par Franck Dixmier, Global CIO Fixed Income chez Allianz Global Investors
• Les investisseurs attendent de pied ferme le discours de la Banque centrale européenne du 10 juin sur deux points : ses nouvelles prévisions économiques, et notamment son analyse de la hausse de l’inflation, et sa décision de réviser ou non le rythme de ses achats de titres, comme annoncé en avril. • Dans un contexte de crise sanitaire encore fragile et de resserrement des conditions financières en zone euro, nous estimons que la BCE devrait annoncer le maintien de ses achats d’obligations à un rythme élevé pour les 3 prochains mois. • Ce message dovish devrait soutenir les marchés obligataires en zone euro, qui ont depuis longtemps largement intégré dans leurs anticipations le caractère quasi permanent de la présence de la BCE dans les marchés. Lors de sa prochaine réunion de politique monétaire du 10 juin, la Banque centrale européenne (BCE) présentera ses nouvelles prévisions économiques. Les investisseurs seront particulièrement attentifs à son analyse de la hausse de l’inflation, qui a surpris. Portés par une augmentation des prix de l’énergie de 13,1% sur un an, les prix en zone euro ont progressé de 2% en mai (estimation provisoire) atteignant pour la 1ère fois depuis 2018 la cible de la BCE (qui mesure l’inflation totale, à la différence de la Réserve fédérale américaine qui se concentre elle sur le déflateur des prix à la consommation corePCE). Lors des dernières prévisions présentées en mars, un tel niveau n’était attendu qu’au 4ème trimestre de cette année. Toutefois, la composante sous-jacente -hors alimentation et énergie- n’a progressé que de 0,9%. Nous estimons que Christine Lagarde devrait de nouveau insister sur le caractère temporaire du pic récent, comme répété à de nombreuses reprises par les membres de la BCE, car essentiellement porté par le rebond des prix de l’énergie. Il faut noter que la difficulté pour la banque centrale d’atteindre son objectif unique d’inflation est parfaitement intégrée dans les anticipations de marché, avec une inflation anticipée sur un an en dessous du seuil de 2%…sur les 30 prochaines années. La BCE est également très attendue sur le rythme des achats de titres dans le cadre du PEPP (Pandemic Emergency Purchase Programme). Dans un contexte de tension sur les taux long terme au 1er trimestre, la BCE avait surpris en prenant la décision d’accélérer ses achats en mars ; en avril, elle avait annoncé son intention d’en revoir en juin le rythme, en se basant sur l’analyse de l’évolution des conditions financières et des perspectives d’inflation en cette fin de premier semestre. Les mouvements de marchés des derniers mois -hausse des taux long terme, élargissement des spreads et progression de l’euro (en hausse de 4% contre le dollar américain depuis mars) indiquent un resserrement des conditions financières en zone euro. La BCE ne peut l’ignorer. Certes, ce resserrement -comme indiqué récemment par des officiels de la banque centrale- reflète une amélioration de l’économie dans la zone, à la fois portée par l’accélération de la demande en provenance de l’étranger et, d’un point de vue domestique, par l’accélération de la vaccination. Néanmoins, dans un contexte sanitaire encore fragile, avec la menace de variants plus contagieux qui n’autorisent qu’une sortie graduelle des mesures de restriction sanitaire, il est probable que les colombes l’emportent sur les faucons avec la prorogation d’un rythme d’achats significativement supérieur pour les 3 prochains mois. Les perspectives de « tapering », c’est-à-dire de modération des achats, ne nous semblent pas d’actualité. Ce message dovish devrait soutenir les marchés obligataires en Zone Euro, qui ont depuis longtemps largement intégré dans leurs anticipations le caractère quasi permanent de la présence de la BCE dans les marchés. |