par Charlotte de Montpellier, Économiste chez ING
L’inflation a de nouveau augmenté en août, après trois mois de baisse, en raison de la hausse des prix de l’énergie. Malgré un rebond de la consommation de biens des ménages, la demande intérieure française reste très faible et une quasi-stagnation du PIB au second semestre 2023 semble le scénario économique le plus probable.
Forte hausse de l’inflation
Après trois mois de baisse, l’inflation en France a de nouveau augmenté en août, et de façon forte, s’établissant à 4.8% contre 4.3% en juillet. L’indice harmonisé, important pour la BCE, s’établi à 5.7% contre 5.1% en juillet. Le rebond du mois d’août est entièrement causé par la hausse des prix de l’énergie, due à la hausse des prix pétroliers et des tarifs d’électricité. Sur un an, les prix de l’énergie sont de nouveau en augmentation (+6.8% en août), alors qu’ils refluaient au cours des mois précédents. Rappelons que, en raison du bouclier tarifaire et des remises sur le prix du carburant, les prix de l’énergie avait beaucoup moins augmenté en France que dans les autres pays européens en 2022. Le point de départ est donc beaucoup plus bas et l’inflation énergétique sera davantage un problème en France qu’ailleurs dans les prochains mois.
Mis à part le rebond de l’inflation énergétique, les détails laissent penser que les pressions inflationnistes sont plutôt en train de se modérer. L’inflation alimentaire continue de refluer, s’établissant à 11.1% en août contre 12.7% en juillet. Cette tendance devrait perdurer dans les prochains mois, quoique lentement. Il faudra probablement attendre 2024 pour que les prix de l’alimentation se stabilisent en croissance annuelle.
Les détails de l’inflation sous-jacente n’ont pas encore été publiés, mais ils devraient indiquer un reflux. En effet, les prix des produits manufacturés ralentissent, s’établissant à 3.1% en août contre 3.4% en juillet. Compte tenu du fait que les prix à la production continuent de diminuer, et sont désormais en repli sur un an (-1.5% en juillet contre +1% le mois précédent), cette tendance devrait perdurer dans les prochains mois. Et ce d’autant plus que les attentes en matière de prix de vente des entreprises de tous les secteurs continuent de diminuer. Enfin, malgré les hausses des salaires, l’inflation des services continue de se modérer également (2.9% contre 3.1% en juillet), ce qui est encourageant. Bien qu’il soit probable que l’inflation des services deviennent, dans les prochains mois, le contributeur principal à l’inflation, le risque d’une explosion des prix des services semble limiter, dans un contexte de croissance économique faible. Dès lors, la tendance à la désinflation devrait reprendre à partir du mois de septembre, même si elle sera probablement moins rapide en France que dans les pays voisins et reste dépendante de l’évolution des prix de l’énergie sur les marchés mondiaux. Nous tablons sur une inflation selon l’indice national de 4.6% en moyenne en 2023. Il faudra probablement attendre la deuxième moitié de 2024 pour que l’inflation retourne à 2%.
Le PIB moins solide qu’annoncé
L’INSEE a aussi publié la deuxième estimation du PIB pour le deuxième trimestre. Bien que le PIB soit toujours estimé en hausse de 0.5% sur le trimestre, les détails sont moins favorables qu’annoncé précédemment. La variation des stocks contribue de façon plus importante que prévu à la croissance, tandis que les exportations sont moins dynamiques qu’annoncé. L’investissement (-0.1% en glissement trimestriel) et la consommation des ménages (-0.5%) ont été revus à la baisse. La contribution de la demande intérieure est donc revue à la baisse, à -0.2 points. Cela fait trois trimestres que la demande intérieure ne croit pas et cela risque de continuer dans les prochains trimestres, notamment en raison d’une consommation des services qui se tasse.
Certes, selon l’INSEE, les dépenses de consommation des ménages en biens ont augmenté de 0.3% en juillet (contre +1.1% en juin). Néanmoins, cette hausse est principalement causée par une consommation plus élevée de biens fabriqués, notamment des biens durables, qui a probablement été boostée par la période de solde. Les stocks bien remplis des fabricants ont probablement conduit à des remises plus importantes. Dans le même temps, la consommation alimentaire se replie de nouveau en juillet et est désormais en chute de 7.9% sur un an, signe que le pouvoir d’achat des ménages reste largement entravé. Bien que la consommation des biens se redresse un peu, la consommation des services attendue plus modérée laisse penser que la dynamique de la consommation totale des ménages restera très faibles dans les prochains mois. Par ailleurs, les investissements devraient continuer à souffrir de la hausse des taux d’intérêt, tandis que les exportations sont impactées par le ralentissement attendu de l’économie mondiale. In fine, une quasi- stagnation du PIB au second semestre 2023 semble le scénario économique le plus probable à ce stade. Nous tablons sur une croissance de 0.8% en moyenne en 2023 et de 0.6% en 2024