par Matthieu Grouès, directeur des gestions, stratégie et allocation d’actifs et Julien-Pierre Nouen, stratégiste-économiste chez Lazard Frères Gestion
Les inquiétudes ont fait place à la panique sur les marchés financiers.
La folle journée de mercredi 15 octobre
• Mercredi après-midi, en l’espace d’un peu plus d’une heure, le rendement des T-notes (obligations du Trésor américain à 10 ans) est ainsi passé de 2,15% à moins de 1,90% avant de rattraper une partie de la baisse. Ce mouvement très violent sur un des actifs les plus liquides a sans doute ébranlé la confiance des investisseurs anglo-saxons. Par ailleurs, l’abandon de la fusion Abbvie- Shire a causé des débouclements importants de la part de fonds spéculatifs qui ont pu amener ceux-ci à vendre d’autres positions.
Les inquiétudes quant à une éventuelle sortie de la Grèce de son plan d’aide sans nouveau soutien des autres pays de la zone euro ont également pesé. Enfin, une rumeur démentie par la suite sur une contagion au virus Ebola à Barcelone a accentué la baisse.
• La journée de mercredi a ainsi été caractérisée par des volumes très importants sur l’ensemble des classes d’actifs et s’est soldée par un repli important des actions de la zone euro.
Stabilisation jeudi 16 octobre
• Jeudi matin, la panique s’est poursuivie : dans ce contexte délicat, l’émission de dette publique espagnole a été difficile, ce qui a pesé sur les actifs des pays du sud de la zone euro, et à 12h00, l’indice Euro Stoxx était en baisse de 5,8% par rapport à la clôture du vendredi 10 octobre, le bund allemand offrant un rendement de 0,72% contre 0,89%.
Aux Etats-Unis, à ce moment, le S&P 500 devait ouvrir en baisse de 1,6% par rapport à la veille.
• Jeudi après-midi, après la publication de statistiques rassurantes aux Etats-Unis, les marchés se sont redressés, limitant les pertes à 0,6% sur l’Euro Stoxx, mais la baisse de l’indice atteint tout de même 12,3% depuis les points hauts de septembre.
Après avoir touché un point haut à 2,4% dans la foulée de l’émission, le rendement des obligations à dix ans du trésor espagnol est revenu à 2,2%.
Perspectives macroéconomiques : toujours solides
Aux Etats-Unis, les ventes au détail ont baissé de 0,3% en septembre mais après trois mois plutôt forts. Par ailleurs, les inscriptions hebdomadaires au chômage sont au plus bas depuis quatorze ans et la production industrielle a progressé de 1,0% sur le mois.
Du côté de la zone euro, l’estimation finale de l’inflation a été publiée et amène une révision en hausse de l’inflation sous-jacente de +0,7% à +0,8%. Les immatriculations sont en hausse de 6,4% au mois de septembre sur 12 mois.
En Chine, les chiffres du commerce extérieur étaient plutôt bien orientés pour le mois de septembre tant au niveau des exportations, qu’au niveau des importations.
Notre analyse des fondamentaux économiques est inchangée
La croissance américaine est bien orientée et va le rester, ce qui amènera la Réserve Fédérale à remonter ses taux dans le courant de l’année prochaine.
Dans la zone euro, la baisse de l’euro, dont nous pensons qu’elle va se poursuivre, devrait soutenir la croissance.
Globalement, la baisse du prix du pétrole est une excellente nouvelle pour l’économie mondiale : la baisse entamée cet été réduit la facture énergétique de près de 1,1% de PIB, ce qui est de nature à soutenir la consommation dans les pays développés comme dans les pays émergents. Aux Etats-Unis, les prix à la pompe ont baissé de près de 14,0%. La faiblesse de l’inflation un peu partout dans le monde nous semble être surtout la conséquence de la baisse des prix des matières premières, et constitue donc une bonne déflation qui rend du pouvoir d’achat aux ménages.
Valorisation des marchés et résultats
Les publications de résultats du T3 peuvent être encore décevantes. Ce risque semble déjà intégré par le marché, les valeurs cycliques ayant fortement baissé.
Avec la baisse du marché, le niveau de valorisation s’est ajusté et l’indice Euro Stoxx traite sur un PE de 12,7. Un niveau qui était celui de l’été 2013 et qui se situe en dessous de la moyenne historique des vingt-cinq dernières années qui est à 13,6. Le Price to book se situe à 1,6 contre une moyenne historique à 2,0.
En conclusion
L’ampleur des volumes, la très forte corrélation entre les actifs laissent envisager un mouvement en grande partie technique. Nous sommes donc confiants dans la reprise économique et dans les marchés actions et privilégions les actions européennes.