris il y a quelques mois commencent à se diffuser à la demande interne. Cette reprise reste toutefois modérée, mais devrait être soutenue par de nouveaux assouplissements monétaires, rendus possibles par l’accalmie des tensions inflationnistes qui ont prévalu pendant l’été. La politique budgétaire est également un facteur de soutien, en particulier en Chine avec la mise en œuvre des plans d’investissement dans le secteur ferroviaire. La nomination d’une nouvelle équipe dirigeante par le Congrès du Parti Communiste Chinois ne devrait pas modifier l’orientation générale de la politique économique chinoise à courte échéance. Cependant, l’annonce au mois de décembre de la cible de croissance pour 2013 renseignera sur les priorités qui lui sont assignées (la cible avait été fixée à 7,5% pour 2012). La situation des économies avancées continue de peser sur les pays émergents, principalement par le biais du commerce extérieur.
Les exportations vers la zone euro continuent de diminuer, en particulier en Chine. Ceci devrait se perpétuer, compte tenu de l’évolution actuelle de la conjoncture en zone euro, et les pays émergents devront donc trouver des relais de croissance en leur sein.