par Laurent Quignon, économiste chez BNP Paribas
La lance d’Achille, héros de la mythologie grecque, avait la vertu de guérir les blessures qu’elle avait infligées. Les études d’impact macroéconomique menées sous l’égide de la Banque des Règlements internationaux (BRI) suggèrent qu’il en serait de même pour la réforme prudentielle Bâle III applicable aux banques, l’effet des contraintes exercées sur le financement de l’économie pouvant être neutralisé, à long terme, par les bienfaits d’une stabilité financière accrue. Pour autant, plusieurs éléments d’analyse invitent à tempérer cette vision idéale.
En révélant ses failles, la crise financière rendait impérieuse la révision du cadre prudentiel. Le G20 a approuvé les nouvelles exigences de solvabilité et de liquidité de Bâle III au cours du sommet de Séoul en novembre 2010. En décembre 2010 et janvier 2011, le Comité de Bâle a publié les dernières recommandations sur la solvabilité et la liquidité bancaires1. Les ordres de grandeur issus des études d’impact quantitatif menées conjointement par le Comité de Bâle (BCBS) et le Comité européen des Superviseurs bancaires (CEBS devenu EBA2) et publiées en décembre 2010 mettent en exergue les déformations inédites des bilans bancaires, de la structure de l’épargne financière et des financements, qui découleraient de l’application des nouvelles normes.
En dépit de divergences apparentes qui tiennent assez largement à des questions de forme, les conclusions des différentes études d’impact macroéconomique divergent finalement moins quant au sens – négatif – de l’incidence économique que quant à son amplitude. En effet, seule la prise en compte du renforcement supposé de la stabilité financière, et surtout sa traduction pour le moins contestable en termes de croissance économique, conduit la Banque des Règlements Internationaux à conclure favorablement.
Les évolutions de la réglementation prudentielle bancaire, depuis la première mouture de Bâle II, ne se résumeront pas à Bâle III stricto sensu. Le Comité de Bâle a, dans l’intervalle, significativement révisé le cadre applicable aux activités de marché (Bâle « 2.5 »). A la lumière des études d’impact quantitatif, les nouvelles normes affecteraient les bilans bancaires dans des proportions telles qu’elles ne seraient pas sans conséquence sur la structure et les volumes de l’épargne financière et des financements.
Un quintuplement des exigences minimales en fonds propres ordinaires
Les nouvelles dispositions bâloises relatives au calcul du numérateur du ratio de solvabilité se déclinent selon le triptyque: renforcement de la qualité des instruments éligibles aux fonds propres prudentiels, augmentation des déductions réglementaires prévues par Bâle II, et relèvement des seuils minima des ratios de solvabilité. En outre, une limitation du levier, calculé à partir du bilan et d’éléments de hors-bilan sur base non pondérée par les risques, sera instaurée.
* Un numérateur au périmètre resserré
La crise a mis en exergue l’incapacité de certains instruments pourtant classés en noyau dur des fonds propres (Tier one) à absorber les pertes3, en particulier les preferred shares des pays anglo-saxons, ce qui a conduit le Comité de Bâle à resserrer le périmètre des fonds propres réglementaires.
Les actions ordinaires et réserves constitueront désormais la forme prédominante du capital Tier 1. Bâle III abandonne le concept de core tier 1 pour lui substituer celui, plus strict, de Common equity Tier 1.
Alors que les déductions étaient jusqu’à présent essentiellement imputées aux fonds propres réglementaires totaux, elles le seront désormais à la composante Common equity du Tier one. Les propositions initiales de décembre 2009, qui excluaient les intérêts minoritaires des fiiliales, certains impôts différés et les charges administratives relatives aux créances hypothécaires (Mortgage Servicing Rights), ont été amendées et ces éléments feront finalement l’objet d’une reconnaissance prudente. Le passage à Bâle III impliquera cependant une hausse très significative des déductions. Il en ira ainsi de la partie des fonds propres excédentaires d’une filiale, pour la partie correspondant aux intérêts minoritaires, qui n’ont juridiquement vocation à couvrir que les pertes de ladite filiale, et non celles de la holding ou d’autres entités du groupe.
Cela vaudra également pour les participations dans d’autres banques4, compagnies d’assurance et sociétés financières qui n’étaient déduites qu’à hauteur de 50% sous Bâle II et qui le seront davantage avec Bâle III, dès lors que la somme desdites participations excèdera 10% de la composante Common equity de la banque détentrice. La question des participations dans les compagnies d’assurance avait cependant déjà été réglée en Europe par la directive sur les conglomérats financiers, et Bâle III n’aura donc, sur ce plan, pas d’incidence nouvelle.
Les trois éléments écrêtés, chacun, au-delà du seuil de 10% (outre les participations financières précitées, les charges administratives transférables liées aux créances hypothécaires – Mortgage Servicing Rights – et les reports de crédit d’impôts) seront, de surcroît soumis à un plafond global égal à 15% de la composante Common equity. Les montants excédant cette limite seront graduellement déduits de la composante actions ordinaires du Tier one entre le 1er janvier 2014 (20%) et le 1er janvier 2018 (100%). Enfin, les instruments qui ne seront plus éligibles ni en Tier one (hors composante actions ordinaires) ni en Tier 2 seront éliminés par tranche de 10% chaque année entre 2013 et 2023.
Fondées sur les données comptables au 31 décembre 2009, les études d’impact quantitatif de la CEBS et du BCBS donnent une mesure des nouvelles déductions, lesquelles pourraient atteindre, à terme, entre 25% et 40% de la composante Common equity du Tier one. Les banques de grande taille seront pénalisées par l’importance des survaleurs et des crédits d’impôts différés, tant dans l’Union européenne qu’à l’échelle mondiale. Les banques européennes de taille moyenne pourraient également pâtir du nouveau traitement prudentiel des participations financières.
Enfin, la nouvelle définition du capital réglementaire agit mécaniquement sur les actifs pondérés par les risques, puisque les expositions qui ne seront plus déduites des fonds propres seront également réintégrées dans les actifs pondérés par les risques (Risk Weighted Assets, RWA). Dans les études d’impact quantitatif, cet effet est recensé dans la partie relative aux fonds propres, pour lesquels un montant équivalent a été recalculé.
* Un élargissement des actifs pondérés par les risques
Si, à l’exception de quelques activités dont celles de marché, Bâle II continuera de s’appliquer à la plupart des mesures de risques, les impacts quantitatifs des recommandations formulées depuis lors par le Comité de Bâle apparaissent pour le moins significatifs. Déjà considérablement élargis par le relèvement des pondérations applicables au trading book (« Bâle 2.5 ») dans le cadre des règles édictées par le Comité de Bâle en juillet 2009, les actifs pondérés vont encore s’accroître du fait de la prise en compte du risque de contrepartie sur les opérations sur dérivés de gré à gré (Bâle III). Ces recommandations seront, dans leur ensemble, applicables à la fin de 2011.
– « Bâle 2.5 »
L’idée de constituer des fonds propres pour couvrir les risques émetteurs en trading book avait déjà germé dans l’esprit de certains régulateurs nationaux avant la mise en œuvre de Bâle II. Elle connut un début de concrétisation en juillet 2005, par la signature d’un accord introduisant l’Incremental Default Risk Charge entre le Comité de Bâle et l’Organisation internationale des Commissions de Valeurs mobilières (IOSCO), mais la couverture du risque de défaut par cette méthode ne s’est pas révélée être suffisante durant la crise.
Dès juillet 20095, soit moins de deux ans après l’entrée en application de Bâle II dans les pays de l’Union européenne (2008), le Comité de Bâle a donc complété le cadre réglementaire applicable au portefeuille de négociation de Bâle II, fondé sur la valeur en risque calculée avec une probabilité de 99% sur dix jours, par :
- une exigence additionnelle en fonds propres (incremental risk charge) visant à couvrir les risques de défaut et de dégradation des notations, fondée sur une valeur en risque (VaR6) maximale calculée avec une probabilité de 99,9% sur un an,
- une exigence supplémentaire en fonds propres au titre de la VaR stressée, calculée sur une période d’un an, caractérisée par des pertes significatives et destinée à réduire la procyclicité de l’exigence minimale relative aux risques de marché,
- l’application des exigences en capital du banking book aux titrisations détenues dans le trading book, afin d’éviter l’arbitrage réglementaire entre les deux type de portefeuilles,
- une comprehensive risk charge soumise à des exigences qualitatives et fondée sur des stress tests, destinée à couvrir le risque de corrélation entre les institutions financières,
- l’augmentation des pondérations relatives aux opérations complexes de titrisation (CDO d’ABS) et à certaines expositions aux structures de hors-bilan.
Au sein de l’Union européenne, l’ensemble de ces recommandations ont été transcrites en droit normatif, via les CRD 3 et, pour partie, CRD 2, qui doivent donner lieu à des mesures nationales d’application avant la fin de 2011 7 (excepté les aspects concernant les rémunérations dont les mesures d’application ont pris effet en janvier 2011).
Selon le Comité de Bâle, le passage du cadre initial de Bâle II à celui révisé, dit « Bâle 2.5 », conduirait à multiplier, en moyenne, entre trois et quatre fois les exigences minimales en fonds propres en regard du trading book.
