Finance durable : inclusion et diversité, catalyseurs de performance

par Nicolas Magnac-Dajean, CFA, spécialiste investissements senior Multi Assets chez Nordea Asset Management

Faire confiance aux entreprises engagés prônant la diversité et l’inclusion permet aux investisseurs de saisir des opportunités de croissance à long terme qu’ils ne devraient pas négliger. 

Si le respect des critères ESG (Environnementaux, sociaux et de gouvernance) est au cœur des préoccupations de nombreux gestionnaires d’actifs, il faut reconnaître que le « S » reste un angle mort de la finance responsable. Pourtant, la promotion de la diversité et de l’inclusion et les luttes contre les discriminations au sein des entreprises peuvent avoir des répercussions largement positives pour la société dans son ensemble… mais aussi pour les investisseurs. Si l’on se réfère par exemple aux Objectif de Développement Durable (ODD) fixés par l’ONU pour 2030, la prise en compte de l’ODD 5 (Egalité entre les sexes) aura un impact positif sur les ODD 1 (pas de pauvreté), 2 (faim « zéro »), 3 (bonne santé et bien-être) et 4 (éducation de qualité). L’accès à l’éducation des jeunes filles et les progrès de l’égalité hommes-femmes apparaissent ainsi comme des conditions essentielles du développement économique au bénéfice de tous, tant pour les pays émergents que développés.

S’ouvrir à tous les talents

S’intéresser aux entreprises dont les pratiques en matière de diversité et d’inclusion sont remarquées est un moyen astucieux de repérer les émetteurs susceptibles de dégager un rendement attractif à long terme. Des études le prouvent : les entreprises situées dans le meilleur quartile en termes de diversité ont 25% de probabilité de dégager une marge opérationnelle supérieure*. Les entreprises plus ouvertes à la diversité et plus inclusives ont davantage de chances d’attirer des talents. Par exemple, L’Oréal ou Meta Platforms comptent une forte proportion de femmes dans leurs effectifs et parmi les équipes dirigeantes ainsi qu’une diversité assumée. Elles se placent en effet dans une position plus favorable pour mieux capter l’environnement et les attentes de leur clientèle. Une étude montre aussi que les sociétés qui comptent au moins 15% de femmes parmi les managers seniors ont un rendement des capitaux employés supérieur de 18% en moyenne.** Enfin, cette même étude montre que les entreprises avec plus de 50% de femmes dans leur top management payent des dividendes 14.8% supérieurs à l’indice MSCI ACWI. ** 

Approche réaliste

Convaincus que la diversité et l’inclusion sont des sources de performance à long terme, nous proposons le fonds Nordea 1 – Global Diversity Engagement Fund. Au sein d’un univers d’investissement le plus large possible (MSCI All Countries), nous cherchons à repérer les entreprises réellement mobilisées autour de la diversité et de l’inclusion. Nous allons par exemple sélectionner des sociétés dont les conseils d’administration comptent au moins 30% de femmes, ou avec une trajectoire crédible pour y parvenir. La stratégie prend en compte les différences culturelles (e.g. Japon ou pays émergents) et les trajectoires récentes d’entreprises situées proche de ce seuil. La clé est d’avoir une approche réaliste selon les zones géographiques pour repérer les entreprises où la volonté de la direction et le potentiel de progression autour de ces enjeux sont les plus significatifs.

Critères scrutés à la loupe

Les critères regardés à la loupe, sont divisés en 4 grandes thèmes : Diversité du management, Inclusion, Pipeline de Talents et Changement lié à la Diversité. Le premier thème inclut le pourcentage de femmes membres du conseil d’administration, du management intermédiaire ou encore de la masse salariale. L’inclusion comprend notamment les données liées à la présence d’un responsable de la diversité, la mesure des écarts salariaux par quartiles, ainsi que la présence de critères liés à la diversité et l’inclusion dans l’évaluation des senior managers, éléments collectés depuis 2017 par l’indice Bloomberg Gender-Equality Index (BGEI) Reporting Framework. Le facteur lié au pipeline de talents comprend les critères tels que la mise en place d’une stratégie visant à augmenter la représentation des femmes, ou encore d’un plan d’action pour augmenter leur part dans le management, ce qui est également intégré par l’indice Bloomberg BGEI. Enfin, le thème du changement lié à la diversité inclut la publication par les entreprises de leurs plans d’actions avec contraintes de temps pour combler les différences salariales femmes-hommes.

Privilégier l’engagement

Notre approche consiste en effet à privilégier les entreprises cherchant à améliorer leur profil de diversité et d’inclusion. Pas question de ne s’intéresser qu’aux « bons élèves » mais davantage encore à ceux qui s’engagent pour le devenir. C’est tout l’enjeu de notre démarche d’engagement. En tant qu’actionnaires, nous votons lors des assemblées générales des sociétés investies et maintenons un accompagnement vigilant pour les aider à progresser vers l’excellence en matière de diversité et d’inclusion. L’impact final pour l’actionnaire sera d’autant plus élevé pour les entreprises qui auront su faire évoluer leurs pratiques dans le bon sens. En effet, les sociétés à la main-d’œuvre diversifiée tendent à voir leurs créativité et innovation renforcées grâce à l’apport de perspectives et d’expériences variées, à l’instar du succès de L’Oréal. Concrètement, nous focalisons nos engagements sur les entreprises en voie d’amélioration ou en retard modéré, avec un effort plus fort sur cette dernière catégorie. 

L’exemple américain

Des collaborateurs venant d’horizons différents et travaillant au sein d’une même entreprise sont souvent mieux armés pour comprendre l’évolution de leurs marchés et détecter les tendances de demain. Sur ce plan-là, les grandes entreprises technologiques américaines tirent le marché vers le haut. A contrario, les sociétés moins engagées en matière de diversité et d’inclusion ont globalement des performances financières inférieures. Ces différences ont contribué à la surperformance massive de ces sociétés technologiques diverses, qui ont représenté près de 50% de la performance des indices S&P 500 ou MSCI World. Encore originale, cette grille d’analyse peut ainsi offrir des opportunités aux investisseurs sensibilisés à cette thématique.