par Emmanuel Auboyneau, Gérant Associé, et Xavier d'Ornellas, Gérant Associé Pôle Gestion Flexible chez Amplégest avec la participation de Jean-Michel Mourette, Economiste (Eureka Finance)
Les dernières statistiques américaines nous laissent perplexes. D’un côté le scénario d’une croissance solide est validé par les chiffres de l’emploi, toujours forts. De l’autre, des indicateurs industriels importants, comme les commandes de biens d’équipement, l’investissement ou le moral des entrepreneurs, fléchissent depuis quelques mois.
Paradoxale est également la faible hausse de la consommation des ménages, alors que le gain de pouvoir d’achat lié au repli du pétrole et au rebond des salaires aurait dû produire l’effet contraire, d’autant que la confiance du consommateur est élevée. La baisse du pétrole n’a probablement pas eu le résultat escompté, les ménages ne croyant pas à sa pérennité. Ils préfèrent augmenter leur épargne, contrairement à leur comportement habituel.
Que se passe-t-il aux USA ? On peut imaginer une décélération conjoncturelle due à plusieurs éléments. Tout d’abord un épisode météorologique défavorable dans une bonne partie du pays (comme en 2014…) a pu avoir un impact négatif sur l’économie. Par ailleurs une grève dure dans les ports américains de la côte Est a sans doute eu un effet ponctuel sur l’activité. La hausse du dollar a enfin contribué à la dégradation du sentiment des industriels qui voient leur compétitivité à l’exportation diminuer. Le premier trimestre 2015 devrait donc décevoir aux USA. Nous pensons que, comme l’année dernière, les trimestres suivants seront plus vigoureux.
Ces incertitudes n’ont sûrement pas échappé à la FED qui hésite toujours sur son calendrier de hausse des taux. Elle ne veut surtout pas casser la dynamique de croissance et prépare en douceur l’économie et les marchés à son premier mouvement. Le terme patience, qui a plusieurs fois figuré dans les communiqués de la FED, n’y apparait plus désormais. Madame Yellen n’est pas pour autant devenue impatiente. La science de la patience, ou l’absence d’impatience, tout l’art de la sémantique d’une banque centrale… Nous n’échapperons pas pour autant à des hausses de taux aux USA en 2015.
La Fed doit normaliser sa politique pendant que le cycle économique est favorable.
Bien loin de ces considérations, l’Europe, qui n’en est qu’au début de son cycle de croissance, confirme sa reprise. Les voyants sont au vert et devraient éviter à notre continent la déflation qui menaçait l’année dernière. La BCE agit, fortement, et donne cette grande bouffée d’oxygène dont l’Europe avait besoin. Le couple pétrole dollar apparait comme un accélérateur de ce mouvement de fond. Le crédit repart nettement et la confiance semble de retour. Les entreprises restent prudentes à ce stade, mais des révisions à la hausse de leurs perspectives de résultats devraient survenir rapidement. Deux banques centrales, deux attitudes opposées, l’une dans la dialectique, l’autre dans la dynamique, ainsi va la vie économique de notre monde. On pourrait ajouter une Banque du Japon toujours très active et une Banque de Chine qui a promis des mesures contre le ralentissement économique.
Le manque de liquidités ne menace pas la planète !
Nos portefeuilles continuent de bénéficier de notre préférence européenne et du pari japonais au travers de nos fonds internationaux. Après un trimestre de hausse soutenue on peut se poser la question de la poursuite d’un tel mouvement. Si nous n’excluons pas des replis transitoires liés par exemple à la politique monétaire américaine, ou des blocages politiques en Europe (Grèce, Espagne, Royaume-Uni…), nous croyons toujours au potentiel des actions. La rentabilité faible et le risque lié aux obligations, la décroissance continue du rendement du fonds euro d’assurance vie et, plus généralement, la rémunération proche de zéro de tous les actifs sans risques, militent pour une gestion plus active.
La période est propice aux risques. Continuons à être optimistes comme nous le sommes depuis quelques mois !