par Benjamin Melman, Global CIO Asset Management chez Edmond de Rothschild
Les actifs risqués sont en net repli depuis le 27 octobre, tirés vers le bas par les actions européennes. Sans aucun doute, la dégradation de la situation sanitaire et le risque de retour au confinement sont à la source de ce mouvement. Non seulement l’épidémie est devenue explosive ces derniers jours en Europe mais les marchés ont été surpris que l’hypothèse du reconfinement revienne sur le devant de la scène, sachant que beaucoup avaient compris que cette option était devenue improbable au regard de son coût. Les annonces faites en France et en Allemagne hier soir confirment les craintes et laissent penser que la démarche a aussi une dimension européenne.
Si les valeurs les plus cycliques ont logiquement le plus souffert dans ce repli, il est intéressant de noter, même s’il est dangereux de tirer des conclusions hâtives sur deux séances de baisse, qu’il n’est pas apparu cette fois-ci de valeurs refuges. Les GAFA ont ainsi baissé dans un même mouvement. Dans certains cas, même plus que les principaux marchés. Et les emprunts d’Etats les plus solides n’ont que très marginalement progressé au cours de la journée du 28 octobre. En revanche, du côté des actions, ce sont les marchés asiatiques qui résistent le mieux, l’Asie étant épargnée par cette reprise de l’épidémie.
Le manque de réactivité des emprunts d’Etats américains ou allemands tend à confirmer la raison pour laquelle nous avons choisi de réduire leur pondération dans nos portefeuilles la semaine dernière : leur rendement ne rémunère plus (en tous cas en Europe) et ils ont perdu l’essentiel de leur capacité à protéger les portefeuilles. Le marché du crédit européen a réagi globalement en ligne avec le reste des actifs risqués, le crédit Investment Grade réussissant même à rester très stable dans cet environnement.
Si nous n’avions pas anticipé une telle réaction des marchés ces derniers jours, nous avions choisi d’abaisser la semaine dernière le poids des actions européennes au profit des actions asiatiques pour des raisons de différentiel de dynamique d’épidémie en conservant globalement une allocation équilibrée en termes de risques. En effet, si la situation se détériore à court terme et génère de la volatilité, des options pouvant avoir un impact de grande ampleur restent ouvertes au cours des prochaines semaines. On peut s’attendre à un nouveau plan de relance très conséquent si les Démocrates s’emparent du pouvoir aux Etats-Unis la semaine prochaine comme le laissent présager les sondages, ainsi qu’à l’annonce d’une conclusion favorable de la phase III d’un vaccin, certains laboratoires comme Moderna ou Pfizer laissant entendre qu’ils sont en bonne voie.
Dans ce contexte, nous prenons acte du regain de volatilité mais n’entendons pas modifier notre allocation. Il serait en effet dommage de ne pas être en mesure de profiter du potentiel de rebond des marchés au cours des prochaines semaines tout comme il serait hasardeux de rajouter du risque dans les portefeuilles dans un contexte où l’incertitude reste élevée mais les valorisations pas suffisamment attractives. Bien évidemment, dans ce contexte mouvant, nous nous tenons prêts à faire évoluer la politique d’investissement en fonction du déroulement des différentes étapes, à commencer par l’élection américaine. Au sein de nos principaux fonds, nous pilotons tactiquement cet épisode sans perdre le cap, à savoir la normalisation progressive de notre environnement.