Plus bas pour plus tard

par Alexandre Drabowicz, Chief Investment Officer, Indosuez Wealth Management

L’inflation américaine ne cesse de surprendre à la hausse depuis le début de l’année. Une rigidité qui a remis sur le devant de la scène les incertitudes relatives aux perspectives d’inflation et baisses de taux de la Réserve fédérale (Fed), le marché semblant donner de plus en plus de considération à un possible « Pivot inversé » de la banque centrale américaine. Une dynamique qui pèse sur les marchés mais met également en exergue la divergence avec la zone euro, qui semble épouser les perspectives d’une désinflation sans accroc, qui permettrait notamment à la Banque centrale européenne (BCE) d’enclencher un cycle de baisses de taux avant la Fed : un fait historique. Un contexte qui nous amène désormais à adopter une vue tactiquement neutre sur les actions dans un marché qui devrait offrir des points d’entrée attractifs à terme. Notre orientation stratégique sur la classe d’actifs demeure quant à elle positive. Dans le même temps, la hausse récente des taux accroît l’attrait de la duration dans les portefeuilles diversifiés, tandis que nous gardons une vue tactiquement positive sur le dollar américain.

États-Unis : l’inflation est un défi à court terme mais la direction reste la même 

L’année 2023 s’était terminée emprise d’optimisme autour d’une croissance à toute épreuve et d’une désinflation presque immaculée. Le premier trimestre 2024 aura suivi la dynamique inverse avec une croissance ralentissant de 4 % (en glissement trimestriel annualisé) au second semestre 2023 à 1,6 % et une mesure de Core PCE accélérant de 1,6 % (en glissement trimestriel annualisé) au quatrième trimestre 2023 à 4,4 % au premier trimestre 2024. Aux États-Unis la croissance se normalise même si la faiblesse du chiffre du premier trimestre 2024 s’explique en grande partie par des éléments volatils (commerce extérieur et inventaires). En effet, d’un point de vue domestique, l’économie américaine est restée très robuste au premier trimestre, les achats finaux domestiques privés (hors commerce extérieur, inventaires et dépenses gouvernementales) se sont accrus de 3,1 % (annualisé) après 3,3 % lors du dernier trimestre. Le consommateur continue d’afficher une résilience à toute épreuve porté par l’amélioration continue de son pouvoir d’achat, des effets de richesse grâce à la hausse des marchés actions et des prix immobiliers, une épargne richement rémunérée et un marché du travail dont la vigueur reflète notamment la hausse impressionnante de l’immigration aux États-Unis ces dernières années (+3,3 millions d’immigrés en 2023). Ce dernier point est particulièrement important car il permet de combler en partie le manque de main d’œuvre auquel ont fait face les entreprises à la sortie de la pandémie, un phénomène qui a exercé une pression importante sur les salaires américains.

Le gros point d’interrogation se trouve davantage du côté de l’inflation qui a montré d’importants signes de rigidité au premier trimestre 2024, poussant les marchés à s’asseoir sur cinq des sept baisses qui étaient anticipées en début d’année pour 2024. Le Core PCE stagne désormais depuis trois mois à 2,8 % (en glissement annualisé), une grande amélioration en comparaison aux 5,2 % qui prévalaient fin 2022 mais encore bien loin de la cible de 2 % de la Fed. Une rigidité qui s’exprime dans la composante services, où une combinaison mêlant saisonnalité (avec notamment les hausses de prix de début d’année généralement observée dans le services), effets retardés sur des composantes spécifiques (immobilier, médical et assurance automobile) et la hausse des prix des services financiers (reflétant la hausse des marchés depuis plusieurs mois) est venue remettre en question le processus de désinflation. Aux États-Unis, le chemin pourrait s’avérer sinueux mais nous continuons de penser que la direction pointe vers une poursuite de la désinflation en 2024. Pour cause, cette rigidité ne résulte pas nécessairement de la vigueur de l’économie américaine et les fondamentaux continuent de pointer vers une poursuite de la désinflation. En effet, dans un premier temps, la composante logement suit les prix des loyers avec un retard de près d’un an. Ceux-ci ont fortement baissé depuis le pic atteint en 2022 et cette dynamique n’est pas totalement reflétée dans le PCE où l’inflation pour le logement se situait encore à 5,8 % en mars, ce qui devrait justifier d’une première jambe de désinflation en 2024. Dans un second temps, les fondamentaux continuent de pointer dans le sens d’une continuation de la désinflation dans les services : le marché du travail se rééquilibre, les salaires continuent de se normaliser et les anticipations d’inflation restent relativement modérées. In fine, notre scénario continue de dresser le tableau d’un atterrissage en douceur de l’économie américaine dans les trimestres à venir, et pour laquelle nous anticipons une croissance et une inflation sous-jacente (Core PCE) à respectivement 2,5 % (moyenne annuelle) et 2,8 % en 2024 et 1,8 % et 2,3 % en 2025.

