par Marie-Pierre Peillon, Directrice de la Recherche de Groupama AM
Etats-Unis : Le marché du travail a ralenti, en ligne avec les autres indicateurs
La croissance au T1 a, comme prévu, ralenti comparé à la fin de l’année dernière. Mais, sa décélération n’a rien d’alarmant (2,2% en rythme annualisé après 3% et 1,8% les trimestres précédents). La demande finale a progressé de 1,6% (après 1,1% au T4) sous l’effet d’une accélération de la consommation (2,9% après 2,1%) mais dans un contexte de revenus toujours faibles, conduisant à une baisse sensible du taux d’épargne. En outre, l’investissement des entreprises a baissé pour la première fois depuis fin 2009 (-2,1%). Même si cette évolution est en partie attribuable à la fin de mesures fiscales, elle révèle aussi un comportement attentiste lié aux perspectives modérées de croissance.
Le marché du travail a de nouveau déçu en avril avec 115 000 créations nettes d’emplois après 154 000 le mois précédent, mais 252 000 en moyenne de décembre à février. Les autres indicateurs d’activité disponibles tendent à confirmer une certaine perte d’élan au T2, notamment l’ISM dans les services (53,5 contre 56), mais globalement restent compatibles avec l’idée que l’économie est toujours sur la voie d’un rythme de croissance modérée plutôt qu’une décélération marquée.
Aussi, il est encourageant d’observer que la menace sur la consommation liée au cours du baril a disparu et que l’inflation a par conséquent sensiblement décéléré en avril (2,3% contre 2,7% le mois précédent). Enfin, les exportations restent bien orientées en Mars, et la hausse des carnets de commandes étrangères en avril est de bon augure.
Zone euro : La sortie de récession n’est pas actée sauf peut-être en Allemagne
Le PIB s’est stabilisé au 1er trimestre après avoir reculé de 0,3% au T4 2011. La ventilation du PIB ne sera disponible qu’au début juin, cependant il est probable que la demande intérieure se soit contractée. La consolidation budgétaire pèse sur la consommation des ménages tandis que l’investissement des entreprises souffre des sombres perspectives et du resserrement des conditions de crédit. Seule une évolution positive du commerce extérieur résultant probablement d’une forte baisse des importations a permis d’éviter la récession, définie comme deux trimestres consécutifs de contraction.
Par pays, les divergences persistent : l’Allemagne a nettement rebondi, affichant un PIB positif de 0,5%t/t. Si la croissance s’est stabilisée en France, l’activité en Italie a enregistré une 3ième baisse consécutive (-0,8%t/t). Mais le Portugal et l’Espagne ont limité les dommages, avec des contractions respectives à 0,1% et 0,3%.
Au-delà de T1, les enquêtes de conjoncture suggèrent que l’activité se contracterait de nouveau au début de T2. L’indice composite s’établit à 46,7 en avril, comparé à une moyenne de 49.6 au T1. Les niveaux sont particulièrement faibles en Europe du Sud (42,7 en Espagne et 43,3 en Italie) laissant toute reprise de l’activité peu probable à court terme. Le recul de l’indice composite a été également assez marqué en France (à 45,9), permettant d’anticiper une contraction de son activité au T2, tandis que l’Allemagne continuerait de surperformer le reste de la région.
Chine : le ralentissement n’est pas terminé
Après un ralentissement légèrement plus marqué que prévu en début d’année, les données de mars ont été plus positives et laissaient supposer que l’économie rebondissait sensiblement. L’enthousiasme a été réduit par les indicateurs d’activité du mois d’avril : la production industrielle a ralenti, et notamment la production d’électricité qui a été particulièrement faible en avril ; les ventes au détail ont également été moins fortes qu’en mars et l’investissement a accentué sa tendance à la décélération.
A cela, on doit ajouter des flux commerciaux moins soutenus, liés aux incertitudes entourant la crise de la dette souveraine en zone euro et le ralentissement de la demande intérieure résultant de la politique du gouvernement pour corriger les déséquilibres de l’économie (poursuite du dégonflement de la bulle immobilière). Ces éléments nous amènent à penser que l’économie chinoise est toujours confrontée à un environnement difficile.
A ce stade, le gouvernement doit ajuster sa politique (monétaire et fiscale) pour trouver le « bon équilibre » entre la restructuration économique (une croissance plus qualitative), les pressions inflationnistes et les préoccupations sur la croissance. Le gouvernement pourrait alors intensifier son soutien budgétaire et/ou conserver une orientation accommodante de sa politique monétaire sous la forme de baisses du taux de réserves obligatoires, plus facile avec une inflation qui s’est assagie.