par William de Vijlder, Chef économiste de BNP Paribas
La publication, cette semaine, de statistiques économiques importantes en France et en Allemagne permet de comparer le climat conjoncturel dans les deux pays. En Allemagne, les indicateurs de l’institut Ifo dépeignent une situation morose. L’indice global du climat des affaires, tous secteurs confondus, a reculé en juin et se situe à son plus bas niveau depuis novembre 2014. Les chefs d’entreprises se disent plus pessimistes sur les perspectives même si l’indice relatif à l’évaluation de la situation actuelle s’est légèrement redressé.
La dispersion des évaluations, par les entreprises, de leurs perspectives économiques – une mesure de l’incertitude – reste élevée et a légèrement augmenté. Les anticipations relatives aux exportations ont encore reculé pour atteindre un niveau correspondant à une croissance nulle. Le tableau est particulièrement sombre pour l’industrie automobile, ce qui est très compréhensible compte tenu du ralentissement en Chine – un important partenaire commercial pour l’Allemagne – et des inquiétudes liées à un éventuel relèvement, par les Etats-Unis, des droits de douane dans ce secteur.
INDICES DES DIRECTEURS D’ACHAT
Sources : IHS Markit, BNP Paribas
En France, l’Insee a publié plusieurs statistiques. L’indice global du climat des affaires reste stable tandis que les services enregistrent un léger mieux, atteignant un niveau inédit depuis mai 2018, bien au-dessus de la moyenne historique. Le secteur industriel accuse un certain ralentissement, après le rebond du mois de mai, mais le climat conjoncturel se maintient au-dessus de sa moyenne de longue période. L’opinion des industriels sur les carnets de commandes se dégrade suite à la détérioration des commandes à l’exportation, bien inférieures à leur moyenne de long terme. En juin, le climat des affaires est stable dans le commerce de détail et le secteur automobile. Dans le bâtiment, le climat conjoncturel est également stable et reste nettement supérieur à sa moyenne de longue période.
L’utilisation des capacités est très élevée dans ce secteur et les goulets d’étranglement du marché du travail continuent d’augmenter. La conjoncture globale du marché du travail s’est améliorée en juin, principalement tirée par le secteur des services. Ainsi qu’il ressort de ce tableau général, la France fait légèrement mieux, ce que confirme le graphique. Depuis janvier 2018, qui correspond plus ou moins au pic du cycle en termes de données d’enquête, les indices des directeurs d’achat dans l’industrie manufacturière et les services ont enregistré une baisse parallèle en France, mais ils ont récemment rebondi1.
En Allemagne, les services ont moins fléchi qu’en France, oscillant dans une fourchette relativement étroite au cours des dix-huit derniers mois. Cela laisse penser que le ralentissement de la croissance outre-Rhin est principalement dû au secteur manufacturier. L’indice PMI relatif à ce secteur a sensiblement chuté, et ce, pour plusieurs raisons. Une plus forte exposition au commerce international et à la Chine explique, tout au moins en partie, la différence entre les deux pays en termes de performances du secteur manufacturier. Concernant les perspectives à court terme, les indices PMI et les données de l’Insee pour la France offrent des raisons d’être optimiste. En Allemagne, certains indicateurs donnent des signes de stabilisation (ex : anticipations du secteur manufacturier au cours des derniers mois). On peut supposer que les problèmes liés aux relations commerciales (entre les Etats-Unis et la Chine, d’une part, et les Etats-Unis et l’Europe, d’autre part) ainsi qu’au Brexit ne se régleront pas de sitôt. On peut alors difficilement s’attendre à une amélioration significative à court terme. La France pourrait toutefois surprendre favorablement en raison des effets stimulants des mesures de soutien au pouvoir d’achat.
NOTE
- les points du graphique correspondent aux dernières observations (juin 2019)