Zone euro : regain d’optimisme et divergences transatlantiques 

En zone euro, les indicateurs d’activité se sont fortement redressés ces derniers mois à l’image du PMI Composite qui est repassé en zone d’expansion en mars, porté par l’amélioration observée dans le secteur des services, le manufacturier représentant pour le moment un frein sur l’activité, notamment en Allemagne. Une dynamique en ligne avec notre scénario de reprise de la croissance en zone euro à partir du premier semestre 2024, le PIB ayant grimpé de 0,3 % au premier trimestre 2024, au-delà des 0,1 % attendus par le consensus.

Depuis plusieurs mois, ces perspectives optimistes pour le Vieux Continent s’appuient notamment sur l’anticipation d’une reprise de la consommation en zone euro supportée par l’augmentation du pouvoir d’achat des ménages à mesure que les salaires rattrapent le retard accumulé sur l’inflation qui a emprunté depuis plusieurs trimestres une dynamique très positive de décélération. Nous nous attendons à ce que le mouvement de désinflation se poursuive courant 2024 et à horizon 2025, même si celui-ci devrait apparaître quelque peu sinueux sur l’inflation totale en raison d’effets techniques sur l’énergie, tandis que l’inflation sous-jacente devrait notamment profiter d’un ralentissement de la composante services qui reste, à l’image des États-Unis, encore élevée à 3,7 %.

Des perspectives de désinflation sans accroc mettant en exergue la divergence sur le front de l’inflation entre la zone euro et les États-Unis, symbole d’une économie du Vieux Continent caractérisée par une demande relativement modeste, des conditions de crédit demeurant encore restrictives dans une économie fortement bancarisée, des politiques fiscales moins expansionnistes qu’outre-Atlantique et un phénomène de déflation importée de Chine. Une divergence qui se retrouve dans les révisions opérées sur notre scénario d’inflation depuis le début de l’année. Fin 2023, nous anticipions que l’inflation en zone euro et aux États-Unis (Headline CPI) trôneraient respectivement à 2,9 % et 2,7 % en moyenne annuelle en 2024 ; la roue a tourné depuis et nous attendons désormais 2,3 % en zone euro et 3 % aux États-Unis.

En 2024, l’économie du Vieux Continent devrait ainsi poursuivre sa reprise, supportée par la reconstitution des salaires réels mais également par le desserrement des conditions monétaires et l’amélioration du cycle manufacturier global. Nous attendons ainsi 0,6 % (en moyenne annuelle) de croissance en 2024 et 1,2 % en 2025.

Par ailleurs, l’inflation en zone euro devrait même flirter avec les 2% courant 2024, se stabilisant en 2025 autour de la cible de la Banque Centrale Européenne, notamment sur la partie sous-jacente. Cependant, ce scénario optimiste s’accompagne également de risques sur la croissance et l’inflation. Dans un premier temps, même si le revenu réel s’améliore, le sentiment des ménages reste encore atone, justifiant d’intentions d’épargne encore importantes, ce qui pourrait retarder la reprise de la consommation. Aussi, des déficits rapportés au PIB de 5,5 % en France et 7,2 % en Italie en 2023 ont remis sur le devant de la scène les craintes liées à la soutenabilité de la dette en zone euro et pourraient conduire à des orientations budgétaires plus restrictives. Sur le front de l’inflation, les possibles répercussions sur les prix de l’énergie des tensions géopolitiques au Moyen-Orient et un euro affaibli, conséquence d’une BCE baissant ses taux avant la Fed, pourraient s’accompagner de pressions haussières sur les prix, notamment sur l’inflation totale.