– Les Credit Valuation Adjustments (CVA)
La principale innovation de Bâle III strico sensu concernant le calcul des risques pondérés réside dans la charge en capitaux propres qui sera imposée aux établissements au titre des ajustements de crédit sur produits dérivés de gré à gré. Ceux-ci mesurent la différence entre la valeur d’un portefeuille sans risque de contrepartie et la valeur risquée de ce même portefeuille, une fois prise en compte la probabilité de défaut de la contrepartie. Ainsi, les pertes en valeur de marché découlant d’une hausse de la probabilité de défaut de la contrepartie, ignorées par Bâle II et massives durant la crise, seront désormais appréhendées dans le cadre de Bâle III. Les opérations compensées avec une contrepartie centrale (CCP) et les Securities Financing Transactions (SFT), telles que les pensions, ne sont pas concernées. Soulignons, enfin, que le BCBS a légèrement amendé le traitement prudentiel des CVA le 1er juin dernier, en ramenant de 18% à 10% la pondération en méthode standard des contreparties notées CCC8. Le Comité de Bâle estime que l’introduction d’une couche de capital au titre des CVA impliquera un doublement des exigences relatives au risque de contrepartie, telles qu’elles prévalaient sous Bâle II (c'est-à-dire lorsque seule la probabilité de matérialisation du défaut était prise en considération)9.
En raison de leur présence importante dans les activités de marché, les grandes banques verront leurs actifs pondérés s’accroître de manière très sensible, ainsi qu’en attestent les études d’impact quantitatif . Outre les effets de redéfinition des fonds propres, les principales sources d’augmentation sont les Credit valuation adjustments, l’Incremental risk charge et la VaR stressée
Les premiers éléments communiqués par les grandes banques européennes indiquent, par ailleurs, que les applications successives de la CRD 3 (« Bâle 2.5 ») et de Bâle III impliqueraient des hausses très diverses des actifs pondérés par les risques (avant effets d’atténuation) en fonction de la structure de leur portefeuille d’activités. Parmi les établissements les plus significativement affectés par le nouveau mode de calculs figurent UBS (hausse des RWAs de 95%), Crédit Suisse (+75%) et, dans une bien moindre mesure, Barclays (+37%). Les établissements pour lesquels le portefeuille de négociation constitue une moindre part des actifs seront logiquement moins affectés.
– Le relèvement de l’exigence minimale
Le resserrement du périmètre des fonds propres réglementaires (le numérateur) et l’élargissement du dénominateur abaisseront, selon les études d’impact quantitatif fondées sur les données à fin 2009 et en moyenne, les ratios core Tier one (devenus Common equity Tier one) dans une fourchette comprise entre 3 et 6 points. Le seuil sera, en outre, relevé de 2% à 7% (exigence minimale de 4,5% à laquelle s’ajoutera un volant de conservation de 2,5%, selon un calendrier d’application qui s’étalera entre 2013 à 2019.
Le seuil minimal du Tier one passera de 4% à 6% des actifs pondérés (soit 8,5% avec le volant de conservation), ce qui signifie que les instruments éligibles au Tier one autres que les capitaux propres ordinaires (Common equity) ne pourront plus représenter que 1,5% des actifs pondérés (soit un quart du Tier one de 6% des actifs pondérés).
L’exigence minimale relative au capital réglementaire total demeurera fixée à 8% des actifs pondérés. Toutefois, dans la mesure où le Tier one devra constituer au minimum 6% de ces derniers, le Tier 2 (qui, au demeurant, ne sera plus subdivisé en catégories upper et lower) sera plafonné à 2% des actifs pondérés (soit un quart du capital réglementaire total). La catégorie Tier 3 a vocation à disparaître. Outre le volant de conservation de 2,5% de fonds propres ordinaires déjà cité, ce minimum réglementaire sera complété par un coussin contracyclique également constitué de fonds propres ordinaires et pouvant varier entre 0% et 2,5% selon la phase du cycle, à la discrétion des superviseurs nationaux.
L’étude d’impact de la BRI montre que, dans l’hypothèse d’une pleine application de Bâle III, les 74 grandes banques du groupe 110, qui ont fourni des informations suffisamment détaillées pour autoriser le calcul des ratios de solvabilité dans la nouvelle norme, auraient présenté un ratio Common equity Tier 1 de 5,7% en définition Bâle III11 au 31 décembre 2009 alors que leur ratio Common equity s’élevait à 11,1%, en définition Bâle II12, à la même date. Les 133 banques de taille moyenne voient les mêmes ratios passer de 10,7% à 7,8%, suggérant un impact plus sensible pour les grands établissements.
Les 33 grandes banques européennes, qui ont participé au volet solvabilité de l’exercice idoine conduit par le CEBS, présentaient un ratio CET1 légèrement inférieur en définition Bâle III (4,9%) pour un ratio common equity de 10,7% en définition Bâle II. Le même constat que dans l’étude d’impact de la BRI peut être fait : les 157 banques de taille moyenne subissent une baisse moins prononcée de leur ratio dans la nouvelle définition, ces derniers passant de 11,1% à 7,1%.
Aussi le triplement de 2% à 7% du seuil réglementaire ne fournit-il pas la juste mesure de l’évolution de l’exigence minimale exprimée en montant. A bilan constant, celle-ci serait, en effet, multipliée par cinq (banques de taille moyenne) voire sept (grandes banques) lors de la pleine application de la réforme. L’effort d’ajustement ne sera naturellement pas d’une telle amplitude dès lors que les ratios de solvabilité observés en définition Bâle II excédaient significative- ment le seuil réglementaire et que les établissements ont initié d’importants programmes de recapitalisation après la crise et dans la perspective de Bâle III.
A la fin 2009, le surcroît de capitaux propres requis pour que les banques qui présentent un ratio Common equity inférieur à 7% atteignent ce niveau s’élevait à 602 milliards d’euros dans l’étude du Comité de Bâle (577 milliards pour les banques du groupe 1 et 25 milliards pour celles du groupe 2. Dans l’étude du CEBS, le besoin global s’établissait à 291 milliards d’euros (263 milliards pour le groupe 1, et à 28 milliards pour le groupe 2).
Dans ce contexte, les informations communiquées par plusieurs établissements, selon lesquelles ces derniers se conformeraient aux nouvelles exigences dès 2013 ou 2014 en conjuguant mesures d’atténuation et mises en réserves, sans recourir à des augmentations de capital, ont pu surprendre, donnant parfois le sentiment erroné que les nouvelles normes de solvabilité étaient modérément contraignantes.
En réalité, l’horizon temporel des communiqués financiers est sensiblement plus court que celui des études d’impact quantitatif. Les déductions ne grèvent encore que faiblement les niveaux des ratios dans les premiers, alors qu’elles jouent pleinement dans les secondes, en vertu du calendrier d’application défini par le Comité de Bâle.
Ainsi, en simulant l’application du nouveau ratio de solvabilité à 62 banques à l’échelle mondiale, Otcker-Robe et Pazarbasioglu (2010) montrent que l’ensemble des banques se conformeront bien aux nouvelles exigences en 2013 et 2014, mais que, au fur et à mesure de l’augmentation du seuil réglementaire et des déductions applicables au CET1, la proportion de banques dont les ratios seront inférieurs aux exigences augmentera inéluctablement entre 2015 et 2019, y compris en tenant compte des mises en réserves. Sous l’hypothèse d’un taux de distribution moyen de 40% des résultats nets entre 2013 et 2019, l’insuffisance de fonds propres, au regard du seuil de 7%, pourrait concerner 16% des banques (10/62). Dans l’hypothèse où les résultats seraient nuls ou intégralement distribués, la proportion atteindrait 77% (48 banques) à l’horizon de 2019.
– Le levier
En complément au ratio de solvabilité, un ratio de levier, rapportant les fonds propres à un dénominateur constitué du total de bilan et d’éléments de hors-bilan, pourrait être intégré au pilier 1 à compter du 1er janvier 2018.
La principale justification théorique du ratio de levier réside dans les lacunes du ratio risk-based, lequel ne permettrait pas d’écarter totalement une sous-évaluation de certains risques au sein du dénominateur. Ainsi, selon Blum (2008), l’avantage informationnel dont les banques disposent sur le régulateur les conduirait à sous-estimer leurs risques réglementaires afin d’économiser des fonds propres. Sous cette hypothèse forte, un ratio de levier réglementaire est effectivement susceptible de réduire le risque bancaire. Une autre éventualité est la mauvaise appréhension de certains risques par le régulateur lui-même, comme l’illustrent les pertes essuyées par certaines banques (américaines et suisses notamment) qui présentaient, néanmoins, des ratios de solvabilité Bâle II (pondérés) très supérieurs non seulement à l’exigence minimale réglementaire mais aussi aux ratios de solvabilité de leurs concurrentes internationales, dont la plupart ont pourtant traversé la crise plus sereinement . Si la fourchette des pertes et dépréciations subies durant la crise apparaît d’autant plus large que le levier était initialement important (i.e. ratios des fonds propres aux actifs faibles), sa limitation serait de nature à pénaliser injustement les systèmes bancaires présentant des portefeuilles moins risqués (France, Japon).
