Le nouveau « plan tarifaire » de Donald Trump

par David Taieb, Directeur des investissements en actifs cotés chez Sienna Investment Managers

• La hausse des prix générée par les nouveaux droits de douane entraînera un ralentissement de la consommation des ménages américains, moteur de la croissance des Etats-Unis.

• Malgré les promesses de relocalisation industrielle, la hausse des coûts fragilise les entreprises manufacturières, menace les chaînes d’approvisionnement et pourrait entraîner des pertes d’emplois nettes, notamment dans l’automobile, l’électronique et l’agriculture.

La croissance mondiale devrait ralentir, les premières évaluations sont estimées entre -0,3% et -1% selon les régions.

• Les chaînes d’approvisionnement sont perturbées et les exportations vers les États-Unis diminueront, pénalisant les grands partenaires commerciaux. En Europe, des secteurs comme l’automobile ou le luxe seront touchés par le surcoût à l’entrée du marché américain, tandis que certains pays non visés profitent d’un redéploiement des flux.

• Les mesures américaines suscitent des représailles et des critiques à l’étranger, entraînant un risque de fragmentation du système commercial mondial et de nouvelles alliances entre pays.

• L’incertitude liée aux tensions commerciales accentue la volatilité des marchés financiers et entraine la baisse des indices actions mondiaux.

Quelles conséquences sur les marchés financiers ? 

• Les Bourses européennes se replient nettement à l’ouverture de la séance. Le CAC 40 abandonne -2,84 %. L’EuroStoxx 50 -2,96 %. Les indices américains perdent 3,72 % pour le S&P 500 et 4,5 % pour le Nasdaq.

• Sur le marché obligataire, les taux à 10 ans américains sont tombés à 4,04 %, leur plus bas niveau depuis octobre. En Europe, les taux baissent aussi : -7 points de base pour le Bund allemand (2,64 %), -5 pour l’OAT française (3,37 %) et -5 pour le BTP italien (3,76 %).

• Sur le marché des changes, le dollar recule, car les investisseurs anticipent un fort ralentissement de l’économie américaine. L’euro en profite et grimpe à 1,1093 $.

Impact macroéconomique : quel scénario ? 

• L’incertitude persistera tant que les négociations et les mesures de rétorsion, comme celles envisagées par la Chine, n’auront pas de résultats, ce qui affectera la confiance et l’activité mondiale.

• Aux États-Unis, Trump intègre ces droits de douane dans un plan économique visant à stimuler la compétitivité énergétique, réduire les impôts, et déréguler certains secteurs, avec l’espoir de générer 600 milliards de dollars par an pour financer ces baisses d’impôts.

• Cette approche statique ne prend pas en compte les effets macroéconomiques négatifs à court et moyen terme, et la mise en œuvre concrète des baisses fiscales reste incertaine, bien qu’un plan soit en préparation au Sénat.

Mesures stagflationnistes : quelle stratégie ? 

• Ces mesures freinant la croissance et augmentant l’inflation provoquent, à court terme, de la volatilité avec les hausses de prix. A moyen terme, elles affaiblissent le pouvoir d’achat et ralentissent l’économie. Cela affecte les actions et matières premières cycliques, déjà anticipé par les marchés, avec des pertes de 15 à 22 %sur les indices européens et américains.

• Nous profitons de la correction récente pour augmenter notre exposition aux actions européennes, notamment celles des secteurs défensifs et domestiques, moins impactées par les droits de douane. Nous restons attentifs aux plans budgétaires européens et allemands.

• Sur les obligations, l’incertitude persiste à court terme, mais la tendance reste baissière à moyen terme. Le Bund perd de son attrait face aux autres signatures européennes, et nous avons ajusté notre stratégie en conséquence.

• Sur les devises, l’impact sur le yen et le franc suisse est incertain, mais l’euro a progressé de manière agressive, d’où une réduction de notre position. L’or a franchi les 3 000 $ l’once, et nous maintenons notre position en raison de son rôle de valeur refuge.

Pour que les marchés puissent se stabiliser durablement, il faudrait une visibilité accrue (négociations sur les mesures tarifaires, mesures favorables à la croissance aux Etats-Unis avec notamment des précisions sur les baisses d’impôts). Au sein des actions il faut privilégier les valeurs défensives à faible volatilité(télécommunications, utilities notamment), les valeurs domestiques et les valeurs liées aux services moins impactées par les droits de douane.

Au sein des grandes zones, les pays les plus pénalisés en termes de croissance sont les Etats-Unis et la Chine. L’Union européenne s’en sort relativement bien, le taux de 20% étant conforme à nos attentes.