Revue du FOMC et trajectoire des taux directeurs 

Après avoir pivoté fin 2023, les premiers chiffres du CPI de l’année 2024 n’ont pas confirmé la dynamique positive de la désinflation et ont contraint Jerome Powell à tempérer les anticipations de baisses des taux, même si les « dot plots » de mars indiquent toujours trois baisses en 2024.

Dans ce contexte macroéconomique, le président de la Fed se trouvait dans une situation difficile pour le Federal Open Market Committee (FOMC) de mai, mais a réussi à communiquer de manière équilibrée en reconnaissant la nécessité de maintenir les taux à leur niveau actuel pendant un certain temps, tout en évitant de se précipiter dans le scénario d’une hausse des taux. JeromePowell a défini trois trajectoires différentes en fonction des trois scénarios macroéconomiques suivants :

1. Une inflation plus élevée que la cible et une vigueur prolongée du marché du travail conduiront au maintien des Fed Funds à leur niveau actuel

2. Un scénario « Boucles d’or » dans lequel la Fed réduit ses taux pour préserver l’atterrissage en douceur de l’économie américaine (correspondant à notre scénario de base)

3. Un scénario de croissance plus fébrile avec un affaiblissement du marché du travail qui pousse la Fed à réduire plus agressivement ses taux.

Cette orientation est intéressante car elle met de côté les scénarios extrêmes en termes de trajectoire de taux directeurs. Elle témoigne également d’un changement de perspective de la part de la Fed. Maintenant que l’inflation se situe dans la zone des 3 %, la préservation d’un marché du travail en bonne santé gagne en importance. La Fed met désormais l’accent sur son double mandat. Dans l’édition du mois de mai de notre Monthly House View, nous avons reconnu que la Fed pourrait prendre plus de temps pour réduire ses taux d’intérêt, mais que le niveau de taux directeur est restrictif et que le maintien de cette orientation entraînera probablement un resserrement des conditions financières.

Taux directeurs : plus haut pour toujours ou plus bas pour plus tard ?

Depuis 2022, le marché n’a cessé d’osciller entre anticipations de récession/atterrissage en douceur et le paradigme « plus haut pour plus longtemps » sur les taux courts. Ce cycle de hausse des taux a surpris la plupart des acteurs du marché et des prévisionnistes grâce à la vigueur du consommateur américain, à une moindre sensibilité aux taux de l’économie et à une croissance nominale globalement forte. L’économie croît à un rythme supérieur à son potentiel depuis un certain temps, ce qui soulève la question du taux neutre et du fait qu’il soit plus élevé dans le monde post-pandémique. Les économistes tentent d’estimer le taux neutre à l’aide de modèles qui offrent un large éventail de résultats.

Le taux réel neutre R* 1 se situe entre 0,8 % et 2,5 % selon les modèles utilisés et la moyenne est d’environ 1,5 % pour l’économie américaine. Sur le front de l’inflation, la dernière ligne droite pour atteindre l’objectif de 2 % s’avère plus difficile et prend davantage de temps. La progression de l’inflation s’est arrêtée en 2024 et l’indice des prix à la consommation de base est encore bien supérieur à 2 %. Cependant, nous prévoyons toujours une poursuite de la désinflation au cours des mois à venir et un indice PCE cœur compris entre 2 et 2,5 % d’ici la fin de 2025. La désinflation des loyers constitue un risque majeur pour cette prévision.

Compte tenu de ces deux hypothèses, nous pensons que le taux terminal de la Fed se situe autour de 4 %, dans le cycle actuel. Cela implique 150 points de base (pb) de baisses, alors que le marché ne prévoit que 120 pb de baisses d’ici fin 2025. Depuis fin 2022, nous prévoyons des taux plus élevés pour plus longtemps et moins de baisses de taux que le marché. En effet, nos attentes concernant la croissance américaine ont été plus élevées que le consensus et ont été le principal facteur expliquant notre position sur les taux directeurs. En outre, c’est la première fois que les anticipations de baisses de taux du marché sont moins optimistes que les « dot plots » de la Fed.

Sommes-nous à l’aise avec une attitude plus dovish cette fois-ci ?

