par Sébastien Galy, Stratégiste Macro Senior chez Nordea AM
Il existe deux visions contradictoires de l'économie américaine : celle d'un ralentissement dû à des restrictions sanitaires et celle d'une zone de flou au moment où les vaccins sont déployés avec le soutien de la politique fiscale. Les données du 5 février sur l’emploi aux États-Unis ont illustré ce flou illustrant le côté faible de l'économie. Le nombre de salariés non agricoles a augmenté en janvier, +49 000, contre +105 000 attendu par le consensus. Sans surprise, compte tenu des restrictions sanitaires, le secteur des loisirs et de l'hôtellerie a perdu 99 000 emplois en décembre.
Pour faire face au risque que l'économie américaine soit entravée par la Covid-19, les démocrates veulent faire passer un plan de relance de 1 900 milliards de dollars, probablement par la réconciliation, et ont fait des progrès dans ce sens. La secrétaire au Trésor, Mme Yellen, prévoit le plein emploi en 2022 si le plan fiscal complet est adopté, tandis que le prix Nobel Paul Krugman prédit une forte inflation en conséquence. La politique budgétaire a une chance d'être inflationniste si elle est exagérée, mais un paquet de 1 900 milliards de dollars dans une économie au PIB de 21 000 milliards de dollars ne semble pas complètement excessif (bien que trois fois l'écart de production tel que mesuré par le Bureau du budget du Congrès), nous aurons donc tendance à nous ranger du côté de Janet Yellen. Cela dit, le plan budgétaire fait avancer les chances d'une augmentation des taux et donc de la force du dollar.
Sur une note plus positive, les cas quotidiens de coronavirus sont passés sous la barre des 100 000 aux États-Unis, tandis que la vaccination progresse régulièrement, ce qui devrait réduire éventuellement le nombre de cas de Covid-19.
Qu’est-ce que cela signifie ?
Le plan budgétaire devrait accélérer la croissance et permettre de réduire les achats d'obligations plus tôt que prévu, peut-être en 2022, même si la Réserve fédérale n'est pas particulièrement favorable à une telle réduction. Cela implique que le dollar pourrait connaître des poussées de force par rapport aux devises des marchés émergents à mesure que la courbe du Trésor américain s'accentue. Cela suggère une surperformance continue des actions américaines par rapport aux actions européennes et une grande opportunité pour la génération d'alpha dans les titres à revenu fixe.
Une autre crise en préparation ?
La crise de colère est le scénario classique auquel le marché se prépare. Le 19 juin 2013, le président de la Fed, Ben Bernanke, avait annoncé que la Réserve fédérale réduirait ses achats d'obligations de 85 milliards de dollars à 65 milliards par mois en septembre, à condition que les données économiques restent positives. Il avait également annoncé que le programme pourrait se terminer en juin 2014 et, que si l'inflation était à 2 % et le chômage à 6,5 %, la Fed augmenterait ses taux. Après ces déclarations, le S&P a ensuite chuté de 3,8 % avant que la Fed ne fasse marche arrière.
La crainte de resserrement monétaire… une opportunité d’investissement sur les obligations US
Comme le montre la pente de la courbe du Trésor américain, nous fixons déjà les prix dans une crise partielle. Cela se produit également de manière sporadique pour les actions, lorsque le marché devient optimiste dans le cadre de ce que l'on appelle le phénomène de « Reflation trade », et lorsque la courbe du Trésor américain s'accentue considérablement. La crainte d'un resserrement monétaire devrait atteindre son point culminant au second semestre de l'année, avec un impact principalement sur les actions. D'ici là, une riche opportunité s'offre à nous dans le domaine des titres obligataires américains, à mesure que la courbe du Trésor américain s'accentue !