par Frédérique Cerisier, économiste chez BNP Paribas
• La publication des comptes nationaux a confirmé que la croissance s’était affaiblie dans la seconde moitié de 2015.
• Le premier bilan du commerce extérieur européen pour 2015 met en évidence l’affaiblissement de la demande des pays émergents.
• Nous tablons désormais sur une croissance de 1,3% cette année.
La publication de la première estimation du PIB de la zone euro a montré que l’activité avait progressé de 0,3% t/t au T4 2015, comme au T3. Ainsi, la croissance s’est donc clairement établie, tout au long du second semestre, un ton en-dessous du rythme observé dans la première partie de l’année (+0,5% t/t au T1 et +0,4% t/t au T2), signe que le freinage brutal de l’activité dans les économies émergentes prend bien sa dîme sur la croissance européenne. Les détails nationaux dont nous disposons confirment ce mouvement. Très dynamiques au premier semestre, les exportations françaises ont ainsi quasiment stagné en volume dans la seconde moitié de 2015. Pire, elles auraient pour leur part diminué en Allemagne au quatrième trimestre d’après l’office fédéral des statistiques.
Le premier bilan diffusé cette semaine par Eurostat sur l’évolution du commerce extérieur européen en 2015, ne dépeint pas un tableau différent. Ces données sont relatives à la valeur des échanges, et donc également affectées par les importants mouvements de taux de change enregistrés l’an dernier. Il reste que les expéditions de l’ensemble des pays de l’UE à destination des Etats-Unis étaient en hausse de 19% en 2015 par rapport à 2014, contre 4% à destination de la Chine, et des baisses de 6% vers le Brésil et de 28% vers la Russie. En conséquence, les exportations allemandes ont augmenté plus vite l’an dernier vers l’Union européenne à 28 (+7%) que vers les économies hors UE. De même pour l’Espagne, qui commerce beaucoup avec l’Amérique latine, et dont les exportations vers l’UE ont augmenté de 6% et de seulement 1% hors union européenne. Le poids de ces évolutions a été particulièrement concentré sur la seconde moitié de l’année avec, pour l’ensemble de la zone euro, une croissance des exportations extra-zone, passée de 8,2% en juin 2015, à 3,2% en décembre (en glissement annuel lissé sur 3 mois).
Des perspectives de croissance fragiles
Au final, le PIB de la zone euro aura progressé de 1,5% l’an dernier. L’éventail des performances par pays (graphique 2) est à première vue déconcertant, avec les trois plus grandes économies de la zone (Allemagne, 1,4%, France, 1,1% et Italie, 0,6%) affichant des performances, parfois proches, mais en tout cas inférieures à la moyenne de la zone euro. Parmi les grands pays, l’Espagne, 3,2% et, dans une moindre mesure, les Pays-Bas, 2,0%, sortent du lot. Enfin, l’Irlande, toujours en plein processus de rattrapage après la crise (voir focus page suivante), garde, pour la seconde année consécutive, la palme de l’économie la plus dynamique de l’union monétaire.
Les évolutions récentes laissent craindre une poursuite de ces tendances en 2016. Tout comme l’OCDE, nous révisons nos perspectives de croissance et attendons désormais, pour la zone euro, une croissance de l’ordre de 1,3% cette année (contre 1,6% lors des prévisions du mois de décembre). Nous reviendrons dans les prochaines semaines sur ces perspectives et le détail par pays, mais d’ores et déjà, il apparaît que les économies de la zone continueront de ressentir les conséquences des difficultés auxquelles sont confrontées de grandes économies émergentes, notamment à travers un manque de dynamisme des échanges.