La réponse est oui ! La théorie en politique monétaire suggère que les hausses de taux mettent du temps à affecter l’économie. Nous avons observé dans ce cycle une répercussion rapide de la politique monétaire par le biais d’un resserrement des conditions financières et du canal des prêts bancaires, mais les anticipations excessives de baisses de taux ont ensuite inversé cet effet. Il est important de faire la différence entre les données réelles et les valorisations du marché. L’année dernière, les données macroéconomiques étaient solides, mais la plupart des économistes s’attendaient à une récession ainsi qu’à des baisses de taux importantes. L’impulsion fiscale a été positive et les conditions financières se sont assouplies après l’épisode Silicon Valley Bank (SVB) ce qui a alimenté la croissance nominale.

Aujourd’hui, le soutien budgétaire est moindre, les conditions financières se resserrent, les prévisions de croissance sont élevées et les taux d’intérêt à court terme anticipent une trajectoire plus élevée pour plus longtemps. Cette combinaison de facteurs nous conforte dans notre position. Le resserrement des conditions financières pendant une période suffisante créera un environnement propice aux baisses de taux. Bien que nous puissions débattre de la question de savoir si juillet ou septembre sera la première réunion au cours de laquelle le FOMC procédera à une baisse des taux, nous pensons que le plus important est la date à laquelle nous pourrons atteindre le taux terminal. Sur la base de nos prévisions de croissance et d’inflation, cela pourrait être d’ici la fin de 2025.

Cela signifie qu’en fonction des prochaines données relatives à l’emploi et à l’inflation, nous pourrions assister à une ampleur d’une à trois réductions de taux cette année, et donc de trois à cinq réductions l’année prochaine sur la base de notre scénario de taux terminal. Par conséquent, le point d’arrivée des taux de la Fed est bien plus important que les anticipations des prochains mois.

Bilan de la Réserve fédérale américaine et dynamique de l’offre et de la demande de bons du Trésor 

La Fed a également dévoilé ses plans concernant son bilan. Celle-ci laisse actuellement 60 milliards de dollars de bons du Trésor arriver à échéance chaque mois sans les réinvestir, ce qui réduit la quantité de liquidités dans le système bancaire. Le resserrement quantitatif (QT pour quantitative tightening en anglais) contribue à exercer une certaine pression à la baisse sur les prix en augmentant la prime de risque sur le marché. Le 1er mai, le FOMC a annoncé un ralentissement du rythme de réduction du bilan en abaissant le plafond des liquidités de 60 milliards de dollars à 25 milliards de dollars en bons du Trésor. Une surprise dovish(accommodante) de la part du FOMC.

En ne remplaçant pas les bons du Trésor qui arrivent à échéance, la Fed retire un acheteur du marché des bons du Trésor. Ainsi, en réduisant de 35 milliards de dollars par mois le resserrement quantitatif, la Fed exerce un impact positif sur l’offre et la demande de 420 milliards de dollars à un horizon un an. Dans le même temps, le Trésor américain a annoncé ses plans de financement pour le troisième trimestre. Ceux-ci ont été largement conformes aux attentes, avec des tailles d’adjudication d’obligations à duration supérieure à un an inchangées (Coupons). Le déficit américain continue de peser sur le plan d’émission du Trésor américain, même si la taille des adjudications reste inchangée, les montants sont considérables.

Nous avons écrit sur la prime de terme depuis l’année dernière étant donné son niveau anormalement négatif qui se traduit par une absence de compensation pour la détention d’obligations à long terme. Nous pensons toujours que la prime de terme est trop faible pour rémunérer les investisseurs qui détiennent des obligations à long terme, en particulier face à l’abondance de l’offre. 5 De notre point de vue, la condition pour rendre cette partie de la courbe attrayante (en l’absence de récession) est une pente positive de la courbe de rendement avec une prime de terme plus élevée.

Le dernier FOMC et le Treasury Quarterly Refunding Announcement ont-ils changé notre point de vue ? Pas vraiment, même si nous reconnaissons qu’une réduction du resserrement quantitatif combiné à la stabilité de la taille des adjudications de coupons permet de lisser la réévaluation à la hausse des taux à long terme, contrairement à ce qui s’est passé l’été dernier. Ensemble, ils éliminent une partie du risque de baisse des prix des obligations du Trésor américain, mais la pression sur les obligations sera toujours présente, car l’offre arrive malgré tout sur le marché et est conséquente.