L’élargissement considérable du périmètre des risques par Bâle 2.5 et Bâle III ôte finalement au ratio de levier une grande part de la principale justification théorique avancée sous Bâle II. Le levier est, en outre, susceptible de pénaliser prioritairement les banques présentant un bilan important et de faibles risques réglementaires (banque de détail). La banque contrainte par le levier sera alors incitée à réduire la taille de son bilan en privilégiant la cession, ou le non- renouvellement, des actifs les moins pondérés (i.e. les moins risqués au sens bâlois), ce qui se traduira par une élévation du risque réglementaire moyen. Frenkel et Rudolf (2010) soulignent qu’une contrainte de levier est susceptible d’encourager un transfert des actifs des bilans bancaires vers le marché ou la sphère non réglementée, de limiter la couverture des risques au moyen d’instruments dérivés et de réduire les financements.
Le levier contraindrait, de surcroît, une proportion plus élevée de banques européennes en raison de portefeuilles moins risqués au sens bâlois.
Considérant qu’une estimation rigoureuse de ces effets induits constituait un préalable indispensable, le Commissaire européen en charge du marché intérieur a déclaré devant la Commission des Affaires économiques et monétaires du Parlement européen en mai qu’il n’avait pas l’intention « à ce stade » de donner un caractère juridiquement contraignant au ratio de levier dans la proposition de directive (CRD4) qui devrait être présentée avant la fin du mois de juillet.
Normes internationales de liquidité : terra incognita
Contrairement aux normes internationales de solvabilité bancaire, apparues dès 1988 avec Bâle I, et après l’échec des négociations menées au cours des années 1980, les normes de liquidité bancaire ont jusqu’à présent échappé au processus d’harmonisation internationale de la réglementation prudentielle. Les exigences de liquidité nationales, lorsqu’elles existent, diffèrent sensiblement d’un pays à l’autre. Elles présentent, ainsi, un caractère tantôt qualitatif (Etats- Unis, Espagne, Italie, Japon) tantôt quantitatif (Allemagne, France, Royaume-Uni). Dans cette dernière hypothèse, les dispositifs consistent en une limitation des écarts de maturités (Italie, France), parfois combinée avec une exigence minimale d’encours d’actifs liquides (Allemagne, Pays-Bas).
Les nouvelles normes bâloises associent un ratio de liquidité à court terme et un ratio de liquidité à long terme. Les besoins en actifs liquides (LCR) et en ressources stables ou longues (NSFR) mis en exergue par les Quantitative Impact Studies (QIS), publiées conjointement par la BRI et le CEBS en décembre 2010, suggèrent que les nouvelles normes bâloises de liquidité seront beaucoup plus contraignantes que les exigences nationales préexistantes, et ce, quelle que soit la zone géographique considérée.
* Le ratio de liquidité à court terme
Le ratio de liquidité à court terme, ou Liquidity Coverage Ratio (LCR), vise à garantir que la banque détient suffisamment d’actifs hautement liquides pour faire face aux net outflows à trente jours qui résulteraient d’une crise de liquidité à court terme, sur la base d’un scénario de flux de trésorerie prédéfini par le régulateur, les premiers devant s’élever à au moins 100% des seconds.
– Les High Quality Liquid Assets (numérateur)
Les actifs hautement liquides sont scindés en deux catégories. Les level 1 assets, constitués du cash, des réserves constituées auprès de la banque centrale et de titres d’emprunts d’Etat ou assimilés notés au minimum AA-13. Les level 2 assets, qui ne doivent pas représenter plus de 40% des HQLA (High Quality Liquid Assets) après application de l’abattement de 15%, sont constitués des titres d’emprunt d’Etat et assimilés de notation comprise entre A- et A+ 14 , d’obligations corporate et de covered bonds et bénéficiant d’une note externe d’au moins AA- ou d’un rating interne équivalant à ce niveau, à l’exclusion des titres émis par les institutions financières ou par la banque et ses filiales (dans le cas des covered bonds).
– Les net cash outflows (dénominateur)
Les cash outflows sont constitués des fuites sur dépôts et du non-renouvellement des autres ressources à court terme, dont les taux, exprimés en pourcentage de l’encours, sont définis par le régulateur. Les inflows correspondent aux tombées et intérêts contractuels attendus à trente jours sur les seuls actifs performants. Afin de tenir compte du renouvellement des prêts, le comité de Bâle recommande d’appliquer un abattement de 50% aux inflows contractuels relatifs aux prêts accordés à la clientèle de banque de détail et aux sociétés non financières. L’abattement à appliquer aux flux entrants liés aux reverse repo (revente à terme des titres) est d’autant plus grand que la qualité des titres faisant l’objet de l’opération et la probabilité de renouvellement de la ligne sont élevées. Il est fixé à 100%, 85% et 0% respectivement pour les level 1 assets, level 2 assets et autres actifs n’appartenant à aucune des deux premières catégories.
Enfin, le montant des inflows pris en considération pour le calcul est plafonné à 75% du total des ouflows calculés selon les paramètres réglementaires (taux de fuite ou de non-renouvellement théoriques). En d’autres termes, la banque devra nécessairement détenir une proportion d’actifs liquides représentant 25% des outflows simulés en période de crise.
– Les banques européennes présentaient un déficit de 1.000 milliards d’euros d’actifs liquides à la fin de 2009
Parmi les principaux enseignements des études d’impact de la BRI et du CEBS figure le positionnement plus défavorable des grandes banques à l’aune du liquidity coverage ratio. Le niveau moyen qui ressort de l’étude d’impact de la BRI était, à la fin de 2009, de 83% pour les banques du groupe 1 et de 98% pour les banques du groupe 2. De même, dans l’étude d’impact du CEBS, le niveau moyen du LCR était de 67% pour les banques du groupe 1 et de 87% pour les banques du groupe 2. On y découvre également que seules 43% des 166 banques (toutes tailles confondues) ayant participé à l’étude de la BRI se conformaient à la nouvelle norme (ratio LCR supérieur à 100%). La proportion équivalente n’a pas été publiée par le CEBS. Quelques estimations d’analystes permettent cependant d’évaluer entre un tiers et deux tiers la part des grandes banques européennes qui respecteraient d’ores et déjà le minimum requis.
Enfin, le surcroît nécessaire d’actifs liquides pour que l’ensemble des banques satisfasse le seuil réglementaire de 100% atteignait 1 730 milliards d’euros à la fin de 2009 pour les banques situées dans le périmètre de la BRI 15 et 1 000 milliards d’euros pour les banques de l’Union européenne.
– Une lecture théorique du liquidity coverage ratio
Le ratio LCR peut être, au moins pour partie, apparenté à un coefficient de réserves obligatoires, en vertu duquel les banques commerciales doivent constituer des réserves auprès de la banque centrale dans une proportion de leurs dépôts, et auquel une abondante littérature a été consacrée.
Le premier effet d’une hausse du coefficient de réserves est la baisse arithmétique du multiplicateur du crédit (ou de la monnaie comme l’écrivent plus justement les Anglo-saxons).
Celui-ci ne sera pas directement affecté par la hausse de la partie des actifs liquides du numérateur du LCR qui constituent des contreparties de la masse monétaire (créances sur l’économie, en particulier titres d’emprunts d’Etat). En revanche, les contreparties de la masse monétaire se déformeront en faveur de ces derniers, au détriment du crédit au secteur privé.
La diversité de la gamme d’actifs éligibles au numérateur du LCR au regard d’un « simple » coefficient de réserves obligatoires complique singulièrement l’évaluation ex ante des effets d’une telle exigence sur les agrégats monétaires, qui dépendent, notamment, de la ventilation des actifs liquides et de l’élasticité du portefeuille d’actifs aux taux d’intérêt.
L’effet est donc susceptible de s’établir entre deux situations extrêmes. L’effet minimal sur la masse monétaire au sens étroit (composante immédiatement mobilisable comme moyen de paiement) serait la situation dans laquelle la hausse des actifs liquides consisterait exclusivement en des achats de titres privés (la probabilité de cette hypothèse est toutefois limitée par le plafonnement des level 2 assets à hauteur de 40% des HQLA). Une situation intermédiaire découlerait d’achats de titres publics. L’effet maximal serait obtenu à la suite d’une hausse des réserves constituées par les banques commerciales auprès de la banque centrale. Dans ce cas de figure, la hausse des réserves influencerait directement la demande de base monétaire et, partant, réduirait la liquidité globale dans l’économie.
Le deuxième effet qui apparente, sans doute plus encore que le premier, le LCR au coefficient de réserves réside dans la hausse du coût d’opportunité associé à la détention d’actifs pas ou faiblement rémunérés, de nature à placer les banques dans une position concurrentielle défavorable vis-à-vis de la finance de marché ou du secteur financier non régulé. Les études empiriques mettent en évidence les effets du taux de réserves obligatoires positifs sur le coût du crédit, et négatifs sur la masse monétaire et les encours de crédit domestique.
