par Laurent Berrebi, directeur des études économiques de Groupama Asset Management
Selon l’estimation préliminaire, la croissance a été de 5,6% en rythme annualisé au 4ième trimestre après 2,2%. Même si ce chiffre sera sensiblement révisé, il restera probablement au-dessus de 4%. L’accélération de l’activité a résulté de la très nette réduction du rythme de déstockage.
Le dynamisme de l’industrie ne se dément pas début 2010 et provient de la poursuite du dynamisme des exportations et très probablement d’un prochain restockage qui serait cependant de courte durée : l’excès considérable de stocks dans le secteur des biens durables devrait entrainer de nouveaux déstockages au second semestre.
La reprise est cependant faible dans le reste de l’économie, voire inexistante pour les petites et moyennes entreprises (PME). La demande intérieure finale reste affectée non seulement par l’amplification de la crise dans l’immobilier commercial, conséquence des surcapacités structurelles, mais aussi par la pénurie de crédits. Les banques continuent à réduire leur exposition sur les PME qui souffrent d’énormes contraintes de financement, alors qu’elles ont été responsables des 2/3 des créations d’emplois de ces 15 dernières années. De ce fait, en dépit d’une baisse du taux de chômage à 9,7% en janvier, les réductions d’emplois devraient se poursuivre. Dans ce contexte, les conditions de crédit hypothécaire continuent également à se durcir, empêchant toute sortie de crise du marché de l’immobilier résidentiel.
Zone euro : inquiétude
La croissance a fortement déçu au 4ème trimestre : à 0,1%, inférieure à celle du trimestre précédent de 0,3%, elle illustre une économie européenne toujours faible, en dépit des budgets publics très expansifs en 2009. Elle reste pénalisée par la résorption de l’excès de dette privée, comme en Espagne où le PIB a encore diminué de 0,1%, par des programmes de rigueur budgétaire comme en Grèce, où le PIB a encore baissé de 0,8%, et enfin par la faiblesse de la consommation des grands pays comme l’Italie (-0,2%) et l’Allemagne (0%).
La France fait exception avec une croissance de 0,6% mais la contribution très négative de l’extérieur de -0,7 point est assez représentative des problèmes marqués de compétitivité des pays de la zone euro, en dehors de l’Allemagne.
Les perspectives restent bonnes dans l’industrie grâce probablement à un prochain restockage, mais pâles dans les autres secteurs, en raison de la mauvaise orientation de la demande intérieure. Les effets des mesures temporaires des gouvernements telles que les primes à la casse s’estompent voire disparaissent totalement. La réduction d’importantes capacités en excès continueront à déprimer l’investissement des entreprises. Les suppressions d’emplois qui les accompagnent accroîtront le taux de chômage qui a atteint 10% en fin d’année 2009, au plus haut désormais depuis août 1998. Enfin, les programmes de rigueur budgétaires qui sont ou seront appliqués dans plusieurs pays déprécieront davantage la demande.
Japon : forte contraction attendue de la consommation des ménages
La dégradation des perspectives d’activité observe une pause, grâce au soutien des exportations, qui augmentent de 2,8% en décembre, toujours tirées par l’Asie et en particulier la Chine.
Cependant, sous l’impact de la demande intérieure, la production devrait continuer à ralentir les deux prochains mois, le rythme de croissance mensuel devant passer de 2% en janvier à quasiment 0 en mars.
L’investissement des entreprises devrait poursuivre sa tendance sensiblement baissière : les entreprises demeurent affectées par les surcapacités importantes et les pressions déflationnistes considérables : elles réduisent les prix en dépit de la hausse des prix des matières premières. Mais, c’est bien la consommation des ménages qui montre les perspectives les plus inquiétantes. Après un léger ralentissement au 4ème trimestre, une contraction de la consommation est attendue. Elle résulterait de la très nette accentuation de la dégradation du pouvoir d’achat de -2% à -4% sur un an, due à l’effondrement des primes de 6% sur un an. Elle tiendrait également à la précarité accrue de l’emploi : le nombre de salariés réguliers continue de baisser et compense la hausse des emplois temporaires. Dans ces conditions, les pressions déflationnistes devraient persister.