par Ken Van Weyenberg, Investment Specialist chez Dexia Asset Management
Une nette amélioration des statistiques macroéconomiques et l’effet positif des LTRO de la Banque centrale européenne sur la liquidité ont réveillé les marchés des actions au début de l'année. Après ce classique rebond sur fond de disponibilité de liquidités, les marchés ont cependant déjà fortement corrigé, entraînant des opportunités d'achat pour l'investisseur à long terme ?
Les marchés des actions ont entamé l’année sur les chapeaux de roue. Mi-mars, à son point culminant, l’Eurostoxx 50 affichait une progression de près de 12 %. Mais le classique rebond lié à la liquidité auquel nous avons assisté en début d’année est déjà loin. L’effet des LTRO de la Banque centrale européenne a eu le temps de se dissiper. Et au stade actuel, ni la Réserve fédérale ni la BCE n’estiment nécessaire d’initier d'autres mesures de relance. Ajoutons à cela que la tension née de la problématique de la dette dans la zone euro est resurgie à la suite des résultats inquiétants des élections grecques et des difficultés du secteur bancaire espagnol. En même temps, force est de constater que les données macroéconomiques des dernières semaines sont moins favorables aux marchés des actions. La crainte d'une récession plus profonde dans la zone euro s’accroît, tandis que la croissance ralentit aux États- Unis et dans les pays émergents.
Conséquence : depuis son pic de la mi-mars, l’Eurostoxx 50 a déjà reperdu près de 17 %. Cela dit, l’ampleur de la correction varie largement d’une région à l’autre et au sein d’une même région. L’indice S&P 500, par exemple, n’a reculé que de 5 % (en euros), alors que le Dax allemand se «contentait» de céder 10%. À l'autre bout du classement, on trouve naturellement la bourse espagnole, dont la valeur chute de plus d'un cinquième.
La politique européenne domine les marchés des actions
Les péripéties de la zone euro restent incontestablement le premier facteur de risque à court terme sur les marchés des actions. Si nous nous rapprochons pas à pas d'une solution pour la zone euro, nous sommes toujours confrontés aux effets politiques et sociaux des récentes évolutions. En toute logique, le premier des dominos qui menace de (re)tomber est la Grèce : le chaos politique qui règne dans ce pays rend une sortie de la zone monétaire moins improbable. Si ce risque augmente trop fortement, il faudra à notre avis une intervention massive pour soutenir le système financier et une accélération de la mutualisation des dettes résiduelles. Le comportement plus politique et pragmatique de la Banque centrale européenne va peut-être faciliter un consensus européen et une solution à la crise de la zone euro.
Parallèlement, malgré le regain de volatilité lié à la problématique de la dette européenne, de nouveaux éléments, plutôt constructifs, semblent se dessiner. C'est ainsi que l'Allemagne est de plus en plus isolée (le vrai noyau de l'Europe se compose désormais de l'Allemagne, du Luxembourg et de la Finlande) et dépendant de l’évolution économique des pays au sein de la zone euro (40 % des exportations allemandes sont destinées à la zone euro, etc.). En même temps, les dirigeants européens se montrent progressivement moins obsédés par l’austérité et plus désireux de privilégier davantage la relance, même si la forme des mesures à prendre fait toujours débat.
À court terme, l'incertitude politique au sein de la zone euro entretiendra donc probablement une certaine volatilité sur les marchés des actions. L'indice VStoxx, qui mesure la volatilité de l’Eurostoxx 50, a fortement progressé depuis le début du mois d'avril. La volatilité se situe aujourd'hui aux environs de 32 %, ce qui porte la moyenne de long terme à quelque 25 %.
Les marchés des actions sont sous-valorisés
L'investisseur à long terme dispose néanmoins d'une opportunité d'achat sur les marchés des actions. D'abord, nous observons clairement que ces marchés n'ont toujours pas la priorité aux yeux des grands investisseurs, dont le positionnement reste relativement prudent. Au début de l’année, les investisseurs plaçaient une partie de leurs liquidités en actions, mais on attend toujours le grand basculement du marché des obligations vers celui des actions.
Ensuite, les marchés des actions font l'objet d'une valorisation très attrayante. Avec un rapport cours/bénéfice inférieur à 10, les actions européennes se négocient avec pas moins de 17 % d’escompte sur la moyenne à 25 ans. De même, si l’on considère la valeur comptable, on constate une sous-valorisation de plus de 15 % par rapport à la moyenne historique. Les États- Unis et les pays émergents conservent, eux aussi, une valorisation relativement attrayante du point de vue historique. En toute logique, c’est cependant la zone euro qui constitue la région la plus sous-valorisée, en raison des risques liés à la problématique de la dette. Compte tenu d'une prime de risque de 6 % pour la zone euro, la sous-valorisation dépasse les 25 %.
Si l’on compare le ratio cours/bénéfice des marchés des actions aux intérêts sur les obligations d'État, la valorisation à long terme des actions a manifestement de quoi séduire les investisseurs. Sur les marchés américains, le supplément de rendement (ratio cours/bénéfice – rendement sur les obligations souveraines) atteint près de 5 %, voire 6 % sur les marchés obligataires européens, alors que les obligations d’État allemandes et celles du Trésor américain n'ont jamais été aussi chères.