Les chocs de la guerre et des taux plaident pour une allocation simplifiée

par François-Xavier Chauchat, Membre du Comité d’Investissement, responsable du cadrage macroéconomique et de l’allocation d’actifs chez Dorval AM

La Russie et l’Ukraine ne pesant pas très lourd dans l’économie mondiale, la crise ukrainienne se transmet principalement via le prix et la disponibilité des matières premières. A court terme, le choc énergétique signifie moins de croissance et plus d’inflation. L’Europe est en première ligne avec sa dépendance au gaz russe, alors que l’indépendance énergétique protège mieux l’économie américaine. Une grande partie du monde ne participant pas aux sanctions, le pétrole russe devrait pouvoir trouver preneur, ce qui limiterait le prix du baril en dessous de 120/130$. Le choc ukrainien serait alors gérable, d’autant qu’avec la réouverture l’Europe entre dans cette phase avec un momentum économique favorable, et finance des plans de résilience. La pagaille dans les chaînes de production va cependant s’aggraver, avec une Chine qui reconfine partiellement son économie.

Un des changements majeurs est que les banques centrales n’entendent plus absorber tous les chocs. Elles sont parties en guerre contre l’inflation, et seuls des risques concrets de récession pourraient les faire dévier. La Banque centrale européenne a commencé à réduire ses achats d’actifs malgré l’Ukraine, et la Réserve fédérale américaine ne cache plus sa ferme intention de ralentir une économie en surchauffe. Les relations entre croissance, inflation et taux d’intérêt sont donc devenues très instables. La conclusion que nous en tirons est que les marchés obligataires mondiaux sont devenus ininvestissables. Les obligations sont en effet hors de prix, avec des rendements réels (hors inflation) négatifs même pour les obligations d’entreprises.

Dans ce monde plus difficile, les bourses mondiales ont plié mais elles n’ont pas rompu. Selon nous, la cause principale de cette résistance tient à l’assainissement des valorisations et du positionnement sur les marchés des actions depuis un an. À l’euphorie de début 2021 a succédé une très forte baisse des valeurs- phares du Covid (biotech, etc.), un bear market asiatique (dont -50% sur le MSCI Chine !), puis une correction des valorisations des grandes valeurs de croissance à partir de novembre 2021. Au total, les PER mondiaux se sont normalisés, ce qui rend les actions encore plus attractives relativement aux obligations. Les actions sont, de plus, des actifs « réels » puisque les bénéfices des entreprises suivent globalement l’inflation.

Dans ce contexte, les gestions internationales ont, pensons-nous, intérêt à simplifier l’allocation des actifs autour du seul couple actions-cash. Les paris périphériques sur les marchés obligataires ou de change nous semblent en effet trop dangereux dans le contexte actuel. Nous concentrons notre exposition aux actions sur les seuls pays développés. Notre méthode d’équipondération des actions permet une large diversification sectorielle et régionale, avec par exemple une exposition significative au Japon (couvert contre le risque de change), marché faiblement valorisé et où les taux ne montent pas. Nous continuons à favoriser le thème de la transition énergétique, thème qui sort renforcé de la crise ukrainienne.