par Frédéric Buzaré, responsable de la Gestion Actions chez Dexia AM
À mesure que le marché progresse, la distance entre l’optimiste et le pessimiste s’amenuise. Nous ne pensons cependant pas que le recul actuel du marché va prendre la forme d’une correction sévère. Bien que certains indicateurs avancés récents aient révélé de faibles attentes, nous sommes convaincus qu’ils demeurent suffisamment solides pour ne pas mettre en doute une reprise amorcée.
Il n’est pas inhabituel d’assister, à ce stade du cycle, à une consolidation faisant suite à une amélioration si rapide. Même si nous pouvons parler d’une reprise délicate, les investisseurs ont reporté leur anxiété sur la question de la stratégie de sortie de crise.
Dans ce domaine, les responsables politiques ont les cartes en mains, qu’ils décident d’agir tout simplement trop tard ou qu’ils décident un peu tardivement de passer d’une position extrêmement accomodante à une position normale. Il est fort peu probable que les bonnes décisions soient prises aux bons moments mais nous pourrions assister à un prolongement du contexte actuel relativement favorable si les banques centrales parviennent à gérer avec soin la transition vers une politique plus neutre. Il n’en reste pas moins que nous sommes en terrain inconnu.
La dernière déclaration du FOMC indique clairement que le taux des Fed funds devrait rester proche de zéro pendant encore un certain temps. La stratégie de sortie de crise ne sera pas une question pertinente pour le marché des actions à court terme. De plus, c’est souvent au bout de quelques années que les erreurs politiques sont dévoilées et les surprises pourraient s’avérer nombreuses d’ici là.
Le désendettement des consommateurs, qui est une entrave à une croissance prolongée et significative, et qui a donné naissance à la « nouvelle normalité », continue d’inquiéter les investisseurs. Le fait est que les actions ne nécessitent pas une croissance élevée pour prospérer, mais simplement un certain niveau de croissance. Les indicateurs avancés récents font ressortir une croissance mondiale se situant entre 3 et 4 %. On pourrait en fait argumenter qu’un environnement de croissance faible est préférable à une croissance spectaculaire, dès lors qu'une croissance faible s’accompagne de taux d’intérêt faibles et de liquidités abondantes. Et c’est exactement l’environnement actuel et celui auquel nous devrions être confrontés dans les prochains mois. Une fois de plus, le facteur qui pourrait faire dérailler notre scénario central serait une hausse des taux d’intérêt à long terme, alimentée par une perte de crédibilité des états souverains ou une reprise économique brutale. Une reprise économique réelle, débouchant sur un rebond de l’appétit pour le risque, pourrait encore donner beaucoup d’élan à des rendements des emprunts d’État artificiellement faibles en raison d’une politique monétaire non conventionnelle.
S’agissant des perspectives économiques mondiales, le risque majeur actuellement consisterait à commettre une erreur politique capitale, comme le retrait prématuré des aides. Jusqu’à présent, même si les dirigeants du monde entier se sont engagés à mettre en œuvre des mesures visant à retirer les programmes d’aide d’urgence, ils ont également mis en garde sur le fait que le moment n’était pas encore opportun. Lors de leur dernière réunion, les pays du G20 ont promis de maintenir les politiques conçues pour soutenir la croissance économique, mais ils n’ont pas précisé quand et dans quelles circonstances les gouvernements pourraient entamer le retrait de ces politiques d’incitation lorsque leur économie commencera à se stabiliser au lendemain d’une récession longue d’une année entière. Une fois de plus, le moment choisi pour le futur resserrement des politiques sera essentiel.
Nous observons également qu’un écart demeure entre la perception des investisseurs et la réaction des responsables politiques. Les schémas mis en évidence à la suite des précédentes crises financières et au début de la reprise de marchés baissiers précédents se répètent (surperformance du risque et de la valeur, retour des investisseurs vers les anciens « leaders »). Pendant ce temps, les gouvernements et les responsables politiques affirment que le bon vieux temps est loin derrière nous et que les choses sont différentes cette fois. Mais ne soyons pas trop naïfs. Derrière ce message se cache l’idée que les investisseurs devraient continuer à s’employer normalement à leurs affaires puisque les incitations fiscales et monétaires vont être maintenues tant que le système demeurera vulnérable. Le « tail risk » n’est plus supporté par le secteur privé mais par l’État. L’ampleur et la rapidité de l’effondrement économique et financier de 2008 sont très similaires et comparables au marché baissier et à la profonde récession de 1975. Il n’est donc pas entièrement correct d’affirmer que le récent déclin des marchés boursiers et la récente récession sont les pires de l’après-guerre.
