Grèce : un nouveau mandat pour Syriza

par Frédérique Cerisier, économiste chez BNP Paribas

  Alexis Tsipras a remporté les élections avec une avance plus forte que prévu, et reconduit à l’identique la coalition inaugurée en janvier dernier.

•  Celle-ci sera vraisemblablement déterminée à mettre en place le programme d’ajustement européen, tout en continuant à se montrer très ambitieuse sur la question de l’allègement de la dette.

A la tête de son parti Syriza, Alexis Tspiras a remporté haut la main le scrutin législatif du 20 septembre dernier. Alors que la plupart des sondages le donnaient au coude-à-coude avec le parti conservateur Nouvelle Démocratie (ND), son avance est large sur son principal adversaire, avec 35,5% des votes exprimés contre 28% pour ND. En outre, et contre toute attente, son partenaire de coalition depuis janvier dernier, le parti des Grecs indépendants ANEL est parvenu à se maintenir au-dessus du seuil de 3% des suffrages et donc de conserver dix députés dans la nouvelle assemblée. La victoire serait totale pour Alexis Tsipras si, par rapport à janvier 2015, le taux d’abstention n’avait pas bondi de plus de sept points, à 43,4%, signe d’un découragement croissant des électeurs face à une situation jugée inextricable.

Compte tenu de la prime de cinquante députés que la loi électorale grecque accorde au parti vainqueur, Syriza est représenté par 145 députés dans la nouvelle chambre (contre 75 pour ND). Alexis Tspiras a donc pu lever toutes les incertitudes dès le soir des élections, en annonçant qu’il reconduisait à l’identique la coalition lancée en janvier. Celle-ci disposera de 155 sièges sur 300 dans la nouvelle assemblée. Même si elle est un peu plus étroite que sous la législature précédente, le fait que cette majorité ait pu être constituée aussi simplement est déjà une grande surprise.

L’accord avec les Européens conforté

Pour les créanciers et partenaires européens de la Grèce, ce résultat est plutôt une bonne nouvelle, salué d’ailleurs comme telle par la plupart des dirigeants européens. D’abord parce qu’il écarte, vraisemblablement pour de longs mois, le risque d’une instabilité politique qui aurait pu entraver ou retarder la mise en œuvre du programme, et notamment les étapes cruciales que sont le reprofilage de la dette publique et la recapitalisation du secteur bancaire. Deuxièmement, parce que le maintien d’un vote important en faveur de Syriza et l’échec des listes regroupant les dissidents du parti (2,9% des suffrages) ont montré que les électeurs grecs approuvent la volte-face opérée par A. Tsipras cet été, et sa décision de coopérer avec les Européens pour mettre en place un troisième programme de financement. Pour les institutions et les chefs d’Etats de la zone euro, cela signifie qu’ils peuvent compter sur la détermination du gouvernement à mettre en place le programme, gouvernement qui continuera en même temps à se montrer très ambitieux sur la question de l’allègement de la dette.

Enfin, il est remarquable que, tout en choisissant le maintien dans la zone euro et la coopération avec les Européens, les électeurs ne se sont pas pour autant tournés vers les partis d’opposition (ND, Pasok To Potami) qui, tout au long du premier semestre, prônaient un tel accord. Ceci devrait permettre à Alexis Tsipras de se prévaloir d’un mandat clair pour renouveler le paysage et les pratiques politiques grecques, et renforce probablement assez fortement son assise auprès des Européens.

NOTES

  1. Pour une analyse du sous-emploi aux Etats-Unis, voir Estiot, A. (2014) « Etats-Unis, la vérité est ailleurs », Conjoncture BNP Paribas, Octobre-Novembre 2014.
  2. Pour une analyse du risque émergent et de l’exposition au dollar des économies émergentes, voir Faure, F. (2015) « La Chine, le dollar et la dette : un cocktail amer », EcoWeek n°15-30 du 4 septembre 2015.

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