Vers une issue de la crise dans la zone euro ?

par Marie-Pierre Ripert, économiste chez Natixis

Contre toute attente, un accord a été trouvé le 11 mars entre gouvernements européens pour essayer d’enrayer la crise à laquelle la zone euro est confrontée depuis déjà plus d’un an. Cet accord a constitué une bonne surprise alors que les discussions laissaient présager peu d’avancées, même si pour le moment nous n’avons que peu de détails.

Les principaux points de cet accord concernent d’une part l’augmentation de la capacité effective de financement du FESF (Fonds Européen de Stabilité Financière) (à 440Mds€) et de son successeur le Mécanisme de Stabilité Européen (à 500Md€) à partir de 2013 et d’autre part la possibilité pour ces fonds d’acheter des titres d’Etat sur le marché primaire. En revanche, ils ne pourront pas intervenir sur le marché secondaire et l’achat de titres sera conditionnel à des engagements des pays concernés.

Outre ces décisions sur l’ FESF, les conditions d’aide à la Grèce ont été sensiblement améliorées avec une baisse de 1pt du taux d’intérêt payé sur les prêts qui lui ont été consentis et un allongement de la maturité de 4 ans à 7,5 ans (pour le prêt). En revanche, aucune renégociation n’a pu aboutir avec l’Irlande qui n’a pas accepté les conditions posées par l’Europe pour abaisser le taux prêteur, en particulier l’augmentation du taux d’imposition sur les sociétés (12,5%).

Par ailleurs, les Etats européens ont trouvé un accord de principe sur le « le Pacte pour l’euro » qui vise à renforcer la compétitivité et la convergence au sein de la zone euro. Les principales mesures portent sur les points suivants : une évolution des couts salariaux compatible avec celle de la productivité, des réformes sur les marchés du travail, la viabilité des finances publiques (régimes de retraite, de santé) et la stabilité financière (surveillance des niveaux d’endettement de tous les agents).

Concernant les finances publiques, les Etats devront également réduire de 5% par an leur dette publique lorsque celle-ci dépasse les 60% du critère de Maastricht. Cette dernière mesure semble difficilement applicable dans certains pays où cette contrainte représenterait un effort trop important (l’Italie par exemple). Enfin, les sanctions semi-automatiques (il faudrait une majorité qualifiée qui soit contre pour que la sanction ne soit pas mise en place) constitueraient une avancée si elles étaient finalement mises en place. Toutes ces mesures restent pour le moment assez vagues et il faudra attendre le Sommet du 24-25 mars pour avoir une décision finale et davantage de détails.

Ainsi l’accord du 11 mars se révèle une avancée significative puisqu’il renforce les possibilités d’action de l’FESF et elles donnent plus de lisibilité sur l’après-2013. Par ailleurs, elles redonnent un second souffle à la Grèce en évitant une restructuration à court-terme. L’impact de ces décisions sur les marchés a été peu lisible car parallèlement la catastrophe japonaise entrainait un mouvement de flight to quality en début de semaine.

Pour autant, si l’accord trouvé constitue un point positif, il est loin de régler tous les problèmes de la crise actuelle. Tout d’abord, en ne permettant pas au FESF d’acheter des titres de dette sur le marché secondaire, la responsabilité de gérer les attaques sur les dettes périphériques continue de peser sur la BCE, même si cette dernière n’a pas augmenté les achats ces trois dernières semaines malgré la hausse des spreads (SMP de 77,7Md€). Cette dernière a déjà à de nombreuses reprises suggérer que le FESF puisse prendre le relais. Les mesures prises permettent de continuer à gérer les problèmes de liquidité rencontrés par les pays, mais il ne règle pas fondamentalement le problème crucial d’insolvabilité de certains états européens. Il faut toutefois souligner que la réduction de 100pb du taux d’emprunt en faveur de la Grèce améliore sa solvabilité.

Par ailleurs, en permettant au FESF d’acheter des titres sur le primaire à un taux plus faible que le taux de marché, cela permet à la Grèce de racheter sa propre dette sur le marché (à un prix plus faible que le pair ce qui correspond peu ou prou à une restructuration déguisée). Encore faut-il que des investisseurs acceptent de vendre leurs titres avec une perte…

Au total, il reste encore de nombreux obstacles et le chemin semble encore long avant d’aboutir à une résolution de la crise européenne. Il faudra attendre la fin du semestre européen en juin pour avoir une idée plus précise des réelles avancées. Dans ce contexte, les soubresauts sur les taux des dettes périphériques risquent de perdurer.

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