Jusqu’à présent, le schéma du rally des cours des actions entamé en mars dernier au lendemain de l’effondrement, s’apparente fortement à celui de 1975.
Chaque phase du marché se caractérise par un thème qui cristallise l’attention de tous les acteurs et nous n’exagérons en rien si nous affirmons qu’il s’agit aujourd’hui du marché boursier chinois, surveillé avec autant d’attention que n’en avait fait l’objet l’indice Itraxx Crossover il y a six mois ou le marché Nymex des futures il y a deux ans. Beaucoup se demandent si la chute récente des titres chinois est le signe d’une reprise économique qui s’estompe en Chine et, de ce fait, dans le monde entier. Le marché boursier chinois a été le premier à toucher le fond, six mois avant le marché développé, et probablement le premier à atteindre un plafond, indiquant un plafond imminent pour les marchés européens. C’est pourquoi les investisseurs peuvent se montrer anxieux à ce propos. Compte tenu que la Chine mène la danse en termes de reprise et que le gouvernement chinois peut en avoir trop fait en matière d’aides, il ne serait pas surprenant que la Chine doive ouvrir le pas en termes de démantèlement de son programme d’incitation et de changement de sa politique pour revenir à une croissance économique plus indépendante.
La question cruciale consiste à déterminer si l’économie est en mesure de soutenir une reprise autoentretenue et si la croissance économique saura briller une fois les incitations démantelées. Il n’est en rien exagéré d’affirmer qu’un scepticisme important reste de rigueur quant à la capacité de l’économie mondiale à pouvoir s’embarquer pleinement dans une reprise autoentretenue. Cette inquiétude persistante est naturelle après deux ans d’un processus automatique vicieux, mais l’on aurait tendance à oublier que des processus automatiques vertueux sont également possibles. Le resserrement du crédit et la perte de pouvoir d’achat des consommateurs ont réduit l’effet multiplicateur traditionnel des incitations fiscales pendant une grande partie de 2009, mais celui-ci pourrait bien progresser d'ici le début de l’année 2010. Le facteur essentiel de changement à l’avenir sera la capacité des consommateurs à accroître leurs dépenses en 2010. Cela dépendra de l’emploi et des salaires. Si le chômage devait rester faible jusqu’à la fin de l’année, les pertes d’emploi ne seraient plus assez fortes pour l’emporter sur la croissance des salaires. Tant que les salaires vont continuer à augmenter et la semaine de travail à s’étendre, la croissance en revenus cumulés devrait s’accélérer du fait que les pertes d’emploi vont laisser la place à des créations. La croissance nominale des salaires, quoiqu’inférieure à ce qu’elle était, demeure positive.
Un nouveau cycle de taux d’intérêt plus élevés va d’une manière ou d’une autre alimenter une certaine correction pour les actifs risqués en 2010, comme cela s’est déjà produit auparavant. Un scénario moins sombre n’est pas à exclure. Il reposera sur le rythme non inflationniste de la croissance sur la période 2010/2011. Cela devrait impliquer une croissance américaine modérée sur les deux prochaines années, associée à une plus grande robustesse du bloc des marchés émergents, entraîné par ses marchés intérieurs. Pendant ce temps, les bénéfices en tant que part du rendement devraient progressivement grimper pour revenir à leur niveau tendanciel, environ 20 % au dessus de leur niveau actuel. Les responsables des marchés émergents et leur volonté de maintenir la politique fiscale à la vitesse maximale jusqu’à ce que les consommateurs américains dépensent à nouveau seront des facteurs clés à ce stade.
En matière de stratégie de sortie de crise, il va être plus important de penser en termes de gagnants et de perdants. Jusqu’ici, le marché des actions n'a pas eu recours à ce type de structure, mais nous pensons qu’il pourrait le faire prochainement. À mesure que les autorités vont retirer leurs mesures de soutien, l’écart entre les forts et les faibles va s’accroître et il s’agira d’un thème majeur pour 2010.