Si les établissements de crédit demeurent le plus souvent assujettis à la constitution de réserves obligatoires auprès de la banque centrale (par exemple 2% d’une assiette essentiellement formée de dépôts à moins de deux ans dans la zone euro), les externalités négatives qui leur sont associées ont conduit à leur abandon progressif en qualité d’outil de contrôle monétaire au profit d’interventions directes sur le marché monétaire (politique d’open market).
Or, dans la définition actuelle qui résulte des propositions du Comité de Bâle de décembre 2010, le LCR pourrait contraindre les banques à immobiliser une fraction de leurs actifs sous forme d’instruments à faible rendement et ce, dans une mesure beaucoup plus large que les réserves obligatoires. A titre d’illustration, le montant requis de réserves obligatoires pour les établissements de crédit de la zone euro, remarqua- blement stable dans le temps, s’établissait à 208,3 milliards d’euros pour la période de constitution courant jusqu’au 10 mai dernier, soit environ un cinquième du seul déficit en actifs liquides que présentaient, selon le QIS du CEBS, les banques de l’Union européenne à la fin de 2009 (1 000 milliards). A contrario, il convient néanmoins de souligner que la nature des actifs éligibles (titres de créances) tend à en limiter le coût d’opportunité unitaire au regard d’un ratio de réserves obligatoires.
Les développements qui précèdent reposent très largement sur l’hypothèse selon laquelle les banques chercheraient à respecter le ratio en constituant le matelas d’actifs liquides requis sans agir sur des postes du bilan autres que ceux auxquels des actifs liquides seraient substitués.
Or, dans un contexte certes différent, Wagner(2004) a montré que le renforcement de la liquidité d’une partie du portefeuille peut tout aussi bien inciter les banques à compenser le coût d’opportunité ainsi créé en réduisant la liquidité de l’autre partie du portefeuille dans la perspective d’un rendement plus élevé. Les banques raisonneraient, en quelque sorte, en termes de liquidité moyenne du portefeuille.
L’hypothèse la plus vraisemblable est que les banques réduisent l’assiette (les flux nets de trésoreries sortants constituant le dénominateur) du matelas d’actifs liquides (le numérateur) via un allongement de la maturité des passifs et/ou un raccourcissement de la maturité des actifs.
* Le ratio de liquidité à moyen long terme
L’esprit du Net Stable Funding Ratio (NSFR), qui constitue en réalité davantage un ratio de funding, est de prémunir les banques contre les conséquences d’une crise de liquidité, en interdisant le financement d’emplois bancaires (prêts ou titres) à plus d’un an par des ressources arrivant à échéance dans un délai inférieur à cet horizon et susceptibles de ne pas être renouvelées. Le ratio impose, ainsi, que les emplois à plus d’un an (pondérés) et certains engagements de hors-bilan soient couverts à 100% par les ressources stables disponibles. L’intention du régulateur est louable mais le ratio, dans sa définition actuelle, limite dangereusement la capacité des banques à transformer les maturités. Les déficits en ressources longues ou stables supplémentaires mis en évidence par les études d’impact sont, en effet, si conséquents qu’ils rendent plus probable une limitation des emplois à plus d’un an qu’une levée des ressources nécessaires.
– Les ressources stables disponibles (le numérateur)
Les ressources stables sont constituées de différents postes du passif. Si les ressources financières de maturité résiduelle supérieure à un an (capitaux propres, emprunts, dépôts à terme) sont prises en considération pour leur montant inscrit au bilan, la pondération des ressources à moins d’un an est une fonction croissante de leur stabilité supposée : 50% lorsqu’elles émanent de corporates non financières, du secteur public ou de banques centrales, 80% pour les dépôts dits « moins stables » 16 de banque de détail, 90% pour les dépôts « stables »17 de banque de détail.
– Les ressources stables requises (le dénominateur)
L’assiette déterminant le besoin en ressources stables (RSF18est égale à la somme d’éléments de bilan et de hors-bilan. Les pondérations des éléments de bilan dépendent négativement de leur liquidité théorique à un an. La plupart des emplois à plus d’un an sont ainsi pondérés à 100% sauf s’ils présentent un degré de liquidité particulièrement élevé comme les obligations corporates de rating supérieur à AA- (20%), les actions cotées de sociétés non financières ou les obligations éligibles aux opérations de refinancement et non émises par des institutions financières 19 (50%). Enfin, les facilités de crédit ou de liquidité non tirées (hors-bilan) requièrent un besoin de ressources stables égal à 5% de leur montant.
– NSFR et contrainte macroéconomique d’équilibre monétaire
En termes d’équilibre monétaire, le NSFR pourrait entraîner une augmentation plus rapide des ressources stables (épargne contractuelle, obligations et capitaux propres nets) venant en déduction des contreparties traditionnelles (extérieur, créances sur l’économie) pour le calcul de la masse monétaire. Une simple illustration en dynamique montre que les ajustements pourraient, in fine, se révéler bien supérieurs aux besoins obtenus dans le cadre de l’approche statique des études d’impact (les autres postes de bilan demeurant inchangés). L’effet restrictif sur la masse monétaire M3 s’en trouverait accru.
Chaque banque va chercher individuellement à satisfaire le NSFR en considérant, ex ante, que les postes du bilan qui ne font pas l’objet d’un ajustement sont exogènes. Or, d’un point de vue macroéconomique, la masse monétaire, est égale aux crédits à l’économie diminués des ressources non monétaires des institutions financières et monétaires (IFM) si l’on raisonne pour simplifier en économie fermée20. Il en résulte, qu’en réalité, à l’échelle du système bancaire et à moyen terme, sans création monétaire (puisqu’une création monétaire initiée par les banques commerciales dégraderait le NSFR21), les émissions obligataires des banques donneront lieu, in fine, à une contraction d’autres ressources bilancielles (monétaires ou non).
Imaginons, par exemple, que le système bancaire émette 100 milliards d’obligations à la période 1. Sans création monétaire, cela se traduira – à terme – par une baisse d’autres ressources bilancielles d’un montant équivalent et la taille du bilan du système bancaire n’en sera pas modifiée. Si l’on suppose que lesdites ressources sont pondérées à 0,5 au numérateur du ratio NSFR (ex : un mix de ressources de marché courtes et de dépôts plus ou moins stables), les banques auront gagné 100 milliards de ressources mais « perdu » au sens bâlois 50 milliards (100 milliards x 0,5), et leurs ressources stables ne se sont finalement accrues que de 50 milliards, loin des 100 milliards désirés.
Poursuivre le raisonnement à l’infini n’est guère réaliste puisque l’on ignore les effets induits de la hausse du coût moyen des ressources et des taux intermédiés sur les volumes de prêts mais cela a, au moins, la vertu pédagogique d’illustrer le caractère itératif du processus. Si, à la période 2, les banques émettent 50 milliards (100 milliards – 50 milliards), elles n’accroissent leur ressources stables au sens bâlois que de 25 milliards, ce qui les conduit à émettre 25 milliards à la troisième période et ainsi de suite.
Mathématiquement, le montant additionnel à émettre à chaque période converge vers zéro et les banques doivent lever au total n fois le déficit initial de ressources stables pour accroître le dénominateur du NSFR du montant désiré. Le multiple n est égal à 1/(1-␣) où ␣ désigne la pondération moyenne au numérateur (RSF) des ressources auxquelles se sont substituées les ressources stables nouvellement créées. Soit, dans le cas où la pondération moyenne des ressources est de 0,50, un multiple de 2.
Dans la réalité, il est vraisemblable que le besoin en ressources stables supplémentaires diminuera davantage à chaque période en raison de la baisse du dénominateur du NSFR. Le renchérissement de la ressource bancaire (passif déformé vers les maturités plus longues) et la nécessité d’orienter une partie des ressources vers des emplois pas ou faiblement rémunérés exerceront une pression négative sur les marges, dont les établissements chercheront à limiter les effets en augmentant le rendement de leurs actifs. La hausse des conditions de financement agira négativement sur les volumes de crédit et le dénominateur du NSFR.
L’évaluation de ces deux effets et la manière dont ils interagissent sont complexes. Pour la suite du raisonnement, l’hypothèse est donc faite que les besoins additionnels en ressources longues ou stables correspondent au déficit en ressources stable mis en évidence par l’étude d’impact quantitatif du CEBS.
– Les banques européennes présentaient un déficit en ressources longues ou stables de 1 730 milliards d’euros à la fin de 2009
Les études d’impact conduites par le BCBS et le CEBS ont mis en évidence des besoins en ressources longues ou stables supplémentaires de respectivement 2 890 milliards d’euros pour les 166 banques ayant fourni suffisamment d’informations pour le calcul du NSFR à la fin de 2009, et de 1 800 milliards d’euros pour les banques européennes ayant participé à l’étude du CEBS. Les évolutions des ratios NSFR des banques par grande zone économique entre 2005 et 2009, calculées par des auteurs du FMI (IMF, 2011a), illustrent la position relativement défavorable des banques européennes et celle, plus favorable, des banques américaines et asiatiques. A l’instar de ce qui a été constaté pour le LCR, les études d’impact quantitatif ont montré que les banques de taille moyenne étaient mieux positionnées que les grandes banques en termes de ratio, avec un écart plus sensible à l’effet taille dans le périmètre BRI (103% contre 93%) que dans l’Union européenne (94% contre 91%).
