par Christophe Donay, Responsable de l’allocation d’actifs et de la recherche macroéconomique chez Pictet Wealth Management
A l’échelle microéconomique, tout change autour de nous à une vitesse accélérée. A l’échelle macroéconomique, les pays développés semblent à la fois de plus en plus instables et sans direction précise. Pour autant, l’économie mondiale n’est pas en crise : elle est en mutation profonde. Les chocs d’innovation en sont la principale raison.
L’innovation peut prendre deux autres formes que l’évidente forme technologique à laquelle elle ne peut se résumer. Schumpeter a fait de l’innovation une force de destruction-créatrice à l’origine de la dynamique de développement des économies capitalistes. Une analyse plus fine de ce couple permet de comprendre les interactions plus complexes que la simple dualité destruction et création. Les chocs d’innovation sont simultanément technologiques, politiques et cognitifs. Le choc d’innovation technologique est lui-même issu de sept grands secteurs d’activité : 1. Informatique, 2. Internet, 3. Energies nouvelles, 4. Energies alternatives, 5. Transports, 6. Matériaux intelligents et 7. Biotechnologies.
Ces trois types de chocs d’innovation génèrent quatre paradoxes majeurs que semblent subir les économies développées. Premier paradoxe, malgré le choc d’innovation, la croissance économique reste très lente contrairement à ce que l’histoire du capitalisme nous a montré. Deuxième paradoxe, ces économies souffrent d’une croissance lente et pourtant, aux Etats-Unis principalement, le plein emploi a été retrouvé à en juger par un taux de chômage proche de son niveau le plus bas observé au cours des phases d’expansion économique. Troisième paradoxe, le plein-emploi devrait générer une hausse soutenue des salaires et partant, une accélération de l’inflation. Aucune de ces pressions n’est aujourd’hui observable. Quatrième et dernier paradoxe, les gains de productivité faibles s’accompagnent pourtant de marges des grandes entreprises sur les marchés financiers américains à des niveaux historiquement élevés.
Pour l’investisseur, le choc d’innovation comporte une ambiguïté. D’une part, en tassant et en érodant les perspectives de croissance économique dans les pays développées, les espoirs de performance des portefeuilles sont faibles. Plus précisément, les rentabilités des principales classes d’actifs (actions, obligations souveraines, obligations d’entreprise et cash) sont entre 30% et 70% inférieures aux moyennes historiques observées depuis les années 50. D’autre part, l’innovation offre des opportunités d’investissement particulièrement uniques car il est d’ores et déjà possible d’investir dans l’innovation dans les marchés privés mais aussi dans les marchés publics. Ces investissements promettent d’espérer une amélioration de plus de 50% de la performance des portefeuilles.