par Frederik Ducrozet, Economiste chez Pictet Wealth Management
Sans surprise, le communiqué de la BCE n’a subi aucun changement notable en décembre, y compris sur les aspects les plus importants concernant le guidage des anticipations. Les taux directeurs resteront bas jusque « bien après » la fin du programme de rachats d’actifs, qui continuera jusqu’à ce que le Conseil des gouverneurs observe un ajustement durable et auto-entretenu sur l’inflation.
x Mario Draghi a toutefois longuement insisté sur la confiance retrouvée de la BCE dans sa capacité à accomplir son mandat, en lien avec l’accélération de la croissance en zone euro. Cette confiance se reflète dans les nouvelles prévisions du staff des économistes de la BCE, révisés « significativement » à la hausse sur la croissance, à 2,4% cette année, 2,3% en 2018, avant de ralentir à 1,9% en 2019 et 1,7% en 2020. Un tel niveau d’expansion de l’activité permettrait de fermer l’écart de production dans le courant de l’année prochaine et ainsi de contribuer à alimenter les pressions inflationnistes.
Les prévisions d’inflation ont été révisées à la hausse, mais depuis un point de départ plus bas qu’attendu, proche de 1.5% entre 2017 et 2019, avant d’augmenter à 1.7% en moyenne en 2017 (et 1.8% au second semestre 2018). A noter que l’inflation sous-jacente, à l’exclusion des prix alimentaires et de l’énergie, remonterait de 1% cette année à 1.8% en moyenne en 2020, un chiffre à première vue très ambitieux. L’explication est simple : la BCE croit toujours en la validité de la courbe de Phillips qui lie activité, chômage, salaires et inflation, si bien que les révisions sur les deux premières variables entraînent mécaniquement les deux dernières à la hausse.
Les principales questions pour 2018 restent ouvertes. Si l’inflation remonte effectivement comme la BCE l’espère, sa communication va devenir progressivement moins accommodante, sans que l’on sache quand ni comment. Si au contraire, l’inflation déçoit, les marchés pourraient de nouveau mettre la BCE sous pression en l’absence de marge de manœuvre pour assouplir sa politique monétaire. Dans tous les cas, on peut raisonnablement s’attendre à une grande prudence de la part de la BCE, qui fera tout pour ne pas brusquer les marchés et mettre en péril une reprise économique qui semble presque trop belle pour être vraie.