Les marchés européens devraient poursuivre leur rebond, pour quelles raisons ?

par Uwe Zoellner, Responsable des actions paneuropéennes, gérant de portefeuille, chez Franklin Templeton Investments

Les actions européennes ont affiché de belles performances en 2013. Même si les marchés européens devraient selon nous s'inscrire à nouveau en hausse l'an prochain, notamment grâce au raffermissement de l'économie mondiale et à l'amélioration des résultats des entreprises, nous ne serions pas surpris de voir les marchés progresser plus lentement en 2014. Et contrairement aux années précédentes, aucun thème, style ou secteur ne se démarquera clairement. 2014 sera donc une excellente année pour les spécialistes de la sélection de valeurs.

À l'inverse du marché américain, les actions européennes n'ont toujours pas atteint leur pic de 2007, ce qui laisse à penser qu'elles pourraient encore progresser de 10 % à 15 % en 2014 portées par le rebond des résultats des entreprises. Le rebond économique lent mais viable des pays d'Europe méridionale s'avère déterminant dans cette croissance des résultats. Ces pays commencent à récolter les fruits d’efforts déployés sans relâche depuis quelques années pour régler de nombreux problèmes structurels. Les pays frappés de plein fouet par la crise financière tels que l'Irlande, l'Espagne et le Portugal ont vu leur situation s'améliorer grâce à des mesures d'austérité budgétaire strictes et à des réformes du marché du travail. La baisse des coûts salariaux unitaires, qui est le signe d'une amélioration de la compétitivité, nous permet de bien évaluer les progrès réalisés.

Parmi les bonnes nouvelles figure aussi l'assainissement de la situation budgétaire européenne, qui prouve que la cure d'austérité a été efficace. Nous pensons ainsi que la pression budgétaire pesant sur les entreprises et les ménages ne devrait pas s'intensifier. Les taux de chômage élevés de l'Espagne et du Portugal sont une source de préoccupation, mais nous pensons que la déréglementation des marchés du travail et la lente mais stable reprise économique devraient favoriser la croissance de l'emploi. Tout nous porte à croire que les graines d'une reprise de long terme ont été semées et que nous devrions en recueillir les fruits dans les prochaines années. Pourtant, certains risques subsistent. La France et l'Italie doivent redoubler d'efforts en matière de réformes, de coordination budgétaire et de réglementation bancaire. Nous pensons toutefois, à ce stade, que les avantages potentiels d'une Europe en mutation, se négociant sur de faibles niveaux de valorisation, compenseraient largement les risques.

Notre optimisme à l'égard de l'économie mondiale, et en particulier des marchés émergents, explique notre enthousiasme général. Bien que les marchés émergents ne progressent pas aussi rapidement que par le passé, ils continuent de croître beaucoup plus rapidement que les économies développées. Le point positif, c'est que ce pan de l'économie devrait selon nous contribuer à la croissance mondiale l'an prochain, profitant ainsi à l'ensemble de l'Europe. Les sociétés d'Europe du Nord exportent considérablement vers les pays émergents depuis de longues années. Aussi, les pays périphériques d'Europe du Sud devraient également tirer parti du regain de compétitivité enregistré, tant en exportant directement vers les marchés émergents qu'en exportant des biens intermédiaires vers l'Europe du Nord, qui, à son tour, distribue ses produits finis dans le monde entier.

Nombre de grandes sociétés européennes possèdent des activités au sein de marchés émergents. Aussi la reprise de la croissance mondiale entraînera la hausse des résultats. Les bénéfices des entreprises européennes se situent toujours en-deçà des niveaux de 2007 et sous-performent sensiblement les bénéfices des entreprises américaines. La croissance des bénéfices pourrait donc être à l'origine d'une nouvelle remontée des marchés boursiers. Soyez toutefois attentifs à certains risques. La Chine continuera selon nous de dicter le sentiment des investisseurs à l’égard des marchés émergents. Si les investisseurs s'aperçoivent que les réformes récemment annoncées s'avèrent inefficaces et que la croissance chinoise demeure atone, l'Europe risquerait d'être plus exposée à la baisse que les États-Unis. La vigueur de l'euro pourrait également peser sur les exportations, mais la zone euro devrait être capable de supporter un euro oscillant entre 1,30 et 1,40 dollar.

Même si la performance des marchés actions européens devrait une nouvelle fois se révéler satisfaisante, il ne sera pas aisé de déterminer les thèmes d'investissement en 2014. Ces cinq dernières années, les investisseurs en actions européennes pariaient sur des thèmes simples. Ils investissaient en majorité dans des actions défensives telles que les biens de consommation de base et certaines actions de consommation cyclique pour éviter les mauvaises surprises liées à une économie européenne en souffrance. Nous pensons que cette situation est à l'origine de valorisations tendues sur certains segments du marché. En 2013, nous avons assisté à des changements de direction et vu des investisseurs changer radicalement de cap en se ruant sans discernement vers des actions cycliques. Il serait selon nous erroné d'investir aveuglément dans des valeurs cycliques qui sous-performent tant en matière de bénéfices que de rebond par rapport au marché. Nous pensons en revanche que les investisseurs feront à nouveau preuve d'une plus grande prudence et que la flexibilité sera un facteur déterminant dans la sélection de valeurs.

Notre message pour 2014 sera d'investir au cas par cas. Nous sommes surtout attachés à la qualité et à la compétitivité des entreprises individuelles. Nous devons nous montrer très prudents en matière de sélection des valeurs, notamment sur les actions onéreuses que les investisseurs privilégient depuis environ cinq ans. Nous avons par exemple décelé des opportunités dans des sociétés spécialisées dans les biens de consommation et les matériaux, mais nous ne nous fions à aucun thème général.