Les sceptiques ont tendance à affirmer que les actions sont devenues chères suite à leur remontée. Or, elles ne sont pas si chèrement valorisées. Elles sont même tout simplement bon marché dans la mesure où un nouveau cycle d’expansion des bénéfices se profile. Le grand nombre de progressions des multiples depuis la fin 2008 a créé l’illusion d’un renchérissement des actions. Or, la hausse des multiples a été plus marquée que d’habitude à ce stade du cycle d’investissement, en raison de l’effondrement exceptionnel des bénéfices et des attentes en matière de bénéfices au cours des 12 derniers mois. Les bénéfices devraient progresser d’au moins 20 % l’an prochain et, de ce fait, modifier la perception de multiples trop élevés. C’est pourquoi les investisseurs ne devraient pas trop s’inquiéter immédiatement des valorisations, mais accorder davantage d’attention à la surprise positive en termes de reprise économique et de bénéfices. Les résultats à deux chiffres continuent d’avoir raison des investisseurs.
La première phase de la reprise du marché est très similaire à celle connue en 2003 (un retournement de marché suivi d’un marché entraîné par un momentum). La deuxième phase sera-t-elle similaire aux années 1970 : des rebonds de marché très divers requérant une plus grande sélection de titres et moins de compétences directionnelles ? Le marché sous-estime-t-il l’ampleur du contexte idéal ?
Suivi de la stratégie de sortie de crise
Alors que la croissance mondiale semble largement plus assurée, au moins à court terme, les investisseurs n’en demeurent pas moins hyper sensibles à tout semblant de changement de positionnement des banques centrales. Certaines politiques non conventionnelles en place pourront disparaître naturellement, tandis que d’autres devront être délibérément retirées. Des mesures devront notamment être prises pour alléger le marché des réserves bancaires excessives créées pour éviter un effondrement du système bancaire. Les marchés sont prêts à recevoir les annonces radicales et surprenantes des autorités monétaires. C’est ce qui a été nettement exposé la semaine dernière pendant les quelques jours ayant précédé la conférence des ministres des finances du G20 à Londres. Une conférence de presse au ton très conciliant de la BCE a coïncidé avec une interview de M. Trichet mettant l’accent sur la distinction entre la préparation et la mise en œuvre d’une « stratégie de sortie de crise ». L’inquiétude des marchés est néanmoins réelle : comment les hausses de taux d’intérêt vont compléter les mesures beaucoup moins conventionnelles visant à réduire les incitations ?
D'après nous, la « stratégie de sortie de crise » largement anticipée ne sera pas douloureuse et sera probablement mise en œuvre le plus tard possible. À ce stade, les banques centrales sont trop préoccupées par la fragilité de la croissance sous-jacente pour risquer une frappe préventive, notamment compte tenu du niveau historique du chômage sur 26 ans. Elles se considèrent toujours otages des séquelles laissées par la crise financière. Même si la remontée de la production industrielle et des dépenses d’investissement au deuxième semestre va soutenir les revenus réels des consommateurs, ceux-ci préfèrent toujours réduire leur endettement.
Pour beaucoup d’investisseurs, le simple terme de « reprise » suffit à faire croire que les relèvements des taux sont pour demain. Pour le marché, le redémarrage de l’économie implique que la Réserve fédérale américaine procède au resserrement afin d’éviter l’inflation. Nous pensons que la Réserve fédérale souhaite s’assurer du caractère tangible de la consolidation de l’économie avant de relever ses taux. Si l’histoire peut nous servir de référence, lors des deux dernières reprises économiques, la Réserve fédérale a attendu que le taux de chômage converge vers le niveau du taux de chômage hors inflation avant de relever ses taux.
Compte tenu du désendettement massif en cours et de la réponse politique sans précédents, nous pensons que la Réserve fédérale va se montrer très pragmatique dans son resserrement. D’après la Règle de Taylor, les taux d’intérêt devraient même être négatifs (proches de -2 %). Ceci se révélant impossible, la Réserve fédérale a lancé un programme de relâchement massif du crédit et doit procéder au retrait de deux politiques : taux d’intérêt proches de zéro et interventions extraordinaires sur les marchés.
La Réserve fédérale a indiqué qu’elle allait soumettre le resserrement à une approche dite « LIFO » (de l’anglais « dernier arrivé, premier sorti »). Cela veut dire que lorsque les conditions de marché le permettent, la Réserve fédérale souhaite tout d’abord se défaire de tout programme qui menace son indépendance (via par exemple les achats de bons du Trésor) ou fausse l’allocation de crédit (en favorisant par exemple la titrisation).
