par Ombretta Signori, Responsable de la Recherche Macroéconomique et Stratégie chez OFI AM
À la fin septembre aux États-Unis, le « shutdown » (fermeture du gouverne- ment) a été évité de justesse. Cepen- dant, le risque n’est que reporté, car le financement du gouvernement américain est assuré environ jusqu’à la mi-novembre, et les républicains et les démocrates demeurent en désaccord fondamental sur la manière de finan- cer le gouvernement à long terme. Cette polarisation de la vie politique risque de s’accentuer davantage dans la perspective des élections.
Sur le plan économique, les États- Unis ont dépassé toutes les attentes en matière de croissance depuis le début de l’année. Les données économiques à haute fréquence indiquent une activité toujours bien orientée et en accélération. De plus, les comptes révisés de la comptabilité nationale suggèrent une solidité accrue tant pour les entreprises que pour les particuliers. Les résultats des entreprises ont été revus à la hausse malgré les hausses de taux d’intérêt de la Réserve fédérale américaine
depuis mars 2022, la charge d’intérêts pour les entreprises américaines en pourcentage de leurs revenus est la plus basse depuis le milieu des années 1960, à 1,8 % du chiffre d’affaires. Du côté des ménages, l’épargne excédentaire à la fin d’août serait d’environ 1 000 Md$ au lieu de 600 Md$ ; son utilisation future reste incertaine, mais elle représente néanmoins un matelas financier solide pour l’économie.
La Fed a pris acte de cette résilience et a relevé ses prévisions de croissance pour cette année et l’année prochaine lors de sa réunion de septembre, les portant respectivement à 2,1 % et 1,5 % en glissement annuel sur le quatrième trimestre.
QUELS RISQUES SUR LA CROISSANCE AMÉRICAINE ?
Outre un ralentissement conjoncturel qui n’est pas encore survenu, il existe trois risques ponctuels pour la croissance d’ici la fin de l’année. Le premier concerne la possible fermeture du gouvernement, repoussée à novembre. Le deuxième est la grève dans le secteur automobile, dont l’impact dépendra de sa durée et de son ampleur. Le dernier concerne la reprise du remboursement des prêts étudiants, qui pourrait avoir un impact inégal selon les catégories de revenus, mais qui devrait être atténué par l’utilisation de l’épargne excédentaire, notamment pour les ménages les plus aisés.
En ce qui concerne les prix, la ten- dance désinflationniste se poursuit, même si l’augmentation du prix du
pétrole (et donc des prix de l’es- sence) pourrait faire grimper l’inflation américaine totale de 3,7 % à environ 4,5 % en fin d’année. Cela est un fac- teur de vigilance, mais pour l’instant, il ne semble pas remettre en question le retour progressif de l’inflation vers les 2 % fin 2024.
DES SIGNES ENCOURAGEANTS SUR L’INFLATION EN ZONE EURO
La divergence économique avec la zone Euro est manifeste, une zone qui en moyenne pourrait être en contraction au troisième trimestre. Cependant, selon les enquêtes de la Commission européenne et les indices des directeurs d’achat (PMI), la situation ne se détériore plus, en particulier en Allemagne. En sep- tembre, l’inflation baisse plus que pré- vu, y compris l’inflation sous-jacente, ce qui est une bonne nouvelle. L’in- flation totale s’établit à 4,3 % sur un an (après 5,2 % en août), et l’inflation sous-jacente à 4,5 % (après 5,3 %). Cette baisse s’explique à la fois par des effets de base importants sur les prix de l’énergie et des services de transport, notamment en provenance d’Allemagne, ainsi que par un ralen- tissement des hausses de prix des biens manufacturés et des services. Bien que les risques en zone Euro demeurent orientés à la baisse, la désinflation est encourageante pour le pouvoir d’achat des ménages, d’au- tant plus qu’elle s’accompagne d’une poursuite du rattrapage des salaires.
LES BANQUES CENTRALES TOUJOURS EN ALERTE
En conclusion, les données écono- miques continuent de justifier la vigi- lance des Banques Centrales à l’égard de l’inflation. Il est bien trop tôt pour prendre en considération une éven- tuelle réduction des taux directeurs lors des réunions de politique moné- taire. Au contraire, à la Fed, la plupart des gouverneurs estiment qu’une der- nière hausse des taux serait appro- priée d’ici la fin de l’année. Notre vue demeure inchangée : les taux directeurs resteront élevés pour une période prolongée.