par Stefan Keller, Stratégiste allocation d’actifs chez CANDRIAM
Le résultat des élections générales en Allemagne implique la continuité d’une politique financière et économique modérée, car une probable coalition de trois partis devrait se rassembler autour d’un programme centriste. Cela devrait limiter les mouvements relatifs des actions et du rendement du Bund. Il faudra plusieurs semaines pour connaître la composition du nouveau gouvernement, y compris le nom du nouveau chancelier. Le gouvernement actuel dirigé par Mme Merkel s’occupera des questions nécessaires en tant qu’intérimaire jusqu’à ce qu’une nouvelle coalition soit assermentée. Nous pensons que cela se produira avant la fin de l’année, car l’Allemagne assurera la présidence du G7 en 2022.
Le prochain chancelier doit obtenir une majorité au Parlement.
Deux scénarios de coalition sont probables : soit un gouvernement dirigé par le SPD (« Traffic light ») sous la houlette d’un chancelier Olaf Scholz, qui a amélioré son résultat de 5,2 points par rapport à la précédente élection en 2017, soit un gouvernement conservateur dirigé par la CDU (« Jamaïque ») sous la houlette d’un chancelier Armin Laschet, qui a perdu 8,9 points et enregistré son pire résultat de l’après-guerre. L’un ou l’autre prendrait la tête d’une coalition comprenant les Verts et le FDP, partisan du marché libre. Le maintien de l’actuelle « grande coalition » entre la CDU (centre-droit) et le SPD (centre-gauche) est mathématiquement possible, mais la volonté politique fait clairement défaut, car il est peu probable que la CDU accepte un rôle secondaire dans un gouvernement dirigé par Olaf Scholz (SPD).
Les partenaires « juniors », les Verts et le FDP, doivent se mettre d’accord sur leurs différences … et sur le chancelier
Dans un Parlement plus fragmenté, où près des trois quarts des députés ne sont pas membres du parti du chancelier, le rôle des partenaires juniors gagne en importance. Cette situation est connue d’autres pays européens, comme l’Italie et l’Espagne, mais représente une évolution significative pour l’Allemagne.
Traditionnellement, les pourparlers de coalition allemands visant à former un gouvernement fédéral se terminent par un « contrat de coalition », qui définit le programme politique et les responsabilités ministérielles pour les quatre prochaines années. Le prochain chancelier doit donc proposer des compromis qui permettent à tous les partis entrant dans la coalition de se rallier à lui.
En fin de compte, c’est entre le parti des Verts et le FDP que le chevauchement est le plus faible, car ils sont en désaccord sur des thèmes politiques clés. Les discussions bilatérales les plus ardues dans les prochains jours sont donc à prévoir entre les deux futurs partenaires juniors car ils divergent sur le logement, la politique du marché du travail, les règles fiscales et la politique européenne. Enfin, compte tenu du résultat des élections, les partenaires juniors que sont les Verts et le FDP choisiront le chancelier.
Les prochaines négociations de coalition feront pencher la balance politique et définiront l’agenda
Nous constatons que le résultat des élections fédérales allemandes est conforme aux sondages les plus récents, qui indiquaient que le résultat était trop serré pour être annoncé. Le fait que le risque de voir la gauche participer à un gouvernement de coalition ne se soit pas concrétisé est un soulagement.
Parmi les considérations politiques, il faut tenir compte du fait que le Parti des Verts a le plus grand chevauchement et qu’il est susceptible de préférer être un partenaire junior dans un gouvernement dirigé par le SPD plutôt que dans un gouvernement dirigé par la CDU/CSU, tandis que le FDP préférerait plutôt le contraire.
Une coalition dirigée par le SPD devrait faire pression avec les Verts en faveur d’une augmentation des dépenses budgétaires et d’une réforme du pacte de stabilité et de croissance de l’UE l’année prochaine dans le sens d’une moindre austérité, tandis que le FDP devrait rester vigilant quant aux règles budgétaires strictes.
Une coalition dirigée par la CDU devrait faire pression avec le FDP pour une modernisation en douceur de l’économie et de l’administration, y compris la nécessaire numérisation, tandis que le parti des Verts devrait rester vigilant sur la transition climatique.
En règle générale, le parti ayant obtenu la plus grande part des voix entame les négociations de coalition. Cette fois, les partenaires juniors devront d’abord régler les choses. L’étape suivante consiste alors à entamer officiellement les négociations de coalition. Au cours de cette phase (qui débutera probablement en octobre), la volatilité pourrait temporairement apparaître si l’un des partenaires juniors se retire des négociations, comme ce fut le cas en 2017. Cela conduirait probablement à une nouvelle grande coalition dont personne ne veut vraiment aujourd’hui.
La question d’un éventuel leadership allemand au sein de l’Union européenne n’a pas trouvé de réponse hier. Nous nous attendons à ce que le nouveau gouvernement prête serment d’ici la fin de l’année afin d’être prêt à assumer la présidence du G7 en 2022 et à collaborer avec son plus proche voisin pendant la présidence française de l’UE au premier semestre 2022. La volonté de soutenir ou non une plus grande marge de manœuvre dans les discussions à venir sur les réformes budgétaires de la zone euro ne sera toutefois décidée que dans les semaines à venir, lorsque les négociations de coalition entre trois partis commenceront officiellement.