Réchauffement climatique

par Christophe Morel, Chef Economiste chez Groupama AM

Aux Etats-Unis, l’élastique conjoncturel est sans doute moins impulsif qu’il ne l’était en fin d’année dernière notamment parce qu’après une très forte reconstitution des stocks, une pause est nécessaire le temps de les écouler. Cependant, il semble désormais incontestable que l’effet des intempéries s’estompe. En effet, les plus récentes enquêtes de conjoncture sont très encourageantes dans les secteurs cycliques tels que les transports, l’automobile et la construction.

Mais au-delà, plusieurs indicateurs suggèrent que la croissance de l’économie américaine est désormais robuste :

• D’abord, les dernières statistiques sur le front de l’emploi sont quasi- unanimement toutes positives : le momentum de créations d’emploi s’améliore puisqu’il s’approche de +200K sur 3 mois ; le taux de participation remonte ; si l’on corrige justement de cette remontée du taux de participation, le taux de chômage diminue en réalité de 0,5% sur les trois derniers mois ; la tendance à la baisse des chômeurs de longue durée se confirme ; les heures travaillées remontent ; et enfin, l’emploi intérimaire continue de progresser.

• Ensuite, plusieurs indicateurs signalent une perspective de redémarrage de l’investissement. Ainsi, les crédits industriels et commerciaux ré-accélèrent et notre indicateur avancé composite des perspectives d’investissement suggère un redémarrage de l’investissement dans les tout prochains mois. 
Ainsi, sauf choc exogène marqué, la dynamique conjoncturelle de l’économie américaine semble désormais auto-entretenue. 
Zone euro : le sentiment économique s’améliore mais il manque d’impulsion … notamment en raison du poids du passé 
Le sentiment économique poursuit son amélioration notamment dans l’industrie. En outre, les écarts conjoncturels se réduisent entre les pays (la France, l’Italie et l’Espagne auraient des rythmes de croissance similaires) donnant plus de crédit à un rebond cyclique robuste. Toutefois, cette amélioration de l’environnement économique n’est convaincante ni sur le plan conjoncturel, ni sur le plan conjecturel. 
Sur la plan conjoncturel, la dynamique des indicateurs avancés dans le secteur industriel perd de l’impulsion, reste en grande partie liée au secteur automobile et ne s’améliore que modestement dans les services. Dans la construction, le climat des affaires reste très déprimé et devrait le rester jusqu’à 2015 eu égard à la durée des cycles dans ce secteur (qu’ils soient haussiers ou baissiers).

Sur le plan conjecturel, l’heure reste à l’ajustement des bilans à la fois dans les secteurs privé et public. Dans l’ensemble, les entreprises restent endettées si bien qu’elles cherchent à maintenir la rentabilité au lieu d’investir, et sont frileuses à recruter sauf pour des emplois précaires. Du côté du secteur public, au regard des ratios d’endettement, il est difficile d’imaginer une baisse significative de la pression fiscale si bien que les ménages devraient plutôt reconstituer leur épargne au lieu de consommer.

Au total, la Zone euro bénéficie de l’amélioration de l’environnement international, mais la reprise ne devrait pas être « normale » dans le sens où les moteurs domestiques (consommation, investissement, construction) ne prendront pas le relais des exportations.

Chine : un creux conjoncturel lié au rééquilibrage de l’économie et à la mise en place d’un nouveau modèle de croissance reposant sur l’urbanisation S’il est incontestable que l’économie chinoise ralentit, plusieurs éléments ne nous conduisent pas à être inquiets outre mesure :

• Aucun indicateur ne signale une « rupture » dans la croissance ;

• Les craintes sur la croissance chinoise sont surtout le fait d’un ajustement des anticipations du Consensus des économistes qui était probablement trop 
complaisant en début d’année ;

• Le ralentissement concerne l’investissement dans les secteurs manufacturiers en 
surcapacité (métaux, ciment, verre, panneaux solaires, bateaux), ce qui est parfaitement cohérent avec le rééquilibrage nécessaire de la croissance chinoise et avec les réformes annoncées lors du Congrès de novembre dernier ;

• Enfin, la Chine bascule d’un modèle de croissance reposant sur les exportations à un modèle lié à l’urbanisation. Et ce changement de modèle exige forcément une longue période de transition qui donne l’impression d’un essoufflement. 
Ainsi, le rééquilibrage positif de l’économie chinoise est en cours accompagné en cela par une banque centrale qui contraint le crédit dans les secteurs en surcapacité de production. Les profits des entreprises montrent la transition des secteurs reposant sur l’investissement vers ceux liés à la consommation.