par John Plassard, Spécialiste en investissement chez Mirabaud
Alors que l’on se retrouve à un an du « fameux » retournement des marchés, la notion de « récession » revient de plus en plus sur le devant de la scène. Notion qui rappelons-le avait poussé la tendance à la baisse et littéralement fait paniquer les investisseurs en décembre lorsque la courbe des taux s’était inversée. Aujourd’hui nous ne revenons pas sur l’inversion de la courbe des taux (que j’ai abordé à de nombreuses reprises), mais sur la notion de récession avec les tenants et les aboutissants historiques. Synthèse et analyse.
a. Les faits
Depuis les années 1950, les périodes de ralentissement économiques sont relativement fréquentes, mais les récessions sont plus rares. À l’échelle mondiale on a connu une seule récession (recul du PIB mondial) en 2009. Aux États-Unis celle-ci commence dès le début de 2008. Dans les pays européens, elle démarre à la fin de 2008 après l’aggravation de la crise financière mondiale (faillite de Lehman Brothers).
Une récession est globale lorsqu'elle touche à la fois la production industrielle, le commerce à travers les échanges internationaux, l'emploi, le niveau des revenus ainsi que la consommation des ménages. La récession est l'une des phases du cycle économique dans le système capitaliste : expansion, crise, récession, reprise.
La récession se distingue de la dépression où la diminution du PIB est durable et où l'activité économique ne se redresse pas naturellement.
En décembre 2018, les bourses mondiales avaient plongé dans le sillage de Wall Street. L'hypothèse d'une récession en 2020 gagnait du terrain et rendait nerveux les investisseurs. D'autant que la courbe des taux américains n'avait jamais été aussi près de s'inverser.
b. Comment réagissent les marchés lors d’une récession ?
Historiquement, le marché boursier a tendance à bien se comporter depuis le début d'une récession (au sens du National Bureau of Economic Research) jusqu'à ce que celle-ci soit officiellement terminée.
Dans plus de 60% des cas, le S&P 500 a évolué en territoire positif durant les (précédentes) récessions. Lors des 11 dernières, l’indice américain a même connu une croissance à 2 chiffres à 5 reprises.
Affirmer que les actions ne baissent pas lorsque l’économie ralentit est bien évidemment faux. En allant plus en détail, on constate que ces périodes sont parsemées d'accidents parmi les pires jamais enregistrés. La seule fois qu’il n’y a pas eu une baisse (durant une récession) de plus de 10% a été en 1945 après la deuxième guerre mondiale.
Il faut plutôt comprendre que le cycle boursier s'aligne rarement avec le cycle économique.
c. Comment réagissent les marchés avant une récession ?
Contrairement à ce que le consensus voudrait nous faire croire, le marché des actions est un très mauvais indicateur pour prévoir les récessions, que cela soit à 6 mois ou à 3 mois. En effet, historiquement, on constate que le S&P 500 progresse de 1% (1.2% sur 6 mois et 1% sur 3 mois) alors que l’on pourrait penser que c’est la baisse qui devrait prévaloir dans un phénomène d’anticipation.
Essayer de déterminer le lien entre un bear-market et une récession est aussi peine perdue car les écarts- temps peuvent varier de 0 à 12 mois…
On a cependant constaté (ci-dessous) que les grandes capitalisations (blue chips) ont tendance à surperformer plusieurs classes d’actifs les 12 mois qui ont précédé une récession.
d. Comment réagissent les marchés après une récession ?
Pour ceux qui pensait que c’était la « gueule de bois » qui suivait les récessions, ils devront se raviser aussi. En effet, depuis plus de 70 ans le S&P 500 progresse fortement 1 an après la fin de la récession (dans 10 des 12 récessions), 3 ans après (dans 100% des cas avec une seule progression en « single digit » suivant la récession de 2001) et 5 ans après (dans 100% des cas avec une moyenne de progression de … 120% !).
Affirmer qu’il faut acheter des actions lors (ou à la fin) d’une récession n’est donc pas une hérésie. Bien au contraire.
e. En cas de bear market faut-il être plutôt investi en obligations ou en actions ?
Trouver un bon point d’entrée au courant d’une récession n’est cependant pas une chose aisée puisque sa durée peut varier fortement.
On pourrait alors tenter (durant une récession donc) de se diversifier en achetant par exemple des bons du Trésor américain même en période de faibles taux d’intérêt.
Si on prend le cas des bons du Trésor à 5 ans, on constate que depuis 1940, dans les marchés baissiers associés à une récession, ils ont toujours connu une progression (contrairement au S&P 500). La plus faible hausse a été dans la (courte) période de 1957 avec +1.40%. La plus forte progression s’est matérialisée entre 2000 et 2002 avec un gain de 32.70%.
f. Synthèse
On a constaté il y a exactement 1 année que les indices (en perdant près de 20% pour certains) avaient été perturbés par la « notion » de récession qui avait été largement exagérée. Une immersion dans les précédentes récessions étaient donc tout à fait nécessaire pour répéter qu’il ne convient pas de paniquer lors le terme récession va revenir dans les discussions.