par Cedric de Fonclare, gérant du fonds Jupiter GF European Opportunities chez Jupiter Asset Management
Notre stratégie relève purement du stock-picking, cependant certains éléments macro-économiques doivent être pris en compte pour déterminer où se trouvent les opportunités. Du fait d’une conjoncture domestique difficile et, à notre avis, d’un manque d’opportunités crédibles, nous sommes aujourd’hui très prudents concernant l’Europe du Sud. De plus, les quelques entreprises de cette région ayant une portée internationale sont, selon nous, surévaluées.
Il en résulte une sous-pondération sur les pays d’Europe du Sud, et une surpondération structurelle sur les pays au cœur de l’Europe, notamment sur la Scandinavie, l’Allemagne et la Suisse. Ceci est conforté par la deuxième grande thématique du fonds, qui est de capter la croissance internationale : le cœur de l’Europe est encore un vivier d’opportunités d’investissement et d’entreprises aux ramifications internationales.
Dans les mois à venir, le contexte ne devrait pas beaucoup changer : nous sommes et resterons encore dans un vaste processus de désendettement en Europe et dans les pays développés, et il n’y aura pas non plus de réduction rapide du risque d’interventionnisme politique sur certains secteurs, comme les services de bien public par exemple. Il faut donc, selon nous, rester sur des secteurs qui ne risquent pas d’être dans la visée des politiciens.
Concernant le cas spécifique des valeurs financières, cette stratégie conduit à privilégier les banques pan-européennes au détriment de leurs pairs de la zone euro. Ces dernières restent sous-capitalisées et trop dépendantes des économies moroses de la zone. En France, le Crédit Agricole illustre bien les problèmes rencontrés par les banques de la zone euro : voici une institution financière qui vend au rabais des actifs qu’elle avait achetés des milliards, uniquement pour pouvoir se désengager de ses expositions grecques et italiennes, et qui se recentre sur son marché domestique. Nous pensons que les perspectives sont bien meilleures pour les banques scandinaves, suisses et quelques banques britanniques.
Pour capter la croissance internationale, nous nous concentrons sur des valeurs qui ont été capables de générer une croissance supérieure à la croissance du PIB, mais qui ont aussi un bilan sain. Cette approche par la qualité a été payante par le passé et reste selon nous un facteur clé pour les années à venir. Dans un environnement de croissance faible, si vous n’avez pas la bonne organisation, le bon bilan, le bon management avec l’implication adéquate, le bon accès au marché, il est extrêmement difficile de gagner des parts de marchés. Nous recherchons des entreprises qui maitrisent leur avenir. Et ces critères nous paraissent plus pertinents à l’heure actuelle que les notions d’actions value ou croissance.
A titre d’exemple, voici une sélection de valeurs que nous détenons en portefeuille.
Syngenta : Cette société suisse d’agrofourniture est un des leaders mondiaux de la protection des cultures. Les prix élevés des denrées alimentaires encouragent les cultivateurs à maximiser le rendement de leurs terres. Ils sont donc demandeurs des semences robustes et des pesticides que peut leur fournir Syngenta. La technologie est un facteur clé du développement de l’agriculture, qui devrait rester une tendance de long terme et donc bénéficier à des entreprises comme Syngenta.
Nokian Tyres : ce fabricant de pneus danois, spécialisé dans les pneumatiques adaptés aux conditions extrêmes, est une bonne illustration d’une entreprise européenne profitant de la croissance des marchés émergents, plus particulièrement de la Russie. La vente de voitures sur ce marché se porte bien et les Russes sont enclins à s’équiper avec des produits haut de gamme. Le fabricant bénéficie en outre d’un accès à ce marché lui permettant d’être potentiellement très réactif en cas d’intempéries. Aujourd’hui, la part de marché de Nokian Tyres est de l’ordre de 40% de la distribution directe en Russie.
DuFry : spécialisée dans l’exploitation de commerces situés dans les aéroports, cette enseigne bénéficie pleinement à la fois de la transformation des aéroports en centres commerciaux et de l’explosion du trafic aérien.
Zodiac : ce leader parmi les équipementiers aéronautiques est un des autres bénéficiaires de cette tendance. Zodiac fournit d’un côté les compagnies aériennes et de l’autre jouit de contrats de long-terme auprès des avionneurs.
AZ Electronics : société de moyenne capitalisation, AZ Electronics est un fabricant de produits chimiques qui entrent dans la composition de nombreux produits, comme les semi-conducteurs et les écrans plats. L’augmentation de l’utilisation de semi-conducteurs est une tendance structurelle de long-terme sur laquelle peut compter AZ Electronics. La structure possède un bel historique de génération de cash-flow, elle est peu gourmande en capital, et est manifestement sous-évaluée par rapport à ses pairs.