par Emmanuel Auboyneau, Gérant associé chez Amplegest
Les dernières statistiques économiques publiées en Europe et aux Etats-Unis confirment l’ampleur du choc. En revanche, la Chine entame son redressement graduel tiré par l’industrie.
Alors que l’on commence tout juste à parler de déconfinement dans les principales économies occidentales, les dégâts sur l’activité sont déjà considérables si l’on en juge par les chiffres du premier trimestre. Aux Etats-Unis le produit intérieur brut (PIB) du premier trimestre a été publié à -4,8%, en France à -5,8% (-3,8% pour la zone euro). Ces chiffres ne comprennent que la partie du mois de mars où les pays ont été confinés, ce qui laisse augurer d’une accélération de la dégradation au second trimestre. Aux Etats-Unis la croissance depuis le début du confinement serait d’ailleurs proche de -12% en rythme annuel. Le choc est d’une ampleur inégalée depuis la fin de la seconde guerre mondiale.
On peut toutefois espérer qu’il sera limité dans le temps compte tenu des mesures prises par les gouvernements et les Banques Centrales et par les ajustements rapides effectués par les entreprises. Ainsi, les nouvelles demandes d’allocation chômage aux Etats-Unis ont explosé à 17 millions pour les trois dernières semaines, chiffre sans précédent. La montée du chômage est proportionnellement dix fois plus rapide que lors de l’émergence de la crise de 2008. Dès lors, on peut espérer que l’ajustement, contenant d’ailleurs une partie de chômage technique, sera de courte durée, là où en 2008-2009 il a été beaucoup plus lissé dans le temps. L’exemple chinois est également vecteur d’espoir. L’activité a rebondi depuis le mois de mars avec notamment une reprise en V dans l’industrie. Très logiquement les services mettront plus de temps à repartir (tourisme, loisirs, restauration…)
Les autorités politiques et monétaires ont donc pris la mesure de la crise et sont rapidement intervenues. Nous assistons à une course contre la montre entre les effets récessifs de la pandémie et les réponses données pour en limiter les effets dans le temps. Le juge de paix restera évidemment la durée du virus, ce qui laisse une inconnue majeure à l’équation. L’organisation et le coût du déconfinement seront également des éléments importants.
Les marchés financiers peuvent paraître complaisants
Tout est fait pour que les économies puissent repartir lorsque le virus aura disparu ou qu’on saura le traiter. C’est une bonne nouvelle et c’est la grande différence avec certaines crises précédentes (1929, 2008) où les réponses avaient été tardives et dispersées. Nous avons devant nous plusieurs années où les taux resteront proches de zéro et où les critères de solvabilité des Etats seront regardés avec plus de complaisance. La baisse du prix des matières premières est un autre facteur favorable pour une reprise de la consommation. La croissance doit repartir, quel qu’en soit le prix. Il sera toujours temps par la suite de faire les comptes et d’en tirer les conclusions.
Face à ces évènements les marchés financiers peuvent paraître complaisants. Les indices actions ont repris environ la moitié de ce qu’ils avaient perdu en mars, en dépit de l’aggravation de la situation économique. Ils parient à l’évidence sur une reprise de l’activité mondiale au second semestre et sur l’appui sans limite des Banques Centrales. Les actions bénéficient également de l’absence de rendement de tous les placements obligataires et monétaires. Le cash reste abondant et recherche la rentabilité, en acceptant le risque. Cette reprise des marchés ne nous met pas à l’abri de nouveaux épisodes de forte volatilité au gré des nouvelles sur le virus et/ou des statistiques économiques. Cela nous incite à garder un biais plutôt prudent dans nos allocations en privilégiant des secteurs à forte visibilité qui sont davantage épargnés par la crise, comme par exemple les grandes valeurs technologiques.