Zone euro, du mieux, enfin…

par Caroline Newhouse, économiste chez BNP Paribas

L’été a été marqué par l’amélioration, attendue de longue date, de la conjoncture économique en zone euro. Au deuxième trimestre, la croissance du PIB des Dix-Sept a été de 0,3% t/t, effaçant le repli du trimestre précédent (-0,3%). Officiellement, l’Union économique et monétaire (UEM) est sortie de récession.

Au nord, la reprise a été particulièrement nette, après un hiver inhabituellement long et rigoureux. En Allemagne, le rebond est marqué (+0,7% t/t, après la stagnation du premier trimestre). Il témoigne, par ailleurs, du dynamisme retrouvé de la demande intérieure, (+0,6% t/t). La consommation des ménages a progressé de 0,5% t/t, tandis que l’investissement privé est reparti à la hausse, après un an ou presque de contraction. L’investissement dans le secteur de la construction, pratiquement interrompu l’hiver dernier, a nettement redémarré (+2,6% t/t), tout comme l’investissement productif (+0,9% t/t).

La France a elle-même rebondi, bien que moins vigoureusement. C’est là la bonne surprise. Au deuxième trimestre 2013, son PIB a progressé de 0,5%, sa plus forte hausse depuis plus de deux ans. Parmi les pays du « cœur » de la zone euro, seuls les Pays-Bas, aux prises avec la chute de leur marché immobilier, sont restés en récession (-0,2% t/t, quatrième baisse consécutive du PIB). Mais le rythme de contraction du PIB s’atténue.

Par ailleurs, la contraction de l’activité est aussi moins alarmante dans les pays du sud (-0,1% t/t en Espagne, -0,2% t/t en Italie). Au Portugal, l’activité a même rebondi (+1,1%, enregistrant la plus forte croissance dans la zone euro), soutenue par le dynamisme des exportations. Ce rebond fait suite à une profonde récession (-2% g.a. au T2 2013) et met fin10à0dix trimestres consécutifs de contraction du PIB. Enfin en Grèce, l’activité s’est contractée de 4,6% g.a., après -5,6% au T1 2013.

Et ensuite ? L’amélioration des enquêtes donne du crédit au rebond dans la zone euro. En août, l’indice PMI composite a atteint 51,7, son plus haut niveau depuis juillet 2011. L’indice du climat économique de la Commission européenne a aussi continué de se redresser (cf. Ecoflash du 30 août). A 95,2 en août, il progresse pour le quatrième mois consécutif et atteint son niveau le plus élevé depuis mars 2012. L’Allemagne tire le convoi (103,8 en août après 100,5 en juillet). En outre, l’enquête IFO pour le mois d’août suggère que l’amélioration du deuxième trimestre se poursuit, les indices de situation courante et des anticipations ayant tous deux, progressé.

C’est tout bénéfice pour Mme Merkel. A un mois des élections générales allemandes, qui se tiendront le 22 septembre, le bilan économique constitue l’atout majeur de la Chancelière. Il est vrai qu’il dépasse rarement les frontières. Jusqu’à présent, l’Europe n’a pas été un thème central de la campagne électorale. D’une part, la majorité de l’électorat allemand (deux tiers selon les derniers sondages) se dit opposée au versement d’aides financières aux pays membres de la zone euro. D’autre part, le SPD peut difficilement se démarquer de la CDU sur ce thème, dans la mesure où les représentants de l’opposition siégeant au Bundestag ont systématiquement soutenu la politique européenne du gouvernement Merkel. Seul le parti anti-establishment et eurosceptique, AfD, qui récolte 3% des intentions de vote, selon les derniers sondages, a fait de la construction européenne un des thèmes centraux de sa campagne, appelant de ses vœux un abandon graduel et contrôlé de la monnaie unique au profit d’unions monétaires régionales plus souples regroupant des pays d’une même puissance économique.

La question grecque s’est toutefois invitée récemment dans le débat électoral par l’entremise de Wolfgang Schaüble. Le ministre des Finances a, en effet, soutenu que les pays de la zone euro devraient aider la Grèce au-delà de 2014 et qu’une troisième tranche de financement était actuellement en préparation. Tentant de limiter la portée des propos de son ministre, Angela Merkel a rappelé qu'aucune décision ne serait prise avant l'an prochain, tout en assurant qu’elle n’envisageait pas la possibilité d’une décote ("haircut") de la dette grecque. Cette cacophonie fait les choux gras de l’opposition. L’ancien chancelier Gerhardt Schröder, venu apporter son soutien au candidat du SPD, Peer Steinbrück, a dénoncé les « gros mensonges » de la Chancelière. Il estime qu’Angela Merkel trompe les électeurs allemands, en leur promettant qu’ils ne seront pas mis à contribution dans le sauvetage de la Grèce. Il en faut probablement plus pour entamer la cote de popularité d’Angela Merkel, mais le grand débat télévisé de dimanche prochain pourrait réserver quelques surprises.

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