par Christophe Donay, Responsable de l’allocation d’actifs et de la recherche macroéconomique Pictet Wealth Management
Les marchés actions ont connu leur pire début d’année depuis 1897: après les périodes de volatilité élevée de 2015, les marchés des changes ont eux aussi subi des perturbations majeures. Mais la nervosité des marchés en 2016 ne constitue pas une surprise et les fondamentaux économiques restent stables. Et les conditions d’un rebond semblent désormais réunies.
D’où vient cette agitation ?
Quatre facteurs contribuent à la volatilité actuelle du marché:
- La politique monétaire s’essouffle. La Réserve fédérale (Fed) ne dispose pas d’un modèle post-assouplissement quantitatif clair, ce qui génère des incertitudes, alors que les programmes d’assouplissement quantitatif des autres banques centrales sont trop faibles pour soutenir les marchés financiers. La capacité des banques centrales à limiter la volatilité de ces derniers a ainsi diminué. Les marchés ne sont pas encore prêts à absorber le cycle de resserrement de la Fed.
- Les prix des matières premières fléchissent. Même s’ils soutiennent la consommation, les bas prix du pétrole sont tombés au-dessous du niveau (probablement autour de USD 40 le baril) où les éléments négatifs en termes de perturbation financière commencent à prendre le pas sur les éléments positifs. Les monnaies des marchés émergents se sont effondrées, notamment dans les pays producteurs de matières premières, créant un risque de crise financière (en particulier au Brésil). Les difficultés des compagnies pétrolières ont par ailleurs fortement contribué à l’augmentation des spreads des obligations à haut rendement américains.
- Les inquiétudes concernant la Chine. Le gouvernement peut orienter la croissance économique vers les niveaux visés, mais sa gestion des marchés financiers a été décevante. La transition vers une plus grande libéralisation des marchés actions et des changes a été quelque peu chaotique. Les actions se sont effondrées et le yuan a fait l’objet de fortes pressions.
- La hausse du dollar US, qui met le secteur manufacturier américain et les emprunteurs en USD des marchés émergents sous pression.
Les fondamentaux restent stables
Les fondamentaux économiques sont néanmoins restés stables. Les Etats-Unis sont en bonne voie pour atteindre une croissance du PIB réel de 2,2% cette année (les inquiétudes concernant une récession semblant exagérées), et la zone euro pour enregistrer une croissance de 1,8%. Nos prévisions de croissance du PIB réel de 6,7% en Chine demeurent également inchangées. L’agitation récente des marchés a pour effet d’accroître le risque de scénario défavorable pour les marchés mondiaux (krach).
Nous devrions alors sous-pondérer les actions afin d’adopter un positionnement plus défensif. Le fait que les fondamentaux soient restés stables suggère cependant que l’agitation actuelle observée sur les marchés mondiaux correspond à notre scénario central, selon lequel la solidité des fondamentaux économiques continue de soutenir les actions des pays développés en 2016. Nous pourrions alors revenir à une surpondération des actions pour bénéficier d’un rebond.
Les conditions d’un rebond sont réunies
Ce scénario pourrait être proche. Hors crise financière, les périodes moyennes de correction des marchés actions sont d’environ 50 jours, et si l’on considère que la correction qui a commencé en décembre est le point de départ du contexte actuel de volatilité, la durée de cette dernière est maintenant proche de la moyenne. Comme rien ne suggère une crise financière, l’ampleur et la durée de la correction semblent indiquer que nous nous dirigeons vers un plancher et qu’un rebond pourrait s’amorcer.
A court terme, la BCE, qui a laissé entendre vendredi que de nouvelles mesures d’assouplissement seraient vraisemblablement mises en œuvre dès le mois de mars, devrait constituer le catalyseur que les investisseurs attendaient. Mais la Fed détient la clé de tout rebond durable. Tout signe laissant penser que la banque centrale américaine ralentira le rythme de relèvement des taux (voire qu’elle y renoncera) entravera la progression du dollar, ce qui se traduira par une stabilisation des cours des matières premières et une détente sur le marché obligataire à haut rendement et mettra un terme aux abaissements soutenus des résultats des entreprises.