par Christine Peltier, Économiste chez BNP-Paribas
Les indicateurs conjoncturels pour le mois d’août 2024 attestent une nouvelle fois du manque de vigueur de la croissance économique chinoise. L’objectif de croissance de « 5% environ » fixé par Pékin pour 2024 ne pourra être atteint que grâce à une plus forte impulsion donnée par les mesures d’assouplissement monétaire et d’expansion budgétaire.
La croissance de la production industrielle a encore ralenti en août, atteignant 4,5% en g.a. (contre 5,1% en juillet) et s’établissant à 5,8% en g.a. sur les huit premiers mois de 2024. Elle a été principalement freinée par la contraction dans des industries lourdes telles que l’acier et le ciment. En revanche, la production de biens électroniques a continué d’afficher des gains très solides, tirée par la hausse rapide des exportations (dont le total en valeur a augmenté de 8,7% en g.a. en août). Soutenue par la politique industrielle agressive des autorités, les perspectives de croissance du secteur manufacturier exportateur restent bonnes à très court terme. Elles pourraient ensuite s’assombrir en raison des mesures protectionnistes introduites à l’encontre de la Chine par un nombre croissant de pays développés et émergents.
Dans le secteur des services, qui dépendent très largement de la demande intérieure, l’activité a également perdu en vigueur (+4,6% en g.a. en août et +4,9% en g.a. sur les huit premiers mois de 2024). La consommation des ménages et l’investissement privé restent déprimés. La crise du secteur immobilier se poursuit, et les mesures de soutien mises en œuvre au printemps dernier n’ont pas réussi à relancer la demande de logements (les surfaces vendues ont chuté de 13% en g.a. en août). Une majorité de promoteurs immobiliers font toujours face à d’importants problèmes de solvabilité ou de liquidité.
Les conditions dégradées sur le marché du travail s’ajoutent à la crise immobilière, ce qui pèse lourdement sur le moral et les dépenses des ménages. La croissance des ventes au détail a de nouveau ralenti en août, pour s’établir à seulement +2,1% en g.a. en valeur.
Les pressions déflationnistes persistent, entretenues par la faiblesse de la demande intérieure et les surcapacités de production, la chute des prix immobiliers, la moindre progression des salaires, et le recul des cours mondiaux des matières premières. En août, l’indice des prix à la consommation a augmenté de 0,6% en g.a., mais l’inflation sous-jacente a atteint un point bas de 0,3% et l’indice des prix à la production était en baisse (-1,8% en g.a.) pour le 23e mois consécutif.
En dépit de la morosité de la demande intérieure, de la faiblesse de l’inflation et du ralentissement continu de la croissance du crédit, les autorités gardent le cap d’un assouplissement monétaire prudent. Elles ont annoncé le 20 septembre qu’elles laissaient leurs principaux taux directeurs inchangés (les dernières baisses de taux datent de juillet). L’assouplissement monétaire aux États-Unis devrait accroître la marge de manœuvre de la banque centrale chinoise en réduisant les pressions sur les comptes externes et le yuan. Mais la banque centrale a d’autres contraintes ; elle cherche notamment à limiter la baisse des taux longs obligataires et à préserver la profitabilité des banques commerciales.