Pourquoi privilégier les actions en 2014 ?

par Sophie Chardon, économiste chez Natixis

Le thème majeur de 2013 aura été la grande rotation des marchés obligataires vers les actions. Les principes de cette tendance ne devraient pas être remis en question (report des investisseurs pénalisés par la hausse des taux américains et, dans une moindre mesure, européens, vers les marchés actions). Nous pensons que le mouvement pourrait même être accentué en 2014 avec 1/ des valorisations déjà tendues sur de nombreux segments crédit ; 2/ une dynamique macroéconomique globalement favorable dans les pays développés ; 3/ un consensus des économistes relativement « rassemblé », reflet d’une meilleure visibilité sur les perspectives macroéconomiques.

Si la plupart des économistes s’accordent donc sur un scénario d’inflexion positive de la croissance mondiale tirée par les économies développées, deux caractéristiques méritent d’être soulignées pour leurs conséquences en termes d’allocation d’actifs :

  • un changement de régime pour la croissance économique mondiale qui devrait d’après nos prévisions rester inférieure aux niveaux observés avant la crise, et ce, au moins pour les deux années à venir. Nous tablons en effet sur une croissance mondiale de 3,3% en 2014 et 3,5% en 2015 (PPA), à comparer avec une moyenne de 5% entre 2003 et 2007. Ce changement de régime est attribuable à une certaine désynchronisation des cycles économiques des pays développés et émergents. Une implication directe est une décorrélation significative entre les marchés risqués. Les performances des marchés actions développés et émergents vont continuer de diverger tandis que les matières premières ne bénéficieront pas de l’appétit pour le risque des investisseurs. En effet, la plupart des marchés présentent une offre excédentaire du fait de la constitution de stocks importants au cours des années de croissance faible.
  • une plus grande isolation des moteurs de croissance mondiale : à l’image des importations américaines toujours faibles, le commerce mondial apparaît moins vigoureux que par le passé. Ainsi, les politiques domestiques et leurs impacts sur la croissance, l'inflation et les taux d'intérêt sont plus centraux que jamais. Si la liquidité mondiale demeure certes abondante, cette configuration donnera la priorité aux risques idiosyncratiques.

Au total, nous tablons donc sur un rebalancement des portefeuilles du crédit et des matières premières vers les actions développées. Au sein de l’obligataire souverain, les dettes les mieux notées sont à éviter tandis que les dettes périphériques continueront d’attirer les investisseurs à la recherche de rendement. Après une année 2013 exceptionnelle sur les marchés actions, nous attendons des performances encore robustes, bien qu’en repli. Les choix tactiques, sectoriels et / ou géographiques, seront déterminants dans la performance finale.

Ce scénario central peut paraître optimiste au regard de la situation européenne notamment. Nous n’excluons pas de périodes ponctuelles d’aversion pour le risque, qui pourront être liées à un ralentissement de l’économie japonaise lors de la hausse de la TVA (avril), aux premières anticipations de hausse des taux aux Etats-Unis (2ème semestre) ou au retour de la crise de la zone euro lors de la livraison des résultats de la revue des bilans bancaires (octobre). Dans chacun de ces cas, nous pensons que l’intervention des Banques Centrales permettra, si besoin, de contenir la crise. Une crise émergente globale qui rappellerait les années 90 nous semble moins probable : les sorties de capitaux qui avaient alors précipité les économies dans la récession concernaient les marchés interbancaires, avec toutes les implications systémiques qu’on connaît. Les Banques Centrales ont aujourd’hui accumulé des réserves de changes afin de parer à une telle éventualité et les marchés concernés par les retraits sont les marchés d’actions, surtout, ce qui limite les conséquences macroéconomiques.

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