Les primes à la casse ont-elles contribué au rebond de la production industrielle ?

par Sylvain Broyer et Costa Brunner, économistes chez Natixis

Le rebond de la production manufacturière que l’on peut observer en Europe coïncide avec une forte hausse des immatriculations de véhicules.

Les chiffres suggèrent que les programmes de prime à la casse ont joué un rôle significatif dans ce rebond. Mais dans quelle mesure ces programmes publics contribuent-ils au redressement de l’activité industrielle ?

Nous avons observé l’évolution de la production du secteur automobile et des principaux secteurs liés à celle-ci en France et en Allemagne depuis que les primes à la casse ont été mises en œuvre :

  • en France : alors que la production industrielle totale baissait de 0,6% entre janvier et juin 2009, la production industrielle induite par la prime à la casse augmentait de 0,9%;
  • en Allemagne : alors que la production industrielle totale baissait de 2,1% entre janvier et juin 2009, la production industrielle induite par la prime à la casse augmentait de 3,3%.

Retenant le taux de croissance de la production et l’évolution des indices des directeurs d’achat plutôt que l’évolution de la production, nous arrivons à la conclusion suivante : si la prime à la casse explique, en France, la moitié du rebond de la production industrielle et des indices des directeurs d’achat, en Allemagne, elle l’explique en totalité.

Le rebond de la production manufacturière que l’on peut observer en Europe depuis le deuxième trimestre de cette année coïncide dans certains pays avec une forte hausse des immatriculations de véhicules.

Les chiffres suggèrent que les programmes de prime à la casse ont joué un rôle significatif dans ce rebond.1

Mais dans quelle mesure ces programmes publics contribuent-ils au redressement de l’activité industrielle ?

Nous avons étudié la situation de la France et de l’Allemagne, premiers constructeurs automobiles européens, où une prime à la casse est actuellement offerte, et avons supposé que tous les véhicules produits depuis janvier 2009 en ont bénéficié.
Considérer uniquement la production du secteur automobile peut conduire à sous-estimer l’effet de la prime à la casse sur l’activité pour les raisons suivantes :

  • les véhicules ne sont pas produits exclusivement par le secteur automobile (constructeurs automobiles et sous-traitants) ; au total, 24 secteurs différents participent à la production automobile et fournissent des pièces, des composants ou des services aux constructeurs ; en conséquence, le secteur automobile ne contribue qu’à hauteur de 59% à la production d’une voiture.
  • il est probable que les pièces utilisées dans la production ont fait l’objet de nouvelles commandes des constructeurs, ce qui implique une production supplémentaire pour les fabricants de pièces et de composants.

Evaluer l’impact global de la prime à la casse sur l’industrie nécessite donc de prendre en compte :

  • l’augmentation de la production du secteur automobile ;
  • et la production des autres secteurs produisant des biens et services destinés à la production automobile.

Le second aspect apparaît clairement lorsque l’on examine le tableau des entrées/sorties pour l’économie allemande.

Une voiture pouvant être considérée comme un bien relativement homogène (une Renault Twingo est certes très différente d’une Porsche Carrera, mais toutes deux roulent), nous supposons que le tableau des entrées/sorties est globalement équivalent en France.

Nous avons ensuite observé l’évolution de la production des principaux secteurs impliqués dans la production automobile entre janvier et juin 2009 en France et en Allemagne.

Nous avons pondéré ces évolutions en fonction de la contribution du secteur considéré à la production automobile (tableau 2) et de son poids dans l’industrie nationale. La somme pondérée permet d’obtenir l’effet global des primes à la casse sur la production industrielle depuis janvier 2009.

Le résultat final de ces calculs est le suivant :

  • en France : alors que la production industrielle totale baissait de 0,6% entre janvier et juin 2009, la production industrielle induite par la prime à la casse augmentait de 0,9% ;
  • en Allemagne : alors que la production industrielle totale baissait de 2,1% entre janvier et juin 2009, la production industrielle induite par la prime à la casse augmentait de 3,3%.

Pour finir, nous évaluons dans quelle mesure la prime à la casse explique l’évolution du taux annuel de croissance de la production industrielle ainsi que l’évolution des indices des directeurs d’achat.

En France et en Allemagne, la production industrielle a reculé de 2,5 points et l’indice PMI de 8 points entre janvier et juin 2009.

En appliquant la même méthode de calcul que précédemment à l’évolution annuelle de la production des secteurs concernés, on parvient à la conclusion que la prime à la casse contribue à la croissance annuelle de la production industrielle :

  • en France, à hauteur de 1,3 point ;
  • en Allemagne, à hauteur de 2,5 points.

Conclusion : un impact considérable sur l’industrie

En d’autres termes, si la prime à la casse explique, en France, la moitié du rebond de la production industrielle et des indices des directeurs d’achat observé entre janvier et juin 2009, dans le cas de l’Allemagne, elle l’explique en totalité.

NOTES

  1. Cf. flash 2009-393 pour une présentation des différents programmes de primes à la casse partout dans le monde.

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