Les mêmes calculs effectués par modèle d’activités montrent que les ratios NSFR se sont repliés davantage, durant la crise, pour les banques d’investissement et commerciales que pour les banques universelles. Les ratios se sont ensuite redressés en 2009, à la faveur de la normalisation des structures de ressources. Les banques d’investissement tendent à amplifier les évolutions générales en raison de leur plus grande dépendance aux ressources de marché, mais aussi de modèles d’activités plus malléables.
– Un calibrage perfectible
Les deux nouveaux ratios de liquidité s’inscrivent dans un dessein assez largement microprudentiel22. Il apparaît, dès lors, tentant d’évaluer leur capacité à prévenir – ou à prédire – les défaillances bancaires, exercice auquel s’est livré récemment le Fonds monétaire international23 s’agissant du NSFR.
Les économistes du Fonds ont ainsi simulé les nouveaux ratios de liquidité à moyen terme d’un échantillon d’une soixantaine de banques (34 européennes, 14 américaines et 15 asiatiques) à la fin de 2006. Selon leurs calculs, les banques qui ont connu une défaillance au cours de la crise financière présentaient des niveaux de NSFR distribués de manière relativement homogène entre 80% et 107%, et seules 7 d’entre elles présentaient un ratio inférieur à 100% (dont un niveau significativement inférieur à l’extrémité basse de la fourchette pour une banque). Si la méthodologie de calcul (l’insuffisance de données disponibles rendant nécessaires plusieurs hypothèses) et la taille réduite de l’échantillon (en particulier pour des niveaux de NSFR inférieurs à 80%) sont de nature à en relativiser la portée, ces résultats suggèrent néanmoins qu’un abaissement de l’ordre de 10 points de l’exigence minimale (soit 90%) ne modifierait guère l’efficacité du ratio en qualité d’outil microprudentiel. Il contribuerait, cependant, à limiter significativement son incidence économique.
L’incidence économique : des effets dommageables aux effets escomptés
Replacé dans le contexte du circuit de financement de la zone euro, le besoin en ressources longues supplémentaires des banques de l’Union européenne n’en apparaît que plus considérable. Les rôles respectifs des différentes catégories d’intermédiaires financiers montre, en outre, qu’au-delà des passifs bancaires le respect du NSFR implique une déformation de la structure de l’épargne des agents non financiers et/ou du reste du monde.
L’allongement de la maturité des passifs bancaires indissociable de celui de la maturité de l’épargne
L’incidence du NSFR sur le circuit de financement de la zone euro peut être appréhendée à partir des comptes financiers publiés par la BCE (schéma).
La partie supérieure décrit l’intermédiation financière au sens large (sociétés d’assurances et fonds de pensions, autres intermédiaires financiers comprenant notamment les OPVCM généraux, Institutions financières et monétaires (IFM) qui regroupe les OPCVM monétaires, les établissements de crédit et les banques centrales). Les intermédiaires financiers collectent environ 53 000 milliards d’euros de ressources auprès des agents non financiers résidents, du reste du monde, mais aussi d’autres intermédiaires financiers.
La partie inférieure du schéma retrace l’épargne financière et le financement des agents non financiers et du reste du monde, qu’ils soient intermédiés (avoirs figurant au passif des intermédiaires financiers) ou non (monnaie fiduciaire, titres détenus en direct et non émis par des intermédiaires financiers). Chaque encours a été ensuite décomposé selon sa maturité (court terme et long terme).
L’application d’une règle proportionnelle fondée sur les tailles respectives des systèmes bancaires entrant dans le champ de l’étude d’impact du CEBS et des banques de la zone euro offre une approximation, sous des hypothèses acceptables, du besoin en ressources longues ou stables supplémentaire des banques de la zone euro. Sur la base de ce calcul simple, le système bancaire de la zone euro présenterait un déficit en ressources stables d’environ 1 400 milliards d’euros, un montant équivalant à 16% des ressources financières à long terme des IFM (titres de créances à long terme et actions) ou encore à 22% de l’encours des titres de créances à long terme émis.
La structure par maturité des actifs et passifs financiers renseigne sur la transformation des maturités opérée par chaque secteur institutionnel. Ainsi, parmi les agents financiers, la seule catégorie qui allonge les maturités est celle des IFM. Au 31 décembre 2010, leurs ressources financières à long terme (8583 milliards d’euros) étaient, en effet, très sensiblement inférieures à leurs emplois à long terme (19320 milliards d’euros). A l’inverse, les assureurs et fonds de pensions ainsi que les autres intermédiaires financiers tendent à raccourcir légèrement les maturités.
La conséquence de ce constat est qu’un allongement de la maturité des passifs financiers des IFM implique nécessairement une déformation de la structure de l’épargne financière des agents non financiers à long terme puisque les intermédiaires financiers non monétaires ne semblent pas en mesure d’allonger la maturité, puis de réinvestir dans les bilans bancaires, des ressources à court terme collectées auprès d’agents non financiers.
Toutes choses égales par ailleurs, seule une hausse substantielle des taux d’intérêt à long terme serait en mesure d’entraîner une telle modification de la structure par terme de l’épargne financière, en incitant les agents non financiers à renoncer à la liquidité.
– Les études d’impact économique : similitudes de principe, dissonances de méthodologie et de forme
Depuis l’été 2010, l’Institute of International Finance (IIF), la BRI et, plus récemment, l’OCDE ont publié des études d’impact économique de Bâle III, dont les conclusions ont pu paraître, de prime abord, divergentes. Elles s’accordent, peu ou prou, sur les canaux par lesquels transitent les effets de Bâle III sur la sphère réelle – et là est sans doute l’essentiel -, mais leurs méthodologies diffèrent radicalement.
Au sein de la BRI, les travaux relatifs à l’impact macroéconomique de Bâle III ont été conduits par deux groupes de travail distincts. Le Macroeconomic Assessment Group (MAG), associant des experts appartenant aux banques centrales et aux régulateurs de quinze pays ainsi qu’à des institutions internationales (FMI, BRI, FSB), avait pour mission d’évaluer les coûts associés au nouveau dispositif prudentiel durant la période de transition. Le Long-term Economic Impact Working Group se voyait, quant à lui, confier l’évaluation des bénéfices de long terme de la réforme prudentielle, ces derniers étant supposés résider, d’une part, dans la moindre probabilité de crises bancaires et de pertes associées en termes de PIB et, d’autre part, dans la réduction des fluctuations du PIB en dehors des périodes de crise.
Il s’agit tout d’abord d’évaluer la hausse du coût moyen des ressources bancaires consécutive au renforcement des capitaux propres et à l’allongement de la maturité des passifs bancaires qui résulteraient de l’application de Bâle III, cette première étape soulevant implicitement la question de l’applicabilité du théorème de Modigliani-Miller aux banques. Les étapes suivantes consistent à évaluer successivement (IIF) ou simultanément (MAG) l’impact du renchérissement des ressources bancaires sur le taux des prêts bancaires, la baisse des volumes de financement consécutive à leur renchérissement. Cette dernière est, enfin, traduite en termes de croissance économique. Ce résultat, s’il constitue l’aboutissement des études de l’IIF et de l’OCDE, n’est qu’un point d’étape de l’étude de la BRI, qui prend en considération les effets de la plus grande stabilité financière supposée sur la croissance.
Les approches méthodologiques permettant d’évaluer les effets macroéconomiques n’ont, en revanche, que très peu en commun. L’IIF a simulé l’incidence des nouvelles normes sur des bilans bancaires agrégés par grande zone, en modulant les différentes composantes des bilans et du compte de résultat, et utilisé les élasticités qui résultaient de ses propres estimations économétriques. Pour sa part, la BRI s’est dispensée en grande partie de cette étape intermédiaire relative à la structure des bilans bancaires. La hausse des ratios de solvabilité a été directement reliée au coût du crédit, via des élasticités médianes tirées de 97 modèles économétriques portant sur des zones différentes. Pour chaque étape intermédiaire, les experts de la BRI ont retenu comme élasticité entre variables la médiane des élasticités obtenues dans le cadre de modèles empiriques testant une relation comparable.
L’étude d’impact macroéconomique repose sur des enchaînements semblables à ceux retenus par la BRI. Le relèvement des exigences en fonds propres et les nouvelles exigences de liquidités renchérissent les ressources bancaires et conduisent à une hausse des coûts, puis à une baisse des volumes de financements bancaires. L’IFI fait, en outre, l’hypothèse que les banques cherchent à compenser le coût d’opportunité lié à la détention d’actifs liquides (LCR) par un élargissement des marges sur les prêts. Ce qui, enfin, se traduit par un glissement vers le bas du sentier de croissance.
Mais, tandis que l’étude de l’IIF repose sur l’incidence des nouvelles contraintes sur le bilan du système bancaire, la BRI évalue ces effets à partir d’une série de modèles qui conduisent à une grande variété de résultats. La médiane de ces différentes incidences a été retenue.
* Modigliani-Miller est-il extrapolable aux banques ?
Dans quelle mesure la déformation des passifs bancaires inhérente à Bâle III affectera-t-elle le coût moyen des ressources bancaires ? La réponse à cette question renvoie immanquablement au thème de la recevabilité du théorème de Modigliani-Miller pour les banques.
