par Eric Vergnaud, économiste chez BNP Paribas
Les dernières données économiques publiées dans la zone euro ont confirmé l’amélioration de la situation économique. L’indice jaugeant le climat économique général (Indice de sentiment économique, ESI) tiré de l’enquête mensuelle de la Commission européenne a affiché une nouvelle progression en juillet en se hissant à 76 (après 73,2 en juin), un plus haut depuis novembre 2008 (73,2). L’indice avait atteint un plus bas en mars à 64,6.
Certes, en dépit de ce rebond très important, la confiance demeure à un niveau extrêmement bas (la moyenne de l’indice est de 100 depuis 1990), mais sa reprise se poursuit. En particulier, la confiance des chefs d’entreprise est soutenue par une évolution plus favorable des carnets de commande. En outre, les stocks, après qu’ils ont été allégés de manière drastique aux T4 2008 et T1 2009, semblent désormais se situer à des niveaux jugés plus « normaux » au regard de la demande actuelle.
De même, le PMI composite d’activité s’est encore un peu plus rapproché du seuil de 50, à 46,8 en juillet (selon l’estimation flash), à la faveur d’une progression tant de l’indice de production dans le secteur manufacturier, que de celui mesurant l’activité dans les services. On peut ajouter à ce tableau relativement encourageant les nouvelles progressions enregistrées en juillet (pour le quatrième mois consécutif) des indices mesurant le climat des affaires en Allemagne (enquête IFO), en France (enquête INSEE) et en Italie (enquête ISAE). En revanche, la confiance des ménages reste fragile, compte tenu de la détérioration croissante du marché du travail. Le taux de chômage dans la zone euro est à son plus haut niveau depuis dix ans, malgré une légère baisse en juin à 9,3% contre 9,4% le mois précédent.
Dans ces conditions, le PIB devrait avoir enregistré au T2 une contraction moindre qu’au cours des deux trimestres précédents, et on peut attendre une stabilisation de l’activité au cours du second semestre. Néanmoins, nous continuons d’estimer qu’il faudra attendre la mi-2010 pour voir la zone euro renouer avec une croissance durablement solide. D’ailleurs, autre signe du caractère très progressif de l’amélioration de la conjoncture, le crédit continue de ralentir. En juin, la croissance annuelle des prêts au secteur privé a reculé à 1,5% (le rythme le plus faible depuis que la série existe) contre 1,8% en mai, 2,3% en avril et plus de 5% il y a un an. A la suite de la récession précédente, le point bas avait été (à la mi-1994) de 3,5%. Les prêts aux ménages n’ont progressé que de 0,2%, après même reculé légèrement (-0,2%) entre mai 2008 et mai 2009, et cela pour la première fois depuis la création de la série. Si la croissance des prêts aux sociétés non financières demeure beaucoup plus élevée avec + 2,8% en variation annuelle en juin, le ralentissement n’est pas moins tangible, après +4,4% et surtout 12 points sous le pic d’avril 2008.
Aux Etats-Unis, la publication du PIB au deuxième trimestre illustré la modération de la contraction de l’activité avec un recul limité à 1% (rythme trimestriel annualisé) après -6,4% et -5,4% au cours des deux trimestres précédents. En revanche, les révisions à la baisse importantes opérées par le Department of Commerce sur les données passées ont pour conséquence de ramener la progression du PIB pour l’ensemble de l’année 2008 à 0,4% contre 1,1% précédemment. Ainsi, si la récession actuelle semble toucher à sa fin, sa violence (qui en fait la récession la plus profonde plus profonde de l’après-guerre) est attestée par la baisse du PIB de 3,9% en glissement annuel au T2 2009, la plus mauvaise performance jamais enregistrée.
La faiblesse de la demande privée interne est une déception. En particulier, la consommation des ménages a peu profité (avec un recul de 1,2%) des allégements fiscaux et de l’augmentation des transferts sociaux. Face à la forte montée du chômage et au resserrement des conditions de crédit, les ménages ont préféré augmenter leur épargne. Ainsi, tout en étant significativement plus élevée qu’au creux du cycle (25,3 en février), la confiance des ménages (Conference Board) s’est repliée en juillet (46,6), pour le deuxième mois consécutif. Enfin, si le commerce extérieur contribue positivement à la croissance pour le troisième trimestre consécutif, cela s’explique, une nouvelle fois, par une contraction des importations plus marquée encore que celle des exportations.
Pour autant, un rebond du PIB dès le troisième trimestre demeure probable. Les données relatives au marché immobilier rendent de plus en plus en plus crédible l’hypothèse d’une stabilisation de celui-ci, après que l’investissement résidentiel a été divisé par deux depuis le pic de 2005. Ainsi, les prix immobiliers (indice S&P Case-Shiller) ont légèrement progressé en mai (+0,5% m/m) pour la première fois depuis juillet 2006, le rythme de baisse annuel revenant de -18,1% en avril à -17,1%. De même, tout en restant faible, l’investissement productif pourrait renouer avec la croissance avant la fin de l’année, les effets du plan de relance devant être les plus significatifs au second semestre. Une reprise progressive de l’économie américaine permettrait au PIB de progresser de plus de 0,5% en 2010, après un recul de 3% environ cette année.