par Marie-Pierre Peillon, Directrice de la Recherche de Groupama AM
Etats-Unis: Sentiment général de ralentissement malgré le soutien de l’immobilier
Les données économiques du mois de juin dépeignent une économie américaine enfermée dans un mode de croissance molle au tournant du semestre. Le plus important, l’emploi salarié non agricole n’a augmenté que de 80 000 en juin, ce qui n’est guère mieux que la moyenne décevante de 73 000 enregistrée au cours des 2 mois précédents. La croissance de l’emploi dans le secteur privé à 84 000 est encore plus faible que la moyenne d’avril/mai (95k). A ce stade, il devient difficile de rejeter l’idée que les entreprises soient en mode d’attente car inquiètes quant aux perspectives économiques.
Les enquêtes de juin auprès des entreprises illustrent également une économie à la peine à l’entrée du second semestre. La confiance dans le secteur manufacturier s’est sensiblement dégradée, laissant l’indice ISM* à 49,7, sous le seuil d’expansion (50) pour la 1ère fois depuis juillet 2009. Tandis que l’enquête ISM dans le secteur non manufacturier enregistre une baisse de 1,6 points à 52,1 en juin, son plus bas niveau depuis janvier 2010.
Du côté de la demande des ménages, les nouvelles ne sont guère rassurantes. Les dépenses de consommation ont ralenti en moyenne sur avril/mai pour s’établir en dessous de 2% en rythme annualisé contre 6% au T1. Une telle évolution n’est pas surprenante étant donné la faiblesse persistante des revenus. Et il n’y a pas encore de signe que le « coup de pouce » au pouvoir d’achat réel des ménages via la baisse du prix de l’essence et une reprise d’activité dans l’immobilier soutiendront la consommation.
La Banque Centrale n’a pas ignoré le ralentissement économique observé dans la plupart des données récentes, en décidant de prolonger « l’Opération Twist » jusqu’à la fin de l’année. La Fed a également mentionné qu’elle serait prête à intervenir davantage si besoin était afin de soutenir la croissance et l’emploi.
Zone euro : La détérioration rattrape les pays « core »
Les enquêtes de conjoncture en juin continuent d’illustrer une économie qui se contracte au tournant du trimestre même si l’on peut observer une relative stabilisation dans le rythme de contraction. La principale nouvelle dans ces enquêtes est que les pays « core » ne sont pas immunes à la sensible dégradation des pays périphériques. La baisse des indices PMI en Allemagne est assez notable en juin, particulièrement dans le secteur des services qui semblait jusqu’à présent préservé.
Dans un contexte de nette détérioration de son activité exportatrice, l’Allemagne ne pourra probablement plus compter sur la résilience de sa demande domestique. Malgré une réelle amélioration du pouvoir d’achat, les consommateurs allemands restent timides dans leurs dépenses de consommation. En outre, l’amélioration du marché du travail semble être arrivée à son terme, d’après les données récentes.
Tandis que la dégradation des pays du sud semble désormais entrainer dans leur sillage le reste de la région, les perspectives pour les prochains trimestres dépendront des mesures que les chefs d’Etat et de gouvernement prendront pour stabiliser la zone euro. Les annonces du sommet des 28 et 29 juin constituent une première étape mais il reste beaucoup à faire. Même si les dirigeants européens parviennent à s’entendre sur certains points, ce qui permettrait de réduire sensiblement les tensions sur les marchés financiers, il n’en reste pas moins qu’il faudra un certain temps pour rétablir la confiance des agents économiques. Dans ces conditions, il est fort probable que l’activité continue de se contracter durant le second semestre avant de se stabiliser ou de progresser légèrement au tournant de l’année.
Chine : poursuite de l’assouplissement monétaire pour soutenir la croissance
La banque centrale a réduit les taux d’intérêt de référence sur les prêts et les dépôts pour la 2ème fois en un mois le 8 juillet. L’annonce a été une surprise car un vaste ensemble de données économiques sera publié à la mi-juillet, y compris les chiffres d’inflation, le PIB au T2 ou encore la balance commerciale. Cela signifie probablement que l’inflation a continué de décélérer sensiblement en juin et que l’ensemble de l’activité mesuré par le PIB sera plus faible que le rythme déjà décevant de la croissance au T1. Malgré la liste des mesures d’assouplissement déjà prises, l’économie est susceptible de rester faible jusqu’à ce que l’impact des mesures se reflète dans l’ensemble de l’activité (probablement en août).
Le ralentissement de l’économie chinoise représente un risque important pour l’économie mondiale. Bien que la tendance d’une croissance plus faible ait été bien illustrée par l’ensemble des indicateurs économiques, le message est plus mitigé concernant le rythme du ralentissement. La nouvelle baisse de l’indice (officiel) PMI dans le secteur manufacturier et de ses principales composantes en juin suggère que l’économie chinoise fait toujours face à des risques baissiers à court terme. La baisse notamment des nouvelles commandes associée à des stocks élevés indique que la demande reste faible. Ceci dit, la croissance devrait atteindre son point bas au T2 et progressivement se redresser au second semestre, principalement grâce aux effets de l’assouplissement de la politique économique.
*ISM : Institute for Supply Management