Selon Modigliani et Miller (1963), la valeur de l’actif économique et le coût moyen pondéré du capital employé (WACC ou Weighted Average Cost of Capital) par une entreprise seraient indépendants de son mode de financement (capitaux propres ou endettement). En d’autres termes, il n’existerait pas de structure financière optimale permettant de minimiser le coût moyen pondéré des ressources financières. Ainsi, dans l’hypothèse où l’entreprise s’appuierait sur un moindre levier financier, l’économie de coût du capital résultant de la substitution d’une ressource plus coûteuse (les actions) à une ressource moins onéreuse (la dette) serait exactement compensée par les moindres coûts unitaires de la dette et des fonds propres, dont les taux de rendement exigés diminuent avec le levier.
Cette théorie, qui semble avoir en partie inspiré les ambitions des régulateurs en matière de fonds propres réglementaires, ne vaut que dans le cadre d’un marché parfait et, notamment, en l’absence de fiscalité, de coût de transaction et de défaillance, comme l’ont indiqué les auteurs dans la version corrigée du théorème (Modigliani et Miller (1963)). Miles et alii (2011) de la Banque d’Angleterre développent l’idée de neutralité fiscale, arguant de ce que le supplément de fiscalité supporté par les banques ne diminuerait pas, in fine, le bien-être social puisqu’il alimenterait le budget de l’Etat. L’argument n’est toutefois guère recevable dès lors qu’il ne prend pas en considération les distorsions induites par la fiscalité et le renchérissement des ressources bancaires sur l’activité. En outre, Merton H. Miller (1995) rappelait lui-même que cette théorie ne s’applique qu’à des structures financières ex ante. Le théorème postule qu’une même entreprise, si elle s’appuyait sur une structure de bilan différente, supporterait un coût moyen des ressources identique. Cela ne signifie aucunement que la modification de la structure initiale serait neutre, en particulier si l’entreprise doit lever du capital nouveau sur le marché.
Dans un bref article spécifiquement consacré à la question de la pertinence de la théorie de Modigliani- Miller pour les banques, Merton H. Miller (1995) n’apportait pas de réponse tranchée mais soulevait plusieurs arguments éclairants.
Le prix Nobel d’économie y écrivait, notamment, que les activités bancaires échappaient partiellement aux mécanismes de marché en raison des distorsions introduites par la garantie des dépôts et la réglementation prudentielle. Ainsi, si le coût des dépôts s’établissait à un niveau inférieur à celui qui prévaudrait en l’absence de garantie, les banques chercheraient à minimiser leurs fonds propres jusqu’à la limite inférieure admise par le régulateur ou le marché, ce qui conduirait à une solution « en coin » du type de celle rencontrée dans la version corrigée de Modigliani-Miller (1963). De manière plus générale, rendant hommage à l’économiste et philosophe autrichien, Friedrich Hayek, (1899-1992), Miller soulignait qu’une règle uniforme appliquée à l’ensemble des banques, excessivement pénalisante pour les unes et insuffisamment pour les autres, ne saurait conduire à un monitoring aussi efficace que des contrats privés et qu’elle sera toujours source d’inefficience et de friction. Le même constat vaut, sans doute, quoique dans une moindre mesure, pour des règles plus sophistiquées, lesquelles ne permettront jamais d’apprécier aussi finement le risque intrinsèque d’une banque que des agents placés dans le cadre théorique idéal de Modigliani-Miller (marché efficient). Mais là réside aussi l’argument le plus fragilisé par la crise récente, qui a montré la défaillance du marché comme régulateur.
Merton H. Miller constatait, enfin, que les profils d’activités et de risques présentaient des écarts parfois très importants et difficilement explicables d’une banque à l’autre, ce qui ne permettait de conclure ni en faveur, ni en défaveur, de la thèse de la neutralité de la structure financière. De fait, les auteurs des études d’impact macroéconomique l’accueillent avec circonspection.
L’IIF a fait explicitement l’hypothèse que la théorie de Modigliani-Miller se vérifiait dans une certaine mesure. Ainsi, dans la spécification retenue, tout accroissement (diminution) d’un point de l’écart entre le ratio de solvabilité observé et la cible réglementaire diminue (augmente) d’un demi point de pourcentage le rendement exigé ex ante par le marché. Pour sa part, le MAG s’appuie sur plusieurs travaux empiriques qui concluent à l’effet positif d’une hausse des ratios de solvabilité sur le coût du crédit, ce qui suppose l’absence de neutralité de la structure financière. Pour autant, les experts du groupe de travail se rangent à la proposition de Kashyap (2010)24 qui estime que la seule incidence des exigences en capital et en liquidité serait liée aux effets non appréhendés dans le cadre idéal de MM, notamment l’avantage fiscal de la dette et la prime que les banques doivent payer aux investisseurs pour que ceux-ci acceptent de détenir de la dette de maturité plus longue et moins liquide.
* Des traductions de Bâle III à géométrie variable
Si l’effet de la hausse des ratios de solvabilité constitue un élément incontournable de toutes les études d’impact macroéconomique, les ajustements requis, en termes de hausse des ratios de solvabilité et de fonds propres à constituer, varient sensiblement d’une source à l’autre.
Dans son étude de juin 2010, l’IIF supposait un relèvement du ratio Tier one réglementaire de 4% à 6% en 2012 et l’adjonction de coussins à la discrétion des autorités nationales, qui peuvent être alternativement interprétés comme la marge de sécurité que s’assignent les banques ou comme l’écart entre les exigences implicite de marché et minimale réglementaire. Les levées de fonds propres équivalentes à ces mesures étaient évaluées à 210 milliards (y compris les effets de redéfinitions) pour les banques de la zone euro entre 2009 et 2014. Dans son étude d’impact, le MAG considérait qu’un point de capital supplémentaire se traduisait par 114 milliards d’euros supplémentaires de fonds propres. La distance de 1,3 point entre les ratios des banques de l’Union européenne en définition Bâle III (2019) à la fin de 2009 (5,7% d’après les études d’impact quantitatif) et le seuil réglementaire (7%) est donc équivalente, à bilan constant, à 148 milliards d’euros de fonds propres. Pour sa part, l’OCDE considère que les banques de la zone euro devront accroître leurs ratios Common equity de 3,8 points (+3,7 points pour les banques du G3), sans transcrire cette évolution en montant.
Contrairement aux exigences de solvabilité, les contraintes de liquidités sont tantôt ignorées (OCDE), tantôt prises en compte de manière plus (IIF) ou moins (MAG) complète. Les travaux de l’IIF de juin 2010 reposaient sur l’hypothèse que le liquidity coverage ratio et le net stable funding ratio seraient contraignants dès 2012, ce qui ne sera finalement pas le cas. Toutefois, si le Ratio NSFR était supposé quasiment respecté, en moyenne, aux Etats-Unis, il ne l’était jamais en zone euro, le montant des ressources longues à lever se heurtant à la capacité d’absorption du marché obligataire. Après avoir atteint un pic en 2013 (75,5%), le ratio NSFR refluerait progressivement jusqu’en 2020 (67%, un niveau identique à celui – simulé – de 2011).
Dans les travaux conduits au sein de la BRI le proxy utilisé pour simuler les nouvelles exigences de liquidité n’a pas eu toujours la même signification. Dans la première étude d’impact macroéconomique par le MAG (2010a) d’août 2010, les hausses de 25 points et 50 points du ratio des actifs liquides au total des actifs bancaires délimitaient initialement la fourchette des effets équivalents de l’application conjuguée des ratios LCR et NSFR. Mais des travaux ultérieurs conduits au sein de la BRI (cf. King (2010)) ont ensuite suggéré qu’une telle fourchette donnait plutôt une mesure des effets du seul ratio NSFR, modulés en fonction des différentes hypothèses d’interaction avec le ratio de solvabilité. Il ressort donc de ces ultimes développe- ments que les résultats de l’étude d’impact de la BRI ignorent finalement l’incidence macroéconomique du ratio de liquidité à court terme.
Alors que les effets des normes de solvabilité ont été réévalués entre le rapport publié en août 2010 et le final report de décembre 2010, le MAG (2010b) a conservé en l’état l’analyse d’impact des normes de liquidité, qui cristallisent pourtant une grande partie des inquiétudes de la profession bancaire, arguant de l’existence de périodes d’observation (le LCR sera introduit en 2015 et le NSFR en 2018).
* Des marges bancaires aux volumes de crédit
Les impacts obtenus en termes de marges d’intérêts et de variation des encours de crédit reposent sur des hypothèses qui diffèrent d’une étude à l’autre et rendent leur comparaison malaisée. La distinction opérée par le MAG entre les incidences du renforcement des exigences de solvabilité et de l’introduction de contraintes de liquidité autorise, néanmoins, une comparaison avec l’étude de l’OCDE, exclusivement consacrée à l’analyse d’impact du volet solvabilité de Bâle III. Elle ne permet pas, en revanche, de rapprocher directement les résultats de l’étude MAG avec ceux de l’IIF qui visent à apprécier l’impact global de la réforme prudentielle, sans distinguo entre liquidité et solvabilité.
