par Hélène Baudchon, Economiste chez BNP Paribas
• Les résultats des enquêtes de confiance du mois de février sont plutôt défavorables et attestent des risques baissiers pesant sur la croissance.
• Certes, le climat des affaires dans le secteur manufacturier a réservé une bonne surprise en restant inchangé malgré les secousses sur les marchés financiers et la croissance mondiale.
• Leurs effets apparaissent en revanche dans la dégradation du climat des affaires dans les services et le commerce de détail, et dans le recul de la confiance des ménages.
• Le plus probable, d’après nous, est que ce repli de la confiance reste transitoire compte tenu, notamment, des effets positifs sur la croissance de la faiblesse des prix du pétrole.
La publication des enquêtes de confiance en France pour le mois de février a réservé quelques surprises. Plus exactement, la baisse des indices composites (-2 points, à 100, pour celui de l’INSEE et -0,4 point, à 49,8, pour le PMI de Markit) n’est pas surprenante au regard de la détérioration marquée de l’environnement extérieur et de la forte correction boursière. En revanche, dans le détail, la baisse ne s’est pas toujours produite là où on pouvait l’attendre.
Le climat des affaires s’est en effet détérioré dans les services et non dans le secteur manufacturier, un résultat contre-intuitif. Etant plus tourné vers l’environnement extérieur, le secteur manufacturier est plus exposé aux secousses actuelles de la croissance mondiale. Or, le climat des affaires s’y est très légèrement amélioré d’après l’indice PMI de Markit (+0,3 point, à 50,3, estimation préliminaire) et il est resté stable d’après l’enquête de l’INSEE (à 103), préservant le mieux enregistré en janvier. De plus, les détails de ces enquêtes sont plutôt favorables avec, notamment, une forte amélioration du jugement des industriels (enquête INSEE) sur leurs perspectives personnelles de production. On voit, en revanche, la trace de la détérioration de l’environnement international dans celle du jugement sur les perspectives générales de production.
La détérioration du climat des affaires dans les services pose question (-1 point, à 99, pour l’enquête de l’INSEE et -0,5 point, à 49,8, pour le PMI). Plus orienté sur le marché intérieur, ce secteur est pourtant de nature à bénéficier des effets positifs de la faiblesse des prix du pétrole sur le pouvoir d’achat. En janvier, ils avaient fait le poids face aux turbulences boursières mais celles-ci l’ont visiblement emporté en février. Il en va de même pour le climat des affaires dans le commerce de détail.
L’indice INSEE, qui le synthétise, a reperdu 2 points (à 103). Il reste, certes, au-dessus de sa moyenne de long terme de référence 100 (commune à l’ensemble des enquêtes INSEE et qui correspond, au niveau agrégé, à un taux de croissance trimestriel moyen du PIB de 0,3-0,4%). Mais sa baisse est due à celle des soldes d’opinion relatifs aux perspectives et semble donc aussi porter la trace de la déroute des marchés actions. S’agissant du recul de l’indice INSEE du climat des affaires dans le bâtiment, il intervient après trois mois d’amélioration et peut être vu comme une correction technique (-1 point après un gain cumulé de 3 points). Toutefois, la dégradation du solde d’opinion sur les perspectives d’activité est à surveiller. En cas de prolongation, elle refroidirait les espoirs d’une sortie de crise du secteur.
Quant à la confiance des ménages, sa résistance en janvier (+1 point) a laissé la place à un net repli en février (- 2 points, à 95). Trois soldes d’opinion se distinguent par leur nette dégradation : celui relatif à l’opportunité de faire des achats importants, le jugement sur les perspectives d’évolution du niveau de vie en France et celui sur le chômage. Notons, toutefois, que ces différents soldes alternant les hausses et les baisses ces derniers mois, leur rechute en février s’en trouve relativisée. Comme les évolutions négatives des autres enquêtes, elle ne nous inquiète donc pas outre-mesure à ce stade. Toute la question est de savoir si la gêne restera occasionnelle ou si elle se prolongera. Nous penchons en faveur de la première option dans la mesure où la croissance française bénéficie d’importants facteurs de soutien : à la faiblesse des prix des matières premières s’ajoutent le très bas niveau des taux d’intérêt, un change qui reste favorable et les diverses mesures de redressement de la compétitivité et de l’emploi.
Ces différents résultats font peser un risque baissier sur notre prévision de croissance de 0,4% t/t au premier trimestre 2016. A contrario, celle-ci se trouve confortée par la nouvelle hausse de 0,6% m/m en janvier des dépenses de consommation des ménages en biens (après +1% m/m en décembre). La baisse de 0,8% m/m en janvier du nombre des demandeurs d’emploi inscrits en catégorie A à Pôle emploi est l’autre bonne nouvelle de la semaine (bien qu’elle apparaisse fragile). De même, nous voyons d’un bon œil la légère révision en hausse de la croissance au quatrième trimestre 2015, à 0,3% t/t au lieu de 0,2% selon l’estimation préliminaire.