Europe : vers un régime sans Grèce ?

par Emmanuel Auboyneau, Gérant Associé, Xavier d’Ornellas, Gérant Associé – Pôle Gestion Flexible, chez Amplégest, avec la participation de Jean-Michel Mourette, Economiste (Eureka Finance) 

A l’heure où nous écrivons ces lignes il est difficile de se prononcer sur le dénouement de l’imbroglio grec. Ce feuilleton tragi comique, qui n’a que beaucoup trop duré, ne cessera pas d’un coup de baguette magique. Quelles que soient les décisions prises ces prochains jours, la Grèce, qui a techniquement fait défaut, restera au menu de l’Europe et des marchés pendant encore un bon moment. Nous restons par ailleurs persuadés que les principales victimes de la crise actuelle seront les grecs eux-mêmes.

La question centrale pour nous investisseurs est de savoir s’il y a un risque réel et important de contagion aux autres pays de la zone euro. Notre conviction est que la faillite grecque n’est pas le prélude à un vaste jeu de dominos en Europe. La BCE fera tout ce qui est en son pouvoir, et son pouvoir est grand, pour prévenir un embrasement de la zone.

Cette crise ne devrait pas non plus remettre en cause l’amélioration, progressive mais réelle, de l’économie européenne. Les catalyseurs qui ont sous tendu cette reprise sont toujours là : politique monétaire très accommodante, pétrole bas, euro faible. Nous restons convaincus que les bénéfices des sociétés européennes vont s’améliorer avec des perspectives positives pour 2016 et 2017. Comme les marchés ont horreur de l’incertitude, nous pouvons encore subir une grande nervosité à court terme. Les investisseurs et la politique ne font souvent pas bon ménage, mais n’oublions pas les données fondamentales favorables et profitons d’éventuelles baisses conséquentes pour procéder à des achats ou à des renforcements à bon compte.

De l’autre côté de l’Atlantique, les dernières statistiques économiques nous confirment que le trou d’air des premiers mois de l’année est derrière nous. L’amélioration est encore trop récente pour que le second trimestre soit très fort. Nous sommes en revanche optimistes sur les résultats du second semestre. Confiance des ménages, chômage, immobilier vont dans le sens d’une économie solide. Cela conforte notre pronostic d’une hausse imminente des taux d’intérêt. Si nous jugeons cette action indispensable à ce stade du cycle américain, nous savons par expérience que la relation entre hausse des taux et marchés actions est souvent tumultueuse. C’est la raison pour laquelle nous sommes aujourd’hui sous pondérés sur les actions américaines.

La Chine est également un sujet d’interrogations aujourd’hui. Les statistiques économiques semblent manipulées et peu fiables. Il est clair toutefois que l’économie chinoise décélère de manière importante. La transformation de la Chine, qui est de moins en moins l’usine du monde, en une économie de croissance interne avec l’émergence d’une classe moyenne conséquente, prend du temps et doit être pilotée finement par le gouvernement. La forte hausse de la bourse chinoise depuis le début de l’année tient davantage à des facteurs techniques (rapprochement avec la bourse de Hong-Kong, incitations du gouvernement pour investir, flux) qu’à des raisons fondamentales. Nous restons prudents et attendons une vraie correction pour éventuellement nous positionner. De la même façon nous sommes sous-pondérés sur les marchés émergents.

L’épisode actuel sur la Grèce, qui évolue d’heure en heure, de coups de théâtres en volte faces, est un bon exemple des facteurs exogènes qui peuvent enrayer provisoirement la machine des marchés. L’Ukraine, ou le Moyen Orient sont deux autres risques potentiels qui peuvent apparaître à tout moment. Soyons réactifs, tout en gardant le cap global que nous fixe notre analyse macro-économique.

Très bon été à tous !