Les banques centrales sont confrontées à un dur choix d’équilibre et la sagesse conventionnelle part du principe qu’un résultat extrême est la seule option possible. Les responsables politiques vont être tenus d'opter pour une croissance faible et un niveau élevé d’inflation. Une politique de relâchement avec d’importants excédents de liquidité peut déboucher sur une inflation prononcée du prix des actifs dès que les marchés perçoivent une amélioration des perspectives économiques. Si les responsables politiques permettent aux prix des actifs de grimper en raison de la faiblesse d’autres canaux de transmission (notamment le système de crédit), ils risquent de faire gonfler le type de bulle qui a mené à la situation actuelle. S’ils décident de faire reculer les prix des actifs en resserrant leur politique, ils risquent de relever les taux sur fond de reprise faible. Alors que les marchés financiers surestimaient le besoin de régulation et de sanctions il y a six mois, ils sous-estiment désormais le degré d’avidité qui peut être atteint.
Nous rejoignons l’idée selon laquelle une erreur politique est nécessaire pour qu’une récession en double creux se produise. L’histoire nous en donne des exemples intéressants. À la mi-1936, la Réserve fédérale a relevé les exigences de réserves bancaires pour tenter d’absorber les liquidités et éviter que la spéculation ne s’empare à nouveau de Wall Street. Cependant, la fragilité et le besoin en capitaux du système bancaire demeuraient tels à ce moment-là que celui-ci pouvait difficilement résister à une telle mesure. De ce fait, la croissance de la masse monétaire au sens large et celle de la masse monétaire au sens étroit ont chuté, laissant derrière elles des niveaux normaux pour renouer avec les chiffres négatifs. Bien sûr, même si la rechute économique des années 1930 est un cas extrême, elle n’en souligne pas moins les risques d’une stratégie de sortie de crise déployée de façon prématurée par les autorités, c’est-à-dire avant que le système bancaire et l’économie ne soient prêts.
Actuellement, les multiplicateurs monétaires des États-Unis et du Royaume-Uni demeurent affaiblis et les banques centrales sont bien conscientes de l’histoire et des canaux de transmission de la politique monétaire actuellement rompus. Elles n’oseront pas reproduire une erreur sans précédents.
La seule question qui vaille est la suivante : une pleine reprise sera-t-elle le fait du cycle de l’emploi ?
Une nouvelle reprise sans emploi ?
La montée du chômage et les faibles perspectives d’emploi deviennent l’obsession des investisseurs. D’une part, ceux-ci souhaiteraient assister à une reprise du marché de l’emploi donnant de l’élan au revenu nominal, aux ventes de détail et aux résultats des entreprises. D’autre part, des coûts de main d’œuvre bas sont un point positif pour les bénéfices des entreprises.
Une reprise sans emploi pourrait aussi être envisagée. Étant donné que bien des gens perçoivent la crise actuelle comme un tournant entre un vieux et un nouveau monde, il est difficile d'affirmer quelle est la norme. Cela ne serait pas la première fois que nous sommes confrontés à une reprise sans emploi. Le marché du travail a, en effet, connu une reprise très lente après les deux dernières récessions (au début des années 1990 et 2000).
À quoi faut-il s’attendre cette fois ?
Il existe deux facteurs contradictoires. D’une part, les réductions d’emploi ont été massives et les entreprises ont probablement procédé à des ajustements excessifs de leurs effectifs et seront amenées à réembaucher. D’autre part, les secteurs ayant le plus licencié (fabrication de biens durables, construction et ventes de détail) nécessitent par nature une main d’œuvre importante et, à ce titre, devraient demeurer « en réanimation » pendant quelques temps.
Une approche autrichienne de la crise
La crise financière a fait naître en chacun de nous un penchant keynésien (dépensez et vous vous sentirez mieux), ce qui nous ferait presque oublier qu’une autre vision est possible. L’école autrichienne de pensée, très populaire autrefois, est désormais réputée démodée et inappropriée. Les mots sont durs.
Il s’agit d’un débat philosophique, mais les cycles des bénéfices entraînent parfois les cycles de l’emploi. C’est pourquoi, il est important de surveiller les dépenses d’investissement et la rentabilité.
