Etats-Unis : Yes he could

par Alexandra Estiot, économiste chez BNP Paribas

Le Président Obama aura finalement été réélu plus facilement que les sondages ne l’annonçaient, l’emportant dans la quasi- totalité des swing states1 (les Etats qui, d’une élection à l’autre, votent soit démocrate soit républicain et décident ainsi du Président – Romney ne l’a emporté qu’en Caroline du Nord, et d’une courte tête à 50,6%) et ne concédant que deux Etats depuis sa première élection : la Caroline du Nord et l’Indiana.

Les résultats des élections au Congrès sont en ligne avec ce que nous attendions, le Sénat restant démocrate et la Chambre des Représentants républicaine. Mais quelques surprises sont venues pimenter les résultats : ainsi le parti démocrate a gagné un siège au Sénat (il en dispose ainsi de 54, contre 45 pour les républicains auxquels s’ajoute 1 indépendant) alors que les républicains n’auraient perdu que sept sièges à la Chambre (240 représentants républicains contre 195 démocrates).

Qui, des démocrates ou des républicains, peut revendiquer la victoire ? La question est difficile à trancher. Le Président Obama a été réélu avec une majorité confortable des grands électeurs (303 voire 332 en comptant la Floride, contre 206 pour Mitt Romney). Il a également remporté le vote populaire (environ 51%, soit un écart d’environ 2,8 millions de voix entre les deux candidats). Mais si, en quatre ans, il n’a perdu que deux Etats, il a aussi perdu environ 9 millions de voix, un phénomène toutefois probablement exacerbé par les difficultés de se rendre aux urnes dans les Etats touchés par Sandy, notamment le New Jersey et l’Etat de New York, deux bastions démocrates dans lesquels le Président Obama a perdu 1,2 million de voix.

Les pertes de sièges républicains à la Chambre des Représentants ont, par ailleurs, été étonnamment limitées au regard de l’impopularité record des élus de la précédente législature. Ceci pourrait permettre aux républicains de revendiquer un soutien populaire à leur intransigeance en matière fiscale. Nous serions plus modérés : il faut, en effet, garder en tête que les républicains avaient la main sur le nouveau dessin de la carte électorale dans le plupart des 50 Etats, ce qui a très certainement joué en leur faveur. Par ailleurs, il est indiscutable que le Sénateur démocrate supplémentaire est un résultat d’autant plus favorable à ce parti que la plupart des sièges2 remis aux urnes étaient précédemment occupés par des démocrates.

En résumé, notre analyse est que le parti démocrate sort plus fort de ces élections, mais ce constat n’est certainement pas consensuel. Les négociations (quant aux moyens d’éviter le fiscal cliff, quant aux modalités du relèvement du plafond de la dette et quant à la réduction des déficits à moyen terme) seront difficiles, même si aussi bien le Président Obama que le Speaker de la Chambre des Représentants (le républicain John Boehner) se sont déclarés confiants quant à leur issue. Ce dernier s’est, notamment, dit ouvert à des augmentation de recettes fiscales (traduction: élargissement de l’assiette via l’élimination de certaines niches fiscales sans toucher aux taux d’imposition) à hauteur de USD 800 mds sur dix ans.

L’objectif du Président Obama est plus ambitieux, à USD 1 500 mds. L’accord pourrait ainsi intervenir quelque part entre ces deux montants, tout en s’accompagnant de coupes dans les dépenses discrétionnaires, mais aussi d’une réforme des dépenses qu’on dit obligatoires, c’est-à-dire les programmes Social Security (pensions publiques), Medicare (couverture santé des plus âgés) et Medicaid (couverture santé des plus démunis). Selon toute probabilité, c’est le premier des trois programmes qui sera réformé. Il en a besoin, mais pas autant que Medicare. Mais encore une fois, ce n’est que notre point de vue.

NOTES

  1. A l’heure où nous écrivons, la Floride compte encore ses bulletins. Les résultats semblent indiquer une victoire pour le Président Obama. Par ailleurs, si les résultats pour le Sénat sont définitifs, neufs postes de Représentants ne sont pas encore attribués, sachant que sept d’entre eux semblent acquis aux républicains et deux autres aux démocrates.
  2. Si la totalité de la Chambre des Représentants est renouvelée tous les deux ans, seul un tiers des Sénateurs est élu à la même occasion.

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