par Vincent Ganne, analyste chez IG Markets France
Les marchés actions suivent une tendance haussière parfaite, sans peur et sans reproche, et aucun analyste ne peut remettre en cause cette donnée technique. Les indices « leaders » se sont affranchis des résistances majeures, celles qui sont issues de la faillite de Lehman en août 2008.
C’est à nouveau le DAX 30 qui a indiqué la marche à suivre en dépassant les 6320 points, l’obstacle graphique qui couvrait les marchés depuis le printemps dernier. En données hebdomadaires, les configurations graphiques des indices sont attrayantes, malgré les secteurs bancaires européens et américains qui restent enfermés dans des canaux baissiers de long terme. Mettons les banques à l’écart et nous pouvons constater que l’actuelle séquence sectorielle représente un schéma classique de marché haussier.
Le marché actions est donc haussier mais les arguments pour le fragiliser ne manquent pas. Certains soulignent le fait que la désolidarisation « marché de l’emploi/marché actions » n’est pas valide à long terme, un point déjà mis en évidence avec la situation de l’immobilier aux Etats-Unis, ignorée par le S&P 500 entre 2005 et 2007.
L’immobilier résidentiel américain, l’immobilier commercial américain, le taux d’activité de la population des pays occidentaux (à nouveau en recul après une reprise non significative au premier semestre 2010)…autant d’arguments conjugués pour attaquer les fondations de la phase haussière qui a démarré sur les actions entre l’automne 2008 et mars 2009.
Mais est-ce vraiment sérieux ? Peut-on défendre le scénario de sommets imminents en se basant sur l’ignorance de l’emploi par les marchés actions ?
A long terme, il s’agit en effet d’une nouveauté. La tendance de l’emploi est historiquement corrélée à celle des indices actions, eux-mêmes liés avant tout à la profitabilité des entreprises. Les résultats des entreprises sont attendus bons sur l’ensemble de l’année 2010, les actions sont donc haussières.
Entre 2003 et 2007, la rentabilité des entreprises augmentait, l’emploi était à la hausse et les indices tendaient vers leurs sommets de 2000. Une triple corrélation désormais remise en question par une politique monétaire accommodante qui s’appuie sur l’injection de « fausse monnaie ».
La création monétaire saine correspond au besoin réel de l’économie en nouveaux crédits. La monnaie injectée pour garnir les bilans des banques centrales en actifs « toxiques » détenus par les institutions financières commerciales est tout simplement de la « fausse monnaie ». Ces mêmes institutions sont poussées à octroyer des crédits commerciaux pendant que les banques centrales achètent des Bons du Trésor. Au final, les taux sont maintenus à des niveaux très faibles. Un cycle des taux d’intérêt durablement faibles sur tous les horizons de temps a une conclusion unique : un grand marché actions haussier.
La perspective d’un fort taux de chômage durable ne pèse pas lourd face à l’ampleur de la création monétaire. La FED et la BoE vont poursuivre dans cette voie et pour un pays comme le Royaume- Uni, pouvoir bénéficier d’une Livre Sterling en baisse quand l’objectif est de réduire de deux points par an le ratio déficit budgétaire/PIB est une véritable aubaine. En Zone Euro, nous n’avons pas cette chance.
Peut-on défendre le scénario de sommets imminents en se basant sur l’ignorance par les marchés actions de l’emploi ?
La réponse est NON. NON tant que la création monétaire excessive occupera le devant de la scène.