par Hélène Baudchon et Laure Nguyen, économistes au Crédit Agricole
- Ralentissement marqué des créations d’emplois en mai (+54 000) et nouvelle petite hausse du taux de chômage à 9,1%.
- Lourde chute en mai à 53,5 de l’enquête ISM sur le climat des affaires dans le secteur manufacturier.
- Rechute en mai à 60,8 de l’enquête de confiance des ménages du Conference Board.
Le rapport sur l’emploi du mois de mai contient surtout des mauvaises nouvelles, qui étaient attendues, et quelques bonnes surprises, qui ne l’étaient pas. Parmi les premières, il y a bien sûr les très faibles créations nettes d’emplois salariés non agricoles (54 000), la révision en baisse des créations d’emplois en mars et avril, et la (nouvelle petite) hausse du taux de chômage à 9,1%. Ces chiffres ne font qu’allonger la liste des signes de ralentissement de l’activité. Si le choc pétrolier a sa part de responsabilité et continuera de peser encore quelque temps sur la croissance, une bonne part de ce ralentissement semble bien temporaire à en juger un certain nombre de détails. L’emploi dans le secteur manufacturier a ainsi certainement souffert des problèmes de production liés au Japon. La non-augmentation des destructions nettes dans l’intérim ou encore la hausse de la durée hebdomadaire du travail dans le secteur manufacturier (indicateur avancé réputé) peuvent aussi être le signe que le pire de l’ajustement a eu lieu. L’augmentation de 0,3% sur le mois du salaire horaire nominal est un autre élément positif notable.
L’enquête ISM sur le climat des affaires dans le secteur manufacturier au mois de mai a chuté de 60,4 à 53,5, accusant une baisse d’une ampleur rarement observée. Celle-ci résulte d’un recul de l’ensemble des composantes, avec en tête la production (de 63,8 à 54), les stocks (de 53,6 à 48,7) et, plus inquiétant encore, les nouvelles commandes (de 61,7 à 51), ce qui n’est pas du tout de bon augure pour la suite des évènements. Les problèmes d’approvisionnement liés au Japon contribuent certainement à ces mauvais chiffres. Mais l’enquête suggère aussi une crainte plus profonde des entreprises, celle d’un recul plus prononcé que celui déjà observé des dépenses des ménages face à la montée des prix de l’énergie. Cette crainte ne se limite d’ailleurs pas à la demande intérieure, la composante ‘nouvelles commandes à l’exportation’ accusant également un net recul (de 62 à 55). On est tenté de penser, à ce stade, que cette crainte est en partie exagérée, mais en partie seulement : l’inconfort face à ces chiffres est réel. Dans ces conditions, la baisse de la composante ‘prix’ (de 85,5 à 76,5) est bienvenue et le maintien de la composante ‘emploi’ (malgré sa baisse de 62,7 à 58,2) à des niveaux historiquement élevés, un lot de consolation acceptable.
L’enquête de confiance des consommateurs du Conference Board a rechuté au mois de mai, atteignant son plus bas niveau depuis novembre dernier. La baisse, de 66 à 60,8, a été entraînée par une forte dégradation des anticipations (-8 points), tandis que le jugement sur la situation présente s’est bien moins dégradé (-0,9 point). Le moral des ménages est mis à rude épreuve : ralentissement des créations d’emplois, chômage élevé, marchés boursiers à la peine, baisse des prix immobiliers, le tout sur fond de hausse de l’essence et des prix alimentaires. Il y a néanmoins matière à positiver dans la mesure où, le plus probable, est que ces soucis restent temporaires. Par ailleurs, l’enquête de confiance de l’Université du Michigan s’est, elle, inscrite en nette hausse en mai (+ 4,5 points), portée par des anticipations plus favorables. Au final, l’image qui reste est néanmoins celle d’une confiance des ménages ébranlée et volatile à en juger son redressement plus que laborieux depuis des niveaux historiquement déprimés.