par Pierre Carpentier, Directeur des gestions chez Dubly Transatlantique Gestion, groupe Banque Transatlantique
Sans surprise, la BCE a réduit ce jeudi son taux directeur de 25 centimes pour le porter à 2,50%. Au cours des trois derniers trimestres, elle aura réduit celui-ci de près de 200points de base en procédant à 6 coupes consécutives. Ce mouvement pourrait cependant rapidement clore le cycle accommodant démarré en juin dernier.
La politique de Trump rebat en effet les cartes sur les marchés internationaux de la dette souveraine. Le programme économique du 47èmePrésident des Etats-Unis n’est pas sans conséquence sur la stabilité des prix des biens et des services. Ses deux principaux piliers que sont le protectionnisme économiqued’une part et la politique migratoire restrictive de l’autre viennent attiser les braises inflationnistes outre-Atlantique. Le dérapage de l’indice CPI publié le 12 février dernier illustre parfaitement ce constat.
Dans le même temps, les bouleversements géopolitiques en cours contraignent les Européens à revoir intégralement leur politique de défense et à renforcer le budget de leurs dépenses militaires. En parallèle, le marasme économique auquel l’Allemagne est aujourd’hui confrontée conduit les trois grandes forces politiques que sont la CDU/CSU et le SPD à s’accorder sur un vaste programme de relance budgétaire évalué à près de 500 milliards d’euros dans le cadre de la refonte d’une nouvelle coalition gouvernementale.
Ce cocktail particulièrement détonnant entraîne les taux longs sur une hausse vertigineuse. Les taux souverains à 10 ans des Etats membres de la zone Euro progressaient ce mercredi de près de 20 points de base, soit la plus forte hausse constaté depuis la revirement monétaire restrictif enclenché en 2022 pour précisément endiguer la vague inflationniste à cette époque. Le réarmement du Vieux-Continent, associé à la relance budgétaire allemande, alimentent la possibilité d’une remontée rapide des taux d’intérêt. Dans ce contexte, la BCE doit reconsidérer sa feuille de route. Sur le front des devises, la flambée de l’Euro face au dollar valide ce changement de paradigme.