Par Valentijn van Nieuwenhuijzen, Directeur de la Stratégie chez ING Investment Management
Les principaux facteurs sous-jacents influençant notre répartition des actifs sont depuis quelques mois le renforcement du redressement de l’économie mondiale tiré par les économies matures et la normalisation progressive de la répartition des actifs des grands investisseurs institutionnels mondiaux.
Ces deux facteurs plaident clairement en faveur des actions. En ce qui concerne le second, on observe que l’exposition aux actions ne cesse de croître. Depuis le début de l’année, les flux de capitaux vers les fonds d’actions ont été de loin les plus importants. Alors que dans un premier temps, les liquidités extrêmement élevées étaient utilisées pour augmenter la pondération des actions, on constate également depuis quelques mois un glissement accru des obligations vers les actions.
L’évocation d’un démantèlement de l’assouplissement quantitatif par le président de la Fed, Ben Bernanke, qui a eu pour conséquence une hausse des taux obligataires a constitué pour de nombreux investisseurs le signe de départ pour un allègement de leur portefeuille obligataire. La « Grande Rotation » dont il a souvent été question au début de l’année semble dès lors avoir finalement débuté.
Nous ne nous attendons cependant pas à ce que les investisseurs se débarrassent massivement de leurs obligations. Ceci est rendu impossible par des facteurs structurels tels que le vieillissement de la population qui entraîne une solide demande de placements générant des revenus et la réglementation qui oblige les investisseurs institutionnels à détenir un important portefeuille obligataire.
Nous pensons néanmoins que le glissement des obligations vers les actions ne fait que commencer. Depuis le début du siècle, les placements à revenus fixes ont bénéficié d’énormes entrées de capitaux. Une combinaison de crises financières (éclatement de la bulle spéculative technologique, scandales comptables, crise du crédit et de la dette) et de modifications de la réglementation a détourné les investisseurs (institutionnels) des actions au profit des obligations. La baisse graduelle des taux à 10 ans – depuis les années 1980 déjà – a donné un sérieux coup de pouce aux investisseurs en obligations. Les liquidités massives injectées ces dernières années par les banques centrales dans le système financier ont également pesé sur les taux. Cette tendance semble maintenant se renverser.
Bien que la Fed ait reporté quelque peu le démantèlement de sa politique monétaire extrêmement souple, les signes indiquant que l’économie se redresse se multiplient. Une amélioration des chiffres économiques est visible depuis mai au Japon et aux États-Unis et est apparue quelques mois plus tard au Royaume-Uni et dans la zone euro. Depuis août, on constate que les marchés émergents commencent également à profiter du redressement de la demande des économies matures.
En dehors du fait que l’accélération et l’élargissement de la reprise économique exercent des pressions haussières sur les taux d’intérêt, cette évolution est également positive pour les actions. Une nouvelle phase du marché haussier semble avoir débuté. Une croissance économique plus élevée combinée à une modeste augmentation des marges bénéficiaires contribuera à un redressement de la croissance bénéficiaire. Ceci sera surtout perceptible au niveau des sociétés européennes et japonaises. L’Europe est en outre largement sous-évaluée et profite d’une réduction persistante de la perception du risque lié à la zone euro auprès des investisseurs. La première bataille de la « Grande Rotation » semble dès lors pour l’Europe.