par Klaus Blaabjerg, responsable de l'équipe de gestion obligataire Value chez Sparinvest
Lorsque les banques centrales font marcher la planche à billets et achètent des actifs « sans risque », quel est l’effet sur le marché des obligations d’entreprises ? Nous voyons tous que les véhicules d’épargne sans risque versent actuellement des taux d’intérêt faibles, voire négatifs.
Cette situation rend les investisseurs impatients et les force à prendre plus de risque. Les retombées sont bonnes, pour les obligations d’entreprises en premier lieu et pour les actions en deuxième lieu. Ces actifs bénéficient d’une demande accrue et leurs cours grimpent, des phénomènes qui contribuent à rétablir la confiance une fois qu’ils se reflètent sur la performance du marché boursier. Il semble qu’il s’agit là de l’objectif visé par la stratégie « QE3 » de la Réserve fédérale.
Les obligations d’entreprises se sont déjà très bien comportées cette année, mais elles restent intéressantes à nos yeux du point de vue du rapport risque/rendement : avec elles, les investisseurs bénéficient toujours de taux de rendement supérieurs à ceux que justifie le risque sous-jacent de l’investissement. Cependant à mesure que le risque diminue (tendance observée dernièrement), il est logique d’anticiper un recul des rendements sa conséquence pour nous.
Heureusement, nous identifions toujours des poches Value au sein de notre univers. Ces dernières années, la plupart des gens se sont exposés aux obligations d’entreprises par l’intermédiaire d’« exchange-traded funds » (ETF). Ces instruments visent à copier l’indice d’obligations d’entreprises en achetant exactement les mêmes obligations que celles qui le composent et exactement dans les mêmes proportions.
Autrement dit, si une société a émis un grand nombre d’obligations, sa pondération indicielle sera supérieure et les ETF chercheront donc à obtenir une exposition tout aussi élevée à cette société en achetant plus de ses obligations que de celles d’autres émetteurs. Ce phénomène a pour effet de doper les cours obligataires des sociétés les plus endettées de l’univers.
Or un endettement excessif est précisément ce qu’en tant que gérant Value, Sparinvest cherche à fuir. L’effet ETF nous est favorable car il crée des opportunités d’investissement dans des sociétés émettrices d’obligations qui ne font pas partie de l’indice (les petites sociétés) ou qui n’y occupent qu’une place minime car elles n’ont pas émis beaucoup de dette. A l’heure actuelle, nous identifions toujours des scénarios Value solides parmi les financières, les assureurs européens et les titres de l’énergie. Nous trouvons des obligations à haut rendement chez certaines sociétés qui ne sont pas incluses dans l’indice.
Quant à savoir si les perspectives sont meilleures pour les investisseurs en obligations d’entreprises sur les marchés émergents ou développés, le débat n’est pas clos. Chaque univers s’accompagne d’un type de risque différent, aussi, « sage est l’investisseur qui opte pour la diversification ». Sur les marchés émergents, le potentiel de croissance économique et la marge de manoeuvre dont disposent les gouvernements pour trouver des moyens de financer l’expansion économique sont bien supérieurs.
Mais le risque sur ces marchés est lié à un endettement trop élevé des sociétés (la taille de la dette d’entreprises des marchés émergents est désormais quasiment identique à celle des Etats-Unis). C’est à cause de cette explosion de la dette que nous évitons les banques des marchés émergents : pour nous, leurs taux d’emprunt progressent trop rapidement. Nous n’aimons donc pas les financières mais apprécions les secteurs cycliques sur les marchés émergents, tandis que l’inverse est vrai pour les marchés développés.