Le MAG étudie, dans une première étape, les incidences d’une hausse d’un point des ratios de solvabilité sur les volumes de prêts, d’une part, et sur les spreads, d’autre part. Les résultats retenus dans le rapport final sont, pour la première relation, la médiane non pondérée de 38 modèles différents et, pour la seconde, celle de 53 modèles. Les incidences obtenues sont une contraction des encours de prêts de 1,4% après environ 9 ans25, au regard de l’encours qui serait observé en l’absence de réforme (dans l’hypothèse d’un relèvement de l’exigence étalé sur 8 ans) et un élargissement des spreads de 15,5 points au même horizon. Même si les périmètres géographiques ne se recoupent que partiellement, les résultats du MAG apparaissent cohérents avec ceux de l’OCDE, selon lesquels la hausse des spreads bancaires consécutive à une augmentation de 1 point des ratios de solvabilité bancaire serait de 16,1 points en moyenne26 pondérée par les PIB au sein des pays du G327.
L’analyse du MAG porte indistinctement sur l’ensemble du périmètre géographique et aucune ventilation par zone n’est donc disponible. Les conclusions des modèles de la Fed et de la BCE sont simplement fournies à titre d’exemple. L’incidence d’une hausse d’un point des ratios de solvabilité sur les marges bancaires évaluée par la BCE (+28 points) – à l’aide d’un un modèle portant sur les vingt plus importants groupes bancaires de la zone euro – apparaît supérieure à l’effet sur les taux des prêts mesuré par Slovik et Cournède (2011) ou par Cosimano et Hakura (2011) dans les trois pays de la zone euro couverts par leur analyse 28 . La médiane d’impact unitaire issue des modèles n’a ensuite été contextualisée qu’à la lumière des résultats des études d’impact quantitatif dans le rapport final de décembre 2010. Les experts du MAG considèrent que, partant d’un niveau initial moyen de 5,7% en décembre 2009 selon les nouvelles normes, le système bancaire mondial devra élever son ratio Common equity Tier 1 de 1,3 point pour atteindre le seuil réglementaire requis (7%). Sous l’hypothèse d’une linéarité des effets obtenus, la baisse de l’encours de prêt et l’élargisse- ment des marges d’intérêt qui résulteraient du seul volet solvabilité de Bâle III seraient de respectivement 1,82% et +20,15 points.
Le MAG a, dans le même temps, résumé les exigences de liquidité à une hausse de 25% du ratio des actifs liquides au total des actifs29. Leur incidence est d’abord évaluée en termes de volumes de crédit (-3,2% après huit ans) et de spreads (+14,1 points après huit ans pour une application étalée sur quatre ans) en retenant la médiane de nombreux modèles empiriques. Une hausse de 50 points de base du ratio des actifs liquides au total des actifs (NSFR sans interaction) conduirait à un élargissement de 25 points de base des marges de crédit et à une perte de PIB de 0,15% en régime permanent. La prise en compte des « synergies » 30 entre contrainte de capital et NSFR permettrait de limiter la hausse équivalente du ratio des actifs liquides aux actifs bancaires à 25 points, celle des marges de crédit à 14 points de base et la perte de PIB qui en découlerait à 0,08%.
Même s’il convient de garder à l’esprit que les différents impacts propres à chaque volet obtenus par la BRI ne sont pas additifs, leur somme a, néanmoins, le mérite d’offrir une approximation susceptible d’être rapprochée de l’impact cumulé obtenu par l’IIF. Ainsi, pour reprendre l’analyse de la BCE précitée, des hausses de deux points des ratios de solvabilité, de 25% du ratio des actifs liquides au total des actifs, et l’instauration du NSFR élargiraient les marges bancaires de respectivement 5631, 15 et entre 57 et 71 points de base. Le point milieu de la fourchette d’impact total qui en découle (135 points de base) est remarquablement proche de l’incidence obtenue par l’IIF sur le taux réel des prêts bancaires (137 points) cinq ans après le début d’application de la réforme (soit 2015 dans le rapport provisoire de juin 2010).
* Les incidences sur le PIB : le grand écart
Si les impacts unitaires d’une hausse des ratios de solvabilité, voire même globaux pour des hypothèses harmonisées, sur les spreads bancaires peuvent être, peu ou prou, réconciliés entre les différentes études d’impact macroéconomique, les incidences estimées de Bâle III sur le PIB diffèrent, néanmoins, fortement. Les origines des écarts sont à la fois importantes et multiples.
La BRI se limite à évaluer, d’une part, les incidences des volets solvabilité et liquidité de Bâle III isolément l’une de l’autre et, d’autre part, ne propose pas d’incidence globale en raison des synergies entre contraintes. Même perfectible, l’addition des effets estimés présente, néanmoins, à notre sens, l’intérêt d’offrir un ordre de grandeur de l’incidence globale qui découlerait de l’étude d’impact du MAG. Ainsi, à un horizon temporel comparable (soit 32 ou 35 trimestres), les incidences additionnées suggèrent une perte d’environ 5% de l’encours des prêts (-1,8-3,2), un élargissement de 34,2 points des spreads et, enfin, une perte de 0,35% de PIB à comparer à l’effet cumulé de -3,1% pour l’IIF, neuf ans après l’introduction des nouvelles exigences.
La dispersion des hypothèses de base concernant les ajustements requis en termes de capitaux propres et la prise en compte, ou non, de manière partielle, des exigences de liquidité ont été déjà abondamment soulignées.
Ensuite, le calendrier envisagé par l’IIF, avant que le calendrier définitif ne soit connu, était plus court que celui finalement recommandé par le Comité de Bâle, ce qui a pu contribuer à une surestimation de l’impact économique.
Surtout, les méthodologies utilisées pour mesurer l’impact de l’élargissement des spreads et/ou de la contraction des volumes de crédit sur le niveau du PIB s’opposent radicalement. Tandis que le MAG réinjecte les impacts obtenus en termes de volumes de crédit et de spreads bancaires dans 97 modèles DGSE (dynamic stochastic general equilibrium) ou semi-structurels (dont les spécifications varient, et avec une représentativité des pays qui ne reflète pas fidèlement leur poids économique) dont il retient le résultat médian, l’IIF s’appuie sur un modèle propre par grande zone économique (Etats-Unis, zone euro, Japon) mais dont les relations et la structure sont rigoureusement identiques.
De surcroît, si les périmètres des travaux de l’OCDE et de l’IIF sont communs (pays du G3), les 97 modèles auxquels la BRI a recours dans son Final Report couvrent neuf pays qui n’entrent pas dans le champ des deux premières études32, de sorte que le périmètre de l’étude de l’IIF ne représente que 63% de celui de la BRI. La zone euro appréhendée dans son ensemble et cinq pays membres font l’objet de 44 modèles sur un total de 97. Le nombre de modèles s’élève à 11 pour les Etats-Unis et à 6 pour le Japon.
Enfin, la BRI endogénéise la politique monétaire, via une règle de Taylor, ce qui tend à compenser les effets restrictifs de Bâle III sur la création monétaire et à minimiser significativement l’incidence calculée sur l’activité économique.
* L’évaluation controversée des bénéfices d’une plus grande stabilité financière
Au-delà de l’évaluation des coûts économiques au cours de la période de transition confiée au MAG, le BCBS a confié l’appréciation des effets économiques à long terme de la réforme à un second groupe de travail (LEI – Long-term Economic Impact). Dans le cadre d’une approche de type coûts-avantages, celui-ci a repris, d’une part, les résultats du MAG et a évalué, d’autre part, les bénéfices de la réforme appréhendés comme la réduction de l’espérance mathématique de perte de PIB associée à des crises financières. Le groupe LEI a évalué, par exemple, qu’une hausse de 7% à 10% des ratios de fonds propres ordinaires aux actifs réduirait la probabilité d’une crise bancaire systémique d’environ 3%. Celle-ci diminuerait de la sorte de 4,6% à 1,4% (exigence de solvabilité seulement) voire à 1,2% (respect du NSFR en sus). Le produit de la baisse de probabilité annuelle de crise ainsi obtenue et du coût médian d’une crise financière a long terme (63% du PIB en cumul) donne l’espérance mathématique de la perte annuelle de PIB évitée. Le LEI assimile ensuite, de manière discutable, cette dernière à des points de croissance annuelle supplémentaires. Au total, pour un ratio de solvabilité (actions ordinaires) qui augmenterait de 7% à 10%, les experts du LEI évaluent les bénéfices de la réforme entre 1,98% et 2,10% du PIB par an dans l’hypothèse centrale33, selon que les exigences de liquidité sont, ou non, respectées.
Dans le même temps, les mêmes dispositions réglementaires sont supposées réduire de 0,27% à 0,35% seulement le taux de croissance annuel. Le bénéfice net à long terme résultant de ces calculs est compris entre 1,71% et 1,75%.
Si les bénéfices inhérents à une plus grande stabilité financière ne font strictement aucun doute, l’évaluation de la contribution de la réforme prudentielle à la stabilité financière suscite d’importantes réserves d’ordre méthodologique.
