par Bei Xu, économiste chez Natixis
Le marché boursier chinois était resté inaccessible aux investisseurs étrangers pendant une dizaine d’années. Ce n’est qu’à partir de 2003 que les investisseurs habilités (QFII, Qualified Foreign Institutional Investors) ont pu acheter et vendre des titres cotés en Chine mainland.
Au début, ces QFIIs n’étaient qu’une dizaine (en 2003) et n’ont augmenté qu’à un rythme de 12 par an jusqu’en 2011. Le total de leurs quotas alloués pour investir en Chine était seulement de 1,7 milliards de dollars en 2003 et grimpait d’environ 2,4 milliards de dollars par an pour arriver à 21,6 milliards en fin 2011. Ce qui était très peu car l’ensemble des investisseurs étrangers autorisés à investir en Chine n’a accès qu’à 0,6% de la capitalisation boursière du marché action de la Chine mainland.
Il y a eu récemment une accélération de l’ouverture des marchés financiers chinois aux investisseurs étrangers, notamment grâce aux nombreuses accréditations. En 2012, 58 investisseurs institutionnels se sont vu accorder le statut de QFII et le montant total que les QFIIs peuvent convertir en RMB pour ensuite investir en Chine est passé de 21,6 milliards à 37,4 milliards de dollars, soit une hausse de 15,8 milliards sans précédent.
D’après la version la plus récente de la réglementation des QFIIs, ces derniers peuvent investir dans les instruments financiers suivants : actions, obligations et warrants cotés sur les marchés de Shanghai et Shenzhen ; contrat à terme indiciel; fonds d’investissement; obligations échangées sur le marché interbancaire. Lorsqu’il ne s’agit pas d’un investissement stratégique au sein d’une entreprise cotée, un QFII ne peut détenir à lui seul plus de 10% d’actions d’une entreprise, et la détention d’actions A (A shares) par les QFIIs d’une entreprise cotée ne doit pas dépasser 30% du total.
La récente déclaration du régulateur de la bourse chinoise Guo Shuqing datant de mi-janvier 2013 a été aussi bien accueillie par le marché domestique que par les investisseurs étrangers. Selon lui, les quotas des QFIIs peuvent être multipliés par 10. Cet objectif dont le timing n’est pas encore explicitement défini ne fait que confirmer l’accélération récente de l’accès des marchés financiers domestiques aux étrangers. Il s’inscrit toujours dans une approche graduelle de l’ouverture des marchés : d’une part, l’accélération récente constitue certes un pas un peu plus grand vers l’ouverture mais d’autre part, même si l’objectif de multiplier les quotas des QFIIs par 10 est atteint, leur présence ne représentera qu’au mieux quelques points de pourcentage du marché financier chinois.
L’ouverture des marchés financiers aux investisseurs étrangers doit aussi se lire avec la réforme de la convertibilité de la monnaie chinoise. Tant qu’il n’y a pas de parfaite convertibilité du RMB, il ne peut pas y avoir de vraie ouverture des marchés financiers. Un groupe de travail de la PBoC (la banque centrale de Chine) a publié une étude en 2012 montrant que les conditions préalables à l’ouverture du compte de capital sont globalement réunies et propose une feuille de route de la libéralisation du compte de capital en trois étapes :
A court terme (1-3 ans), alléger le contrôle de l’investissement réel à l’étranger (outward direct investment) et encourager les entreprises à investir à l’étranger.
A moyen terme (3-5ans), réduire le contrôle des crédits commerciaux et favoriser l’internationalisation du RMB.
A long terme (5-10 ans), développer le marché financier domestique, libéraliser les flux entrants puis les flux sortants, ouvrir avec prudence les transactions de produits dans l’ordre suivant : actifs immobiliers, actions et enfin obligations, et remplacer progressivement le contrôle par les outils quantitatifs par la gestion par les prix.
Une fois ces trois étapes mises en œuvre, la Chine aura presque réalisé l’ouverture du compte de capital. Les postes restants comme les transactions de capital des ménages, les crédits des institutions financières non liés aux transactions de capital, les instruments monétaires, les titres d’investissement collectif, les cautions et la garantie ou autres facilités de financement et les produits dérivés pourront être libéralisés en fonction des conditions du moment. Les transactions de devise n’ayant pas de lien avec les transactions de capital seront les dernières à être libéralisées, tandis que les dettes de court terme très spéculatives peuvent rester non libéralisées pendant longtemps.