par George Latham, Responsable Gestion ISR chez Henderson Global Investors
« Tous les microfinancements n’engendrent pas des contributions sociales positives. La responsabilité sociale du processus d’emprunt et la diversification sont primordiales pour la réduction du risque financier et l’obtention de résultats financiers durables. »
Début juillet, nous avons reçu, dans les délais, la confirmation du remboursement intégral du produit de titrisation en microfinance DWM (XXEB) 7.117 11. Il s’agit d’un investissement obligataire dans le fonds de microfinance DWM (Developing World Markets) que nous avons réalisé pour le compte d’un de nos fonds ISR il y a cinq ans.
Nous avons été l’un des premiers à investir sur ce type de véhicule d’investissement
Ce ne fut pas un long fleuve tranquille mais le résultat final est un succès. Nous avons récupéré notre capital initial ainsi qu’une substantielle plus-value tout en ayant eu un impact social positif et un apprentissage intéressant pendant toute la durée de l’investissement.
Quand nous nous sommes intéressés au marché de la microfinance, il était encore très immature. Cet investissement était le second dans un titre de microfinance, après un premier investissement qui avait capitalisé sur l’investissement substantiel d’un organisme quasi gouvernemental américain afin d’atteindre une taille critique et ainsi attirer de nouveaux investisseurs. Je ne pense pas que beaucoup d’autres fonds, semblables au nôtre, auraient investi sur un instrument n’ayant pas encore fait ses preuves et ayant une faible liquidité.
Pour toutes ces raisons, nous avons maintenu un niveau d’investissement faible, un million de dollars américain, mais suffisant pour avoir un impact. Le fonds a utilisé les capitaux levés pour prêter à plus de 20 institutions de microfinance à travers le monde et dans des pays aussi divers que le Pérou, la Bosnie ou l’Indonésie. À leur tour, ces institutions devaient prêter de petits montants (des centaines et non des milliers de dollars) à des particuliers comme capital pour le démarrage de leurs petites entreprises. Parmi ceux-ci, on peut mentionner notamment un musicien en Mongolie qui a créé une entreprise produisant des dobros, des instruments semblabes au Banjo, qui sont ensuite vendus sur le marché local ou encore un enseignant en Azerbaïdjan qui réalise des tapisseries de soie afin de générer un revenu complémentaire.
Au cours des deux dernières années, le secteur de la microfinance a souffert
Les allégations de mauvaises pratiques ont engendré des problèmes politiques et d’image. L’Inde a tout particulièrement été au centre des critiques et certaines institutions de microfinance (IMF) ont été accusées d’utiliser des stratégies de recouvrement excessives ayant potentiellement poussé au suicide certains emprunteurs dans l’incapacité de payer. Une partie du rôle d’un gestionnaire de fonds tel que DWM est d’analyser minutieusement les politiques de prêts et les pratiques des IMF emprunteuses. Ceci permet de nous rassurer d’un point de vue éthique mais aussi d’un point de vue commercial compte tenu de l’impact négatif sur l’industrie de ce genre d’allégation.
Par contre, les pressions politiques sont moins prévisibles. Après un épisode trouble de la vie politique en Equateur et en Bolivie il y’a un peu plus de 5 ans, le fonds a été spécialement conçu afin d’exclure toute exposition à ces deux pays (d’où le nom de XXEB – ex Equateur et Bolivie). Dans les faits, ces pays ont probablement été des paradis de relative stabilité au cours des cinq dernières années, surtout lorsqu’on fait la comparaison avec le Nicaragua, pays dans lequel le président a été leader d’un mouvement populiste de boycott du remboursement des prêts de l’industrie de la microfinance et où des problèmes de corruption ont été découverts.
Au sein de la structure du CLO (Collateralised Loan Obligation), notre investissement était situé dans la tranche dite de mezzanine, ce qui signifie que dans l’éventualité d’une insuffisance de flux de trésorerie, les détenteurs de la tranche junior ou equity, qui sont classés en dessous de nous dans la structure du capital, seraient alors en risque. Au final, les problèmes au Nicaragua ont affecté les investisseurs des tranches du dessous.
Notre investissement n’en a pas souffert, même si on a été tout près du pire
Qu’avons-nous appris? Premièrement, tous les microfinancements n’engendrent pas des contributions sociales positives. Une méthodologie de recherche robuste est essentielle afin de garantir les avantages sociaux. Deuxièmement, la responsabilité sociale du processus d’emprunt est primordiale pour la réduction du risque financier ainsi que l’obtention de résultats financiers durables. Troisièmement, la diversification est essentielle, et s’appuie beaucoup sur le climat politique (qui peut changer de façon spectaculaire avec chaque cycle électoral).
En définitive, nous avons vu cette industrie et son financement évoluer au cours des cinq dernières années. Les options d’investissement dans ce secteur sont maintenant beaucoup plus larges et de plus en plus accessibles à un éventail d’investisseurs spécialisés ainsi qu’aux investisseurs traditionnels.