Près de la moitié des entreprises de l’indice S&P500 ont accru leurs dépenses d’équipements globales au deuxième trimestre par rapport au trimestre précédent. Pendant ce temps, celles qui continuent à réduire leurs dépenses les réduisent dans une moindre mesure. Les dépenses d’investissement vont être un déterminant majeur de la croissance dans les prochaines années notamment à une période caractérisée par une consommation aussi faible.
Beaucoup ont tendance à oublier le revers de la crise économique et du crédit : la puissante destruction créatrice de toute crise. Le cycle économique est soumis à des forces qui le poussent dans les deux directions. Les récessions facilitent le « nettoyage », essentiel à une reprise viable, et cette phase de nettoyage, avec tous les excès qu’elle comporte, est en cours.
L’on assiste à un lent ajustement des stocks, notamment dans l’immobilier, de telle sorte que le processus d’épuration n’est pas achevé (en particulier dans la construction commerciale), ce qui implique que des risques baissiers non négligeables pèsent toujours sur la croissance. De la même manière cependant, plus les ajouts de stocks et d’offre de capacité sont faibles maintenant, plus l’expansion à venir sera durable, étant donné que les stocks deviennent maigres et que le facteur d’accélération renforce le momentum à la hausse.
Le remède à des investissements excessifs serait la sortie de capitaux de secteurs surcapitalisés et le redéploiement de ces capitaux vers de nouveaux produits et de nouveaux secteurs pouvant les utiliser plus efficacement. Même si ce processus est de longue durée, il a bel et bien été amorcé, si l’on en juge par le taux de croissance de la capacite industrielle. La capacité du secteur manufacturier, hors industries de la haute technologie, des véhicules à moteur et des pièces détachées, s’est contractée de 0,7 % aux États-Unis l’an dernier, un rythme comparable à celui de la période ayant suivi l’éclatement de la bulle technologique. Et la capacité dans un autre groupe d’industries comprenant les métaux neufs, les équipements électriques, le papier, le textile, l’imprimerie, le caoutchouc, le plastique et les boissons et tabac a reculé de 2 % l’an dernier.
Une fois de plus lorsqu’il s’agit de reprise durable, les gains de productivité semblent être la condition sine qua non et jusqu’ici, personne ne le conteste. La séquence d’évènements obéit à un schéma normal.
Le secteur bancaire sur fond de DDR.
Chaque phase de marché tend à créer son propre schéma. Entre 2003 et 2007, il s’agissait de la « grande modération » (croissance élevée associée à une inflation et des taux d’intérêt faibles). Le concept à la mode s’exprime désormais en ces termes : DDR pour Désendettement, Déglobalisation, Re-régulation. Le secteur bancaire est le secteur le plus concerné par ce nouveau schéma. Un nouveau cadre de régulation était le fondement des discussions du récent sommet du G20, avec un objectif clair : redonner de l’aplomb au système financier avec une certaine stabilité.
Une supervision macro-prudentielle est désormais de mise.
Le débat était axé entre autres sur la possibilité d’introduire un plafond d’endettement devant forcer les banques à lever de nouveaux capitaux et impliquant une dilution de la rentabilité des fonds propres. Mais jusqu’à présent, une exigence de capitaux supérieure est dans une certaine mesure compensée par le financement bon marché (ou « subventionné ») fourni par les banques centrales.
Cela marque également la fin de l’arbitrage régulatoire entre l’Europe et les États-Unis, avec toutefois probablement un effet contre-productif comme revers de la médaille. Depuis des mois, les responsables politiques travaillent à la relance du marché de la titrisation en tant que système bancaire « parallèle ». Et la dernière série de changements en matière de régulation peut rendre la tâche encore plus ardue. Des programmes visant à imposer un ratio d’endettement brut sur les banques peuvent réduire la demande de tranches AAA de titrisation. Un plafond mondial d’endettement éliminerait en fait le principal attrait des produits titrisés. Les banques américaines ont fait, depuis le début, l’objet d’un ratio d’endettement, ce qui en faisait des émettrices de produits titrisés en vue de décharger des actifs, tout en étant des détentrices contraintes des actifs notés AAA qui épuisaient les bilans pour ne dégager qu’un faible rendement. Les banques européennes, pour leur part, n’ont été soumises à aucune contrainte d’endettement brut importante, mais étaient réglementées conformément aux règles de Bâle II, ce qui les a encouragées à se charger d’actifs notés AAA du fait qu’ils étaient associés à un facteur de pondération du risque extrêmement peu élevé.