par Werner Perdrizet, économiste au Crédit Agricole
Les enquêtes de conjoncture en janvier ont dans l’ensemble confirmé l’érosion de la confiance des entreprises et des ménages. Ce climat peu favorable devrait pousser les entreprises à reporter leur projet d’investissements et d’embauches et à gérer leurs stocks au plus près. Les ménages devraient également réduire la voilure du côté de la consommation. Le léger recul de l’activité sur la jonction 2011-2012 serait donc essentiellement imputable au repli de la demande intérieure.
Dans l’ensemble, les premières enquêtes de ce début d’année auprès des ménages et des chefs d’entreprises françaises confirment la morosité du climat conjoncturel actuel. Les enquêtes Insee ont ainsi fait état de la poursuite de la dégradation du climat des affaires et d’un moral des ménages toujours très bas même si celui-ci a faiblement progressé en janvier. Cependant, à l’opposé de l’enquête Insee, l’enquête PMI, menée auprès des directeurs d’achats, indique une légère amélioration du climat des affaires : son indice synthétique progresse pour le quatrième mois consécutif et passe légèrement au-dessus du seuil de 50.
Toutefois, dans les deux enquêtes, les composantes anticipations ont reculé, ce qui n’est pas de bon augure quant à la tenue de l’activité au cours des prochains mois.
Un climat des affaires entre dégradation (Insee)…
En janvier, l’indice Insee sur le climat des affaires a poursuivi son recul (-1 point à 91), ce qui l’éloigne davantage de sa moyenne de long terme (100). L’évolution par secteur est néanmoins contrastée avec une légère amélioration de la confiance dans les services et le bâtiment (+1 point chacun) alors que celle-ci s’est affaiblie dans l’industrie (-3 points), le commerce de gros (-2 points) et le commerce de détail (-4 points). Par ailleurs, seul le bâtiment se maintient au niveau de sa moyenne de long terme, les autres secteurs s’en écartant de plus en plus. Dans l’ensemble, ces résultats appuient nos anticipations d’une activité en léger recul au premier trimestre 2012 (-0,2% t/t) après -0,1% t/t au dernier trimestre 2011.
L’industrie devrait être l’un des secteurs les plus affectés par le ralentissement économique si l’on en croit la forte baisse de l’indice de confiance en janvier. La composante «perspectives personnelles de production» chute en particulier de 5 points (à -6) et reperd ainsi le terrain regagné le mois dernier. Il est donc probable que les industriels ajustent à la baisse leurs dépenses, notamment d’investissement au cours des prochains mois face à une détérioration de leur profitabilité et des débouchés très incertains.
… et amélioration « fragile » (PMI)
A contrario des enquêtes Insee, l’enquête PMI signale une légère amélioration du climat des affaires. L’indice composite a poursuivi sa remontée pour le quatrième mois consécutif en gagnant un peu plus d’un point à 51,2. Cette amélioration est essentiellement imputable au redressement de l’indice PMI dans le secteur des services avec une progression de +2 points à 52,3. En revanche, l’indice de l’industrie est resté stable, sous le seuil des 50 (zone de contraction de l’activité), à 48,5.
Si l’indice Insee et le PMI divergent par leur niveau et leur évolution, les composantes anticipations convergent et sont dans les deux enquêtes orientées à la baisse. L’indice PMI composite « nouvelles commandes » a ainsi perdu -0,8 point et reste sous le seuil des 50 (à 48). L’ensemble ne prête guère à l’optimisme quant à l’orientation de l’activité à court terme.
Le moral des ménages toujours à un plus bas
Les ménages n’ont pas plus le moral avec une enquête Insee qui confirme leur pessimisme (à 81 contre une moyenne de 100), même si un léger mieux (+1 point) a été constaté après deux mois de baisse. La plupart des composantes ont légèrement progressé mais cette amélioration ne pourrait être que temporaire. Les perspectives de chômage reculent ainsi de 3 points alors que le nombre de chômeurs estimé par Pôle Emploi progresse depuis plusieurs mois (+1% m/m en décembre, soit +5,6% a/a) et que cette tendance haussière n’est pas amenée à s’interrompre de sitôt. Ralentissement économique et volonté de reconstitution des profits sont les deux raisons qui vont sans doute pousser les entreprises à réduire leurs effectifs.
Un marché du travail déprimé, un pouvoir d’achat fragilisé par une inflation toujours élevée et la hausse des prélèvements fiscaux pèsent sur le moral des ménages qui devraient selon toute vraisemblance réduire leurs dépenses de consommation. Celles-ci devraient donc être d’un faible soutien à la croissance à la jonction 2011 – 2012 : la consommation en biens est ainsi restée stable au quatrième trimestre 2011.