Au sein de la littérature empirique, l’approche la plus fréquente privilégie les équations de type logit 34 reliant la fréquence des crises financières au sein d’un échantillon de pays et sur une période donnée aux ratios de levier et de liquidité bancaires. La principale critique adressée à ces études porte sur la diversité des crises prises en considération, quelle que soit leur cause première. Or il était peu vraisemblable que des crises de change, ou liées à une politique monétaire inadaptée et qui ont dégénéré en crises bancaires, eussent vu leurs probabilités réduites par le renforcement du cadre prudentiel. Une telle approche semble, au demeurant, en totale contradiction avec l’hypothèse selon laquelle la politique monétaire tendrait à compenser les effets restrictifs de la réglementation prudentielle retenue par le MAG dans l’étude d’impact de la BRI relative à la transition.
En outre, selon les calculs de Laeven et Valencia (2008, 2010), le tribut est souvent beaucoup plus lourd, entre le début et la fin de la crise pour les pays émergents. Dès lors, leur inclusion accroît très significativement la perte médiane de PIB et tend, en conséquence, à surévaluer significativement les bénéfices associés à la moindre probabilité des crises financières pour les économies développées. Par ailleurs, les auteurs du LEI émettent l’idée que le coût moyen des crises financières serait diminué par la mise en place d’une réglementation prudentielle adaptée. La fragilité des résultats empiriques obtenus35 les conduit, néanmoins, à rejeter cette hypothèse et à considérer, à l’instar de la plupart des auteurs, que le coût associé à une crise est exogène.
Contrairement aux recommandations bâloises qui l’ont précédée (Bâle I et Bâle II), la réforme prudentielle Bâle III intervient en réponse à une crise financière plus sévère encore que celle de 1929. Ce caractère endogène renforçait naturellement le risque d’une sur- réaction du G20 et du régulateur. Les résultats des études d’impact quantitatif sont tels qu’une application in extenso de Bâle III conduirait à l’évidence à une plus grande stabilité du système bancaire. Pour autant, la lecture des bénéfices économiques de la réforme proposée par la BRI ne convainc pas. Au demeurant, stabilité du système bancaire ne rime avec stabilité financière qu’autant que le champ de la régulation limite les possibilités d’arbitrage entre sphères régulée et non régulée.
Les principaux motifs d’inquiétude tiennent aux coûts économiques qui pourraient être associés à la réforme. Les résultats des études d’impact macroéconomique sont plutôt à considérer comme des minima, compte tenu des dispositions non prises en compte (taxes bancaires, surcouches au titre des banques à caractère systémique). Ensuite, l’absence de norme internationale contraignante de liquidité interdit d’en apprécier les effets de manière satisfaisante.
Selon les données utilisées par la BRI, un délai médian d’une vingtaine d’années s’écoule entre deux crises. La période d’observation gagnerait, en conséquence, à être mise à profit pour mieux appréhender les interactions entre contraintes de solvabilité et exigences de liquidité. A supposer qu’il existe un certain degré de substituabilité, un calibrage moins pénalisant de ces dernières permettrait de mieux préserver le financement de l’économie et la souplesse des modèles bancaires et ce, sans préjudice de la stabilité financière.
NOTES
1 Le paquet dit « Bâle III » est constitué de trois documents du Comité de Bâle traitant respectivement des nouvelles normes de solvabilité (BCBS 189, décembre 2010), de liquidité (BCBS 188, décembre 2010) et de l’absorption des pertes lorsque l’établissement n’est plus viable (annexe au BCBS 189, janvier 2011).
2 European Banking Authority
3 Les instruments hybrides, pour être reconnus comme des fonds propres de base, doivent remplir les critères relatifs à l'absorption des pertes, à la souplesse des paiements et à la permanence. Ces critères ont été approuvés au niveau du G10 et annoncés dans le communiqué de presse de Sydney du 27 octobre 1998. http://www.bis.org/press/p981027.htm11
4 Situées en dehors du périmètre de consolidation réglementaire.
5 Les recommandations de juillet 2009, modifiant le traitement prudentiel des risques de marché, ont été révisées en décembre 2010 pour tenir compte des modifications annoncées par le Comité de Bâle dans son communiqué de presse du 18 juin 2010. Cf. BCBS (2011).
6 La Value at Risk mesure le risque de perte maximale ex ante pour une probabilité et un horizon temporel donnés.
7 La date de mise en œuvre initialement prévue dans le document de juillet 2009, qui était le 31 décembre 2010, a été reportée d’un an.
8 Cf. BCBS (2010a), version révisée de juin 2011, page 36.
9 Cf. communiqué de presse du Comité de Bâle du 1er juin 2011 « Basel Committee finalises capital treatment for bilateral counterparty credit risk ».
10 Les banques du groupe 1 (94 banques au total dont 91 ont fourni des informations) présentent un excédent de fonds propres Tier one supérieur à 3 milliards d’euros, sont diversifiées et internationalement actives. Les autres banques appartiennent au groupe 2.
11 Common equity Tier 1 net des déductions Bâle III, rapporté aux actifs pondérés calculés selon la nouvelle norme.
12 Common equity Tier 1 (avant toute déduction) rapporté aux actifs pondérés calculés selon l’ancienne norme.
13 Note minimale requise pour bénéficier d’une pondération à 0% dans l’approche standard de Bâle II.
14 Notes correspondent à une pondération de 20% dans l’approche standard de Bâle II.
15 Contrairement aux besoins en fonds propres, les besoins inhérents aux nouvelles normes de liquidité n’ont pas fait l’objet d’une ventilation par taille de banques (groupe 1, groupe 2).
16 Un dépôt est qualifié de « moins stable » lorsqu’il n’est pas couvert par un dispositif d’assurance (montant important excédant la limite de garantie) mais aussi, et selon les règles établies par le superviseur national, lorsqu’il est susceptible de faire l’objet d’un retrait rapide (internet) ou qu’il est libellé en devises.
17 La condition nécessaire pour qu’un dépôt soit stable au sens bâlois est qu’il soit couvert par un dispositif d’assurance des dépôts. Il faut, en outre, soit que le déposant entretienne d’autres relations avec la banque, qui rendent peu probable un retrait massif, soit que ledit dépôt constitue un compte de transaction sur lequel les salaires sont automatiquement versés (BCBS, « Basel III : International Framework for liquidity risk » (…), décembre 2010, paragraphe 56, p.13).
18 Required Stable Funding
19 Cette condition sur la nature non financière de l’émetteur ne s’applique toutefois pas aux covered bonds.
20 En économie ouverte, il convient d’ajouter au crédit les avoirs extérieurs nets.
21 Les crédits font certes les dépôts, mais, lorsqu’ils sont à plus d’un an, les premiers augmentent le dénominateur du NSFR de leur montant tandis que les dépôts créés au sein du système bancaire n’augmentent le numérateur que dans une mesure comprise entre 50% (ex : dépôts de corporates non financières) et 90% (dépôts « stables » de la clientèle de banque de détail) de leur montant. Il en résulterait donc une baisse du NSFR.
22 Par exemple, “These metrics (…) provide the cornerstone of information that aid supervisors in assessing the liquidity risk of a bank”. BCBS 188, décembre 2010, paragraphe 138, page 31.
23 Cf. FMI (2011a), encadré 2.1 page 9.
24 Cf. MAG (2010a), page 30.
25 35 trimestres.
26 Pondérée par les PIB.
27 +20,5 points aux Etats-Unis, +14,3 points dans la zone euro, +8,4 points au Japon.
28 Slovik et Cournède (2011) évaluent l’impact d’une hausse d’un point du ratio de solvabilité moyen à+14,3 points supplémentaires de marge d’intérêts. La même cause aurait des effets sur les taux débiteurs estimés à +11,6 points en Allemagne, +8,1 points en Grèce et+ 21,6 points en Irlande d’après Cosimano et Hakura (2011).
29 Cf. Final Report, Assessing the Macroeconomic Impact of the transition to stronger capital and liquidity requirements, Macroeconomic Assessment Group, décembre 2010, p.2.
30 L’augmentation des actifs liquides pour atteindre un ratio de liquidité plus élevé, ceteris paribus, entraîne une substitution d’actifs peu risqués à des actifs risqués au sens Bâlois et donc une diminution des risk weighted assets, qui permet aux banques de respecter plus facilement la contrainte de solvabilité.
31 Selon les travaux de la BCE, l’incidence d’une hausse de 1 point des ratios de solvabilité implique une augmentation des spreads de 28 points. Sous l’hypothèse d’une linéarité des effets, l’incidence serait de 56 points pour une élévation des ratios de solvabilité de deux points.
32 Le nombre de modèles est mentionné entre parenthèses : Australie (3), Brésil (5), Canada (8), Chine (2), Inde (2), Corée (6), Mexique (3), Russie (2), Royaume-Uni (5).
33 L’hypothèse centrale est celle d’une perte médiane cumulée de PIB à long terme atteignant 63% de son niveau d’avant crise (effets permanents modérés). Les extrêmes sont 19% (aucun effet permanent) et 158% (effets permanents importants).
34 Un modèle logit est une régression portant sur la probabilité qu'un évènement se réalise. 35 Cf. LEI (2010), page 17.
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