par Emmanuel Auboyneau, Gérant Associé, et Xavier d'Ornellas, Gérant Associé Pôle Gestion Flexible chez Amplégest avec la participation de Jean-Michel Mourette, Economiste (Eureka Finance)
Depuis deux mois la psychologie sur les marchés financiers a brutalement changé, passant d’un optimisme serein à un pessimisme exacerbé, sans que la macroéconomie ne puisse justifier d’un tel basculement. Le fait générateur se situe en Chine, avec la dévaluation, même symbolique, du yuan la semaine du 10 août et les craintes d’un atterrissage brutal de l’économie. S’il y a bien eu un décrochage industriel important en Chine, les services sont en revanche en progression, tirés par la consommation d’une classe moyenne de plus en plus importante.
Cette mutation accélérée de l’économie, que le gouvernement appelle d’ailleurs de ses vœux, provoque des dégâts sur des pans entiers de l’industrie chinoise. Toutefois la croissance globale reste importante. Nous pensons même que l’économie du pays pourrait retrouver des couleurs, aidée par la politique proactive des autorités.
Aux Etats-Unis nous assistons également aujourd’hui à cette dichotomie entre une industrie qui ralentit et des services qui accélèrent. La chute du pétrole et des matières premières est sans doute une des raisons du repli manufacturier. Les données statistiques actuelles ont en revanche du mal à comptabiliser les services et à refléter leur importance. Des réussites comme Facebook, Airbnb, Netflix ou Amazon sont-elles bien prises en compte par les statistiques officielles ? Nous pensons que l’impact positif des services fera plus que compenser la relative déception sur l’industrie. Par ailleurs les chiffres d’emploi ne sont aujourd’hui pas compatibles avec une chute de l’économie américaine.
En Europe la reprise se confirme, particulièrement dans les quatre pays les plus importants (Allemagne, France, Italie, Espagne). L’Europe va globalement mieux qu’il y a trois ou six mois ! Les moteurs de la croissance sont toujours là et la confiance des industriels et des ménages progresse.
Les Banques Centrales ont longtemps été le catalyseur principal de la hausse des marchés. Aujourd’hui elles semblent perdre la main aux yeux des investisseurs. Le discours brouillé de la Federal Reserve a été perçu comme un aveu de faiblesse. Les marchés détestent l’incertitude ! Par ailleurs les difficultés de la BCE et de la Banque du Japon à relancer leurs économies en dépit de politiques très incitatives, rendent leur message moins efficace. Mais soyons sûrs que l’importance des politiques monétaires n’a pas disparu. Une annonce d’un QE supplémentaire par la BCE pourrait, par exemple, être le moteur d’un rebond de marché.
Le consensus optimiste qui existait en début d’année et jusqu’à cet été a explosé avec l’épisode chinois et la montée de la volatilité qui lui a succédé. Le flou sur la politique monétaire américaine a également contribué à la nervosité ambiante. L’aversion au risque est aujourd’hui forte, pas toujours rationnelle, et provoque parfois des décisions radicales. Le scandale Volkswagen et la situation difficile de Glencore, ont été la goutte d’eau qui a cassé le peu de confiance qui restait chez les investisseurs. La chute des marchés a été accentuée par des facteurs techniques. La hausse de la volatilité finit par peser sur les budgets de risque des fonds de valeurs mobilières, provoquant des ventes de titres automatiques. Une mauvaise spirale…
Ces différents paramètres nous ont conduits à réduire partiellement le risque dans nos fonds. Notre vision optimiste sur la macroéconomie nous conduira probablement à utiliser ces poches de liquidités dans les semaines qui viennent. Il faudra au préalable que la volatilité diminue et revienne à des niveaux compatibles avec des marchés financiers sereins. Cela n’est pas encore le cas.