La conjoncture américaine est en passe de rebondir fortement

par Klaus Wiener, Chef économiste de Generali Investments Europe

• La conjoncture américaine est en passe de rebondir fortement après sa faiblesse hivernale. Par ailleurs, l'inflation a commencé à augmenter.

• Dans ce contexte, nous pensons que les marchés s'attendront de plus en plus à la fin de taux directeurs exceptionnellement faibles.

• Nous pensons que la Fed n'a aucune urgence à relever le taux des fonds fédéraux mais qu'elle réfléchira à la façon optimale de gérer cette période de transition cruciale.

Après un taux préliminaire déjà faible de 0,1 % en rythme annualisé, la croissance du PIB au premier trimestre a été révisée à la baisse à – 1,0 %, ce qui est sa première baisse depuis le 1er trimestre 2011. Toutefois, cette révision à la baisse est presque entièrement due à des effets de stocks qui grèvent maintenant la croissance de 1,6 point de pourcentage (pp) contre 0,6 pp auparavant. Les exportations nettes ont été révisées à – 1,0 % (contre 0,8 % auparavant). Les investissements structurels des entreprises ont diminué de 7,5 %, alors que l'estimation initiale était de + 0,2 %. En revanche, la consommation des ménages a continué à croître à un très bon rythme de 3,1 % (3,0 % auparavant).

Fort rebond après la faiblesse hivernale

En dépit de cette révision à la baisse, nous maintenons notre prévision d'un fort rebond après la faiblesse hivernale. Cela est en partie dû au fait que l'activité économique a été affectée par de très mauvaises conditions climatiques pendant les mois d'hiver. En outre, l'accélération du déstockage au 1er trimestre implique que les stocks donneront un coup de fouet à la croissance au 2ème trimestre. Enfin et surtout, les derniers indicateurs nous confortent dans notre prévision de croissance de plus de 4 % pour le trimestre qui est en cours.

Par exemple, les principaux indicateurs de production sont maintenant largement supérieurs au seuil critique de 50. Par ailleurs, l'indice Markit PMI a légèrement progressé, passant à 56,2 en mai, contre 55,4 en avril. Le dynamisme du secteur manufacturier est aussi illustré par les commandes de biens durables qui étaient plutôt faibles en avril (commandes : -1.2 % en glissement mensuel) mais cette baisse intervient après une forte hausse de 4,7 % en glissement mensuel au mois de mars. Si l'on passe outre cette volatilité d'un mois à l'autre, les deux dernières séries de statistiques indiquent conjointement un fort rebond après la faiblesse hivernale.

Notre prévision d'une accélération de la croissance s'appuie aussi sur le fait que la consommation des ménages continuera de bénéficier d'une forte croissance de l'emploi. Les nouvelles demandes d'allocation chômage ont baissé à 312 000 (moyenne sur quatre semaines), leur niveau le plus bas depuis le début de la récession, tandis que les demandes existantes sont à leur niveau le plus bas depuis 2007. La croissance de l'emploi a rebondi à 288 000 le mois dernier. Nous ne pensons pas que ce niveau très élevé sera maintenu mais prévoyons une croissance moyenne de plus de 200 000 par mois en 2014. Ce serait une nette accélération par rapport aux moins de 200 000 par mois des trois dernières années. La hausse qu'ont entamé les salaires soutiendra les revenus disponibles, si bien que nous nous attendons à ce que la consommation reste un facteur de soutien déterminant pour la reprise. Les dépenses d'investissement devraient aussi augmenter puisque l'incertitude budgétaire est moindre (suspension du plafond de la dette prolongée jusqu'en 2015), que les profits des entreprises sont robustes (malgré leur faiblesse au 1er trimestre) et que la de- mande finale remonte.

La seule faiblesse que nous constatons concerne l'investissement résidentiel. Les indicateurs de mars et d'avril étaient assez mitigés mais le rebond qui a suivi la baisse hivernale a été plus faible que prévu. Nous prévoyons encore une accélération des investissements dans le logement grâce à l'augmentation du nombre de ménages et à des conditions financières encore propices, mais cette évolution mérite d'être surveillée. Dans l'ensemble, les principaux indicateurs économiques confirment l'hypothèse d'une croissance accrue après la faiblesse du 1er trimestre.

L'inflation a commencé à augmenter

Les dernières statistiques de l'inflation indiquent que la pression sur les prix a commencé à s'affermir légèrement puisque, pour la deuxième fois consécutive, l'IPC de référence était de 0,2 % en glissement mensuel. En conséquence, le taux à 3 mois a augmenté, passant de seulement 1,4 % en rythme annualisé en février à 2,3 % en avril. Loin de prévoir une explosion de l'inflation américaine, nous nous attendons à une in- flation moyenne de 2,3 % cette année contre 1,8 % l'an dernier, par l'effet conjoint de l'accélération des prêts bancaires, d'une dérive salariale plus forte et d'une demande accrue. Ce point de vue est corroboré par les dernières minutes de la réunion du FOMC dont la prévision officielle est que l'inflation remontera vers sa cible. Les minutes de la réunion montrent aussi que les fonctionnaires de la Fed avaient de nouveau examiné les « principes d'une stratégie de sortie » de la Fed. Nous affirmons à nouveau que la Fed n'est absolument pas pressée de relever ses taux. Cela dit, la probabilité est de plus en plus forte que le premier relèvement du taux des fonds fédéraux aura lieu au printemps 2015.