 Un autre facteur susceptible de peser sur les taux à long terme est la trajectoire des taux directeurs. En supposant qu’il n’y ait pas de récession, si l’inflation reste supérieure à 2 % et que le FOMC s’abstient d’augmenter à nouveau les taux, ils contribueront probablement à une prime de risque d’inflation plus élevée. Dans l’ensemble, les derniers développements sur le marché du Trésor américain nous confortent dans notre opinion positive sur la partie courte de la courbe des taux (2 ans de maturité). Les rendements à 2 ans devraient rester capés autour de 5 % pour le moment. Les moteurs de la partie longue sont beaucoup plus mitigés, les décideurs politiques s’efforçant d’atténuer la volatilité, mais les primes de terme restent faibles.

Notre estimation de la juste valeur du rendement américain à 10 ans se situe autour de 4,75 %, avec des risques de hausse compte tenu de notre scénario de croissance. Par conséquent, nous pensons que le chemin de moindre résistance pour la courbe des taux est la pentification.

La BCE est prête à voler de ses propres ailes 

La zone euro connaît une situation différente en matière d’inflation. Comme nous l’expliquons dans notre scénario macroéconomique, la BCE aura la possibilité de commencer à réduire ses taux dès cet été. La réunion de juin est clairement identifiée comme probable pour une première baisse. Restant prudente, la BCE maintient qu’elle souhaite voir des progrès en termes d’augmentation des salaires (c’est-à-dire un rythme de progression plus en ligne avec l’inflation à 2 %) et indique que la mise à jour de ses projections macroéconomiques sera utile pour soutenir cette première baisse des taux directeurs. Un autre élément d’attention pour la BCE est le prix du pétrole. Les récentes tensions géopolitiques ont propulsé le prix du baril au-dessus de 80 dollars. Ce qui est supérieur aux hypothèses retenues par la BCE dans ses récentes projections. Pour l’instant, cet élément reste au stade de risque et les différentes projections sur l’inflation dans la zone euro semblent s’orienter vers un environnement favorable aux baisses de taux. En termes d’estimations de taux neutres, l’économie de la zone euro est également différente de celle des États-Unis. Les facteurs post-pandémiques n’ont pas modifié matériellement les perspectives de croissance. Les estimations du taux neutre se situent entre 0 et 0,5 %, tandis que l’inflation devrait atteindre son objectif dès l’année prochaine. Il est peu probable que le taux terminal de la BCE revienne aux niveaux d’avant la pandémie et il devrait se stabiliser autour de 2 % au cours de l’année prochaine. Par conséquent, nous prévoyons des réductions graduelles cette année à partir de juin et un total de six à huit baisses d’ici la fin de 2025. Les dynamiques inflationnistes divergentes de part et d’autre de l’Atlantique expliquent les différentes réactions des banques centrales.

Allocation 

Dans ce contexte, les surprises haussières sur l’inflation américaine, la réévaluation à la hausse de la trajectoire des anticipations de taux de la Fed par les marchés et les tensions géopolitiques relatives au conflit au Moyen Orient ont pesé sur le sentiment des marchés actions. Sur la base de ces développements, nous avons décidé de privilégier une approche plus prudente sur les actifs risqués, abaissant notamment notre exposition au risque actions à deux reprises, en mars et en avril, nous menant à adopter une vue neutre sur les marchés actions. Le caractère sinueux et incertain de la dynamique d’inflation à court terme pourrait continuer à peser sur les marchés.

Cependant, au regard de notre scénario constructif sur la croissance américaine, la poursuite du mouvement de désinflation et le début du cycle de baisses de taux de la Fed, nous gardons une vue stratégiquement positive sur les actions et voyons d’un point de vue tactique les corrections de marché comme des opportunités de saisir des points d’entrée à terme. 6 En termes d’allocation, la récente remontée des taux longs nous amène désormais à être plus à l’aise avec la duration, bien que nous continuions de préférer les parties courtes et intermédiaires de la courbe avec notamment une préférence pour la zone euro en raison des divergences de croissance nominale et de politique monétaire entre les deux zones. Des divergences qui justifient également notre vue toujours positive tactiquement sur le dollar qui représente par ailleurs une couverture contre deux risques principaux à notre scénario : une inflation plus rigide qu’anticipé aux États-Unis et une escalade des tensions au Moyen-Orient.