par François-Marie Wojcik, président de Métropole Gestion
Mettre en évidence les moteurs des mouvements boursiers est un exercice compliqué. On peut observer que sur très longue période, progrès économique et progrès boursier vont de pair. Ainsi, depuis la Deuxième Guerre Mondiale jusqu’aux années 2000, le PIB américain, la croissance des bénéfices des sociétés américaines et le capital boursier ont progressé respectivement de 7,0 %, 7,7 % et 7,0 % en moyenne annuelle. A l’inverse, sur très courte période (de quelques semaines à quelques mois), des éléments exogènes irrationnels expliquent souvent les mouvements erratiques de la Bourse qui n’aime pas l’incertitude (révolution en Lybie, tsunami au Japon, etc.).
A l’horizon moyen terme, habituel pour les gérants de portefeuille par exemple, les notions de valorisation et les changements de tendance apparaissent comme des éléments moteurs. Le gérant value s’appuie avant tout sur des données de l’économie réelle afin d’estimer la valorisation industrielle d’une entreprise ou les renversements de tendances économiques de marché.
L’allocation d’actifs est, par essence, un exercice délicat. La vision longue est parfois polluée par les problèmes de court terme. Pour éclairer cet exercice, essayons de mettre en évidence les tendances historiques sur des périodes de 10 ans. Quelques éléments statistiques tout d’abord. Si l’on se réfère au marché boursier américain pour lequel nous avons des séries longues et homogènes, on observe que chaque période de 10 ans suivant un « bear market » a connu un rendement réel annuel positif, sans exception.
Depuis 1871, les trois périodes de 10 ans qui ont connu les pires retours sur investissement ont pris fin respectivement en 1920, 1974 et 1978. Après chacune de ces périodes, le rendement réel annuel a été respectivement de + 8%, +13% et +9 % au cours des 10 années qui ont suivi. Plus généralement, les 13 périodes de 10 ans qui ont suivi les 13 périodes à performance négative sur les actions ont connu une rentabilité moyenne annuelle de 10 %, soit 50 % de plus que la moyenne séculaire (6,66 %) et le double des obligations d’Etat.
Quels sont alors les facteurs explicatifs les plus pertinents pour la performance boursière de long terme ?
Il ne semble pas y avoir de corrélation évidente entre la croissance économique et le caractère haussier ou baissier d’un marché (cf. graphe ci-dessous). Par décade, le constat est le même : les années 50, par exemple, ont connu une rentabilité annuelle moyenne des actions de 13 % contre 1,7 % pour les années 60 alors que la croissance économique était équivalente sur les deux périodes (+ 6,6 %, + 6,9 % respectivement).
Sur longue période, il n’y a pas de lien évident non plus entre la rentabilité d’un placement actions et l’évolution globale des bénéfices par action. Chaque décade depuis les années 50 montre une croissance du bénéfice par action annualisée pour le S&P500 entre 4% et 8%, alors que les performances boursières sont très inégales pour chacune de ces périodes.
Tout semble se passer comme si une période de 10 ou 20 ans est suffisamment longue pour égaliser la moyenne des croissances bénéficiaires des sociétés cotées et pas assez longue pour que le progrès économique et la performance boursière se rejoignent encore, comme c’est le cas sur très longue période.
Le moteur principal de la performance boursière à long terme semble avant tout lié à la valorisation des marchés en début et fin de période. Plus la valorisation est basse en début de période, plus la probabilité d’un rendement futur à terme est élevé. Ainsi, à l’observation des 90 périodes de 20 ans entre 1919 et 2008, les plus rentables pour les actions (13,4 % de rentabilité moyenne annuelle) sont celles dont le PER est bas (10 ou 11) en début de période et plus haut en fin (20 à 25). En revanche, les plus bas rendements (3 à 5 %) correspondent à des périodes où le PER est beaucoup plus élevé en début et bas en fin de période.
Qu’en est-il de la situation boursière actuelle ? Aujourd’hui, les valorisations des marchés, européens notamment, sont à des niveaux historiquement bas. Ainsi, les PER des marchés boursiers français, allemand et de la zone euro se situent au niveau de 10. Cette situation est confirmée par l’analyse du PER historique des marchés européens selon la méthode de Shiller.
Il reste que pour l’allocation d’actifs, le point d’entrée est un élément important de la performance future. Or, souvent, les sorties de crise connaissent après un rebond des marchés, une période plus ou moins longue, dite de « tôle ondulée ». La volatilité, importante ces dernières années, pourrait rester élevée en 2011. Dans ces conditions, une entrée progressive et régulière sur les marchés d’actions serait la meilleure façon d’optimiser ses rendements sur le prochain cycle haussier.
Enfin, au-delà de l’importance réelle de l’évolution des marchés (β), l’allocation ne peut négliger la capacité d’un gérant actif à générer une surperformance régulière sur longue période (α). En cas de marchés difficiles (on ne peut l’exclure), cela peut s’avérer utile. Ainsi, Métropole Sélection affiche depuis sa création en 2002 (plus de 8 ans) une performance de 117,8 % contre 13,5 % (indice STOXX Large) et 44,2 % (indice Stoxx Large dividendes réinvestis)*.
NOTES